Dans une décision du 24 février, le Conseil d’Etat annule les dispositions de l’ordonnance du 24 avril 2019 relative à la coopération agricole ayant créé l’article L 521-3- 1 V du Code rural et de la pêche. maritime, au motif que cet article avait été adopté au mépris de l’habilitation à légiférer contenue dans la loi dite EGAlim (loi 2018-938 du 30 octobre 2018).

L'article L 521-3- 1 V du Code rural et de la pêche prévoit qu' "engage la responsabilité de la coopérative le fait de fixer une rémunération des apports abusivement basse».. Saisie sur la question des prix abusivement bas par la Coopération agricole, la plus haute juridiction administrative française estime que le gouvernement n’était pas autorisé par le législateur dans le cadre de la loi Egalim ni à créer «une action en responsabilité sur le modèle de celle qui existe en droit commercial» ni à étendre l’application du dispositif de cession à un prix abusivement bas aux sociétés coopératives.

Sans entrer sur le débat de fond, cette disposition assimilait la coopérative à un « acheteur » commercial. Or, les coopératives sont le prolongement des exploitations de leurs adhérents "associés-coopérateurs" selon un statut sui-generis.

Le Conseil d’Etat s'est prononcé uniquement sur la question de l’habilitation à légiférer par voie d'ordonnance. Il apparaissait clairement que les habilitations données dans le cadre de loi loi Egalim concernaient d’une part le statut des coopératives agricoles pour le rendre plus « transparent » et d’autre part l’action pour prix abusivement bas en droit commercial, mais qu’elles n’avaient pas autorisé le gouvernement à étendre cette action aux coopératives agricoles.

Dans ce même arrêt, le Conseil d’Etat a écarté les autres demandes de la Coopération agricole concernant l’annulation pour excès de pouvoir de deux dispositions de la même ordonnance.

La première disposition attaquée confie au Haut conseil de la coopération agricole (HCCA) la mission d'élaborer un guide des bonnes pratiques de gouvernance des coopératives et de leur union.

Le Conseil d’Etat juge que l’ordonnance attaquée s’est bornée à donner au Haut Conseil la mission d’élaborer un « guide sur les bonnes pratiques de gouvernance » des coopératives et à prévoir que le pouvoir réglementaire pouvait fixer la liste des chapitres devant obligatoirement y figurer, sans donner compétence au Haut Conseil pour réformer le régime juridique de ces organismes, ni conférer pareille compétence au pouvoir réglementaire. Eu égard à leur portée, les dispositions critiquées de l’ordonnance n’ont ni excédé le champ de l’habilitation donnée par le législateur, laquelle prévoit notamment, au 6° du I de l’article 11 de la loi du 30 octobre 2018, de « recentrer les missions du Haut Conseil de la coopération agricole sur la mise en œuvre, le contrôle et la sanction du droit coopératif », ni insuffisamment défini l’intervention du pouvoir réglementaire. Les moyens soulevés à l’encontre de ces dispositions ne peuvent, par suite, qu’être écartés. La force obligatoire du Guide du HCCA, à paraître incessamment, ne posera plus question.

La 2de disposition renvoie à un décret la définition des attributions et des modalités d’exécution de la mission du médiateur de la coopération agricole. "Rien ne faisait par suite obstacle à ce que l’ordonnance renvoie à un décret en Conseil d’Etat le soin de fixer les attributions du médiateur, par une disposition de nature réglementaire qui ne saurait avoir pour effet de permettre à ce décret de déroger à la loi ou d’intervenir dans une matière législative. Le moyen soulevé ne peut, par suite, qu’être écarté."