EN BREF : la présence du justiciable et/ou de son mandataire à l’audience reste importante car ils pourront prendre des notes pendant la lecture des conclusions du rapporteur public. Un arrêt du Conseil d’Etat en date du 21 juin 2013 rappelle que les conclusions du rapporteur public permettent aux parties de percevoir les éléments décisifs du dossier, de connaître la lecture qu’en fait la juridiction et de saisir la réflexion de celle-ci durant son élaboration tout en disposant de l’opportunité d’y réagir avant que la juridiction ait statué.
La présence de l’avocat ou du justiciable à l’audience, la procédure administrative étant écrite, n’est pas obligatoire et un bref « je m’en rapporte à l’instruction écrite du dossier » ou un « je m’en rapporte à mes écritures » seront admis comme observations orales.
Mais la présence à l’audience reste importante car les parties ou leur mandataire pourront prendre des notes pendant la lecture des conclusions du rapporteur public.
La présence est d’autant plus nécessaire car le rapporteur public refusera dans la majorité des cas d’ en communiquer une copie après le délibéré. (Je suis personnellement à 100% d’absence de réponse des rapporteurs publics à mes demandes de communications de leur conclusions en 2021).
Mais attention, la prise de note est très difficile du fait de l’ambiance sonore de la salle d’audience, de la puissance de la voix du rapporteur public, des nombreuses références jurisprudentielles citées et de la vitesse de lecture.
Et en plus, il est interdit d’enregistrer et l’interdiction d’enregistrement des audiences ne porte pas une atteinte excessive à la liberté d’expression. (Cons. const. 6 déc. 2019, n° 2019-817 QPC)…
Il convient de rappeler que le rapporteur public, qui a pour mission d’exposer les questions que présente à juger le recours sur lequel il conclut et de faire connaître, en toute indépendance, son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances de fait de l’espèce et les règles de droit applicables ainsi que son opinion sur les solutions qu’appelle, suivant sa conscience, le litige soumis à la juridiction à laquelle il appartient, prononce ses conclusions après la clôture de l’instruction à laquelle il a été procédé contradictoirement.
L’exercice de cette fonction n’est pas soumis au principe du caractère contradictoire de la procédure applicable à l’instruction. Il suit de là que, pas plus que la note du rapporteur ou le projet de décision, les conclusions du rapporteur public – qui peuvent d’ailleurs ne pas être écrites – n’ont à faire l’objet d’une communication préalable aux parties.
Celles-ci ont en revanche la possibilité, après leur prononcé lors de la séance publique, de présenter des observations, soit oralement à l’audience, soit au travers d’une note en délibéré.
Ainsi, les conclusions du rapporteur public permettent aux parties de percevoir les éléments décisifs du dossier, de connaître la lecture qu’en fait la juridiction et de saisir la réflexion de celle-ci durant son élaboration tout en disposant de l’opportunité d’y réagir avant que la juridiction ait statué.
SOURCE : Conseil d’État, Section, 21/06/2013, 352427, Publié au recueil Lebon
JURISPRUDENCE :
CE, 10 juillet 1957, Gervaise, n° 26517, p. 466
CE, 29 juillet 1998, Mme,, n° 179635, p. 320
« Si le principe du contradictoire, qui tend à assurer l’égalité des parties devant le juge, implique la communication à chacune des parties de l’ensemble des pièces du dossier, ainsi que, le cas échéant, des moyens relevés d’office, le commissaire du gouvernement, qui a pour mission d’exposer les questions que présente à juger chaque recours contentieux et de faire connaître, en formulant en toute indépendance ses conclusions, son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances de fait de l’espèce et les règles de droit applicables, ainsi que son opinion sur les solutions qu’appelle, suivant sa conscience, le litige soumis à la juridiction à laquelle il appartient en prononçant ses conclusions après la clôture de l’instruction à laquelle il a été procédé contradictoirement, participe à la fonction de juger dévolue à la juridiction dont il est membre. L’exercice de cette fonction n’étant pas soumis au principe du contradictoire applicable à l’instruction, les conclusions du commissaire du gouvernement, qui peuvent d’ailleurs ne pas être écrites, n’ont, pas plus que la note du rapporteur ou le projet de décision, à faire l’objet d’une communication aux parties, lesquelles n’ont pas davantage à être invitées à y répondre. »
CEDH, 4 juin 2013, M. Marc-Antoine c/ France, n° 54984/09
CE, 18 décembre 2009, Société Sogedame, n° 305568, p. 501
« Avant même l’intervention du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009, qui a introduit aux articles R. 711-3 et R. 712-1 du code de justice administrative des dispositions posant expressément cette règle, il appartenait aux rapporteurs publics – alors dénommés commissaires du gouvernement – de la juridiction administrative, interrogés sur le sens de leurs conclusions par une partie à une affaire sur laquelle ils étaient appelés à conclure, de faire connaître à l’avance le sens de ces conclusions afin de mettre le justiciable en mesure d’apprécier l’opportunité d’assister à l’audience publique, d’y présenter des observations orales à l’appui de son argumentation écrite et, le cas échéant, de produire une note en délibéré. En l’espèce, figure au dossier transmis par la cour administrative d’appel une télécopie adressée par le greffe à l’avocat à la veille de l’audience aux termes de laquelle : « En réponse à votre fax du 1er février, je vous informe que le commissaire du gouvernement n’a pas encore conclu dans cette affaire ». A supposer même qu’ait été sollicitée la communication écrite préalablement à l’audience des conclusions orales, la demande traduite dans ce fax doit être interprétée comme valant demande de communication du sens de ces conclusions. Dans ces conditions, l’affirmation de la société selon laquelle elle avait demandé sans succès à avoir connaissance du sens des conclusions est tenue pour établie et la décision juridictionnelle est annulée pour irrégularité. »
CE, 2 février 2011, Mme,, n° 330641, T. p. 1088
« L’impossibilité dans laquelle est mise une partie de prendre connaissance du sens des conclusions du rapporteur public, faute de communication par le tribunal administratif du code permettant l’accès à l’application Sagace de son avocat, alors que ce dernier établit avoir effectué auprès du greffe une démarche, restée sans réponse, pour y accéder, entache la procédure d’irrégularité. »
CE, 5 mai 2006, Société Mullerhof, n° 259957, p. 232
« Après avoir communiqué la veille de l’audience au conseil de l’une des parties le sens des conclusions qu’il envisageait de prononcer, le commissaire du gouvernement a modifié celui-ci lors de l’audience sans en avoir préalablement prévenu ce conseil. Cette circonstance doit être regardée comme ayant porté atteinte à la régularité de la procédure suivie devant la cour administrative d’appel même si, informé de ce fait, le conseil en cause a pu produire une note en délibéré après l’audience. »
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