En matière d’infection nosocomiale, les établissements de santé entendent parfois, notamment en matière de chirurgie orthopédique, contester le principe même de leur responsabilité de plein droit, aux motifs que : « le lien de causalité entre l’intervention de prothèse et la survenue de l’infection apparait bien affaibli ôtant ainsi à ces infections tout caractère nosocomial ».

 

Pour ce faire, l’établissement soutient classiquement :

  • D’une part, que « certains germes retrouvés au décours de ce geste étaient présents avant l’intervention litigieuse, de sorte qu’il peut être considéré que s’agissant de ces germes, l’infection était alors préexistante et ne revêt donc pas le caractère nosocomial ».

 

  • D’autre part, s’agissant des autres germes, que : « la présence de ces germes est en lien avec l’état antérieur du requérant qui était particulièrement exposé à l’infection ».

 

Or, et au-delà même du fait que cette analyse ne résiste pas à l’examen et se révèle souvent contraire aux conclusions expertales, elle apparait au demeurant manifestement contraire à l’esprit de l’article L.1142-1 I du Code de la santé publique.

 

Enfin et surtout, cette position est très largement contredite par la définition même de l’infection nosocomiale, posée par la jurisprudence de manière constante.

 

Il est en effet admis que les établissements peuvent s'exonérer de leur responsabilité de plein droit que la preuve d'une cause étrangère.

 

Il appartient alors à l’établissement de rapporter la preuve que l’infection contractée par la victime  présente le caractère d'imprévisibilité et d'irrésistibilité.

 

L’établissement doit-il encore démontrer que :

 

  • L’infection n’est pas la conséquence des soins ;
  • L’infection constitue un évènement extérieur à l’activité hospitalière.

 

 

Or, la jurisprudence se révèle particulièrement restrictive dans l’appréciation de la cause étrangère exonératoire, de sorte que cette notion apparait des plus tenues.

 

Ainsi, par exemple, le fait que l’infection ait été provoquée par la pathologie d’un patient ne constitue pas une cause étrangère de nature à exonérer l’établissement de sa responsabilité de plein droit, ni même à priver le demandeur d’une indemnisation.

 

 

Il est également constant que la nature endogène du germe ne peut être considérée comme une cause étrangère exonératoire de responsabilité de plein droit de l’établissement.

 

Voir en ce sens, différents arrêts :

 

  • «  Après avoir constaté que, même si l'infection avait pu être provoquée par la pathologie de la patiente, liée à un aléa thérapeutique, cette infection demeurait consécutive aux soins dispensés au sein de la clinique et ne procédait pas d'une circonstance extérieure à l'activité de cet établissement, la cour d'appel a écarté, à bon droit, l'existence d'une cause étrangère exonératoire de responsabilité. » [1] 

 

  • « Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'infection de Mme A est due à des germes présents dans son organisme avant l'opération mais devenus pathogènes du fait de celle-ci ; qu'en reconnaissant à cette infection contractée à l'hôpital un caractère nosocomial, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'elle n'a pas davantage commis une telle erreur en jugeant que le seul élément invoqué devant elle par le centre hospitalier, tiré de ce que l'infection présentait un caractère endogène, ne permettait pas de regarder comme rapportée la preuve d'une cause étrangère. » [2]
  • « Dès lors que l'infection est une conséquence des soins et ne peut de ce fait être regardée comme un événement extérieur à l'activité hospitalière, la cour n'a pas davantage méconnu ces dispositions en jugeant que le centre hospitalier universitaire n'apportait pas la preuve d'une cause étrangère exonératoire de sa responsabilité, alors même que l'infection résulterait d'une évolution de la nécrose postopératoire survenue sous l'effet de germes endogènes sans qu'il y ait eu manquement aux règles d'asepsie »[3]

 

En outre, exclure la qualification d’infection nosocomiale au motif que l’infection serait inéluctable, reviendrait à rajouter une condition que les textes ne posent pas et serait contraire aux définitions concordantes de l’infection nosocomiale depuis la recommandation du Comité des ministres du conseil de l’Europe de 1984[4].

 

Maître Vincent RAFFIN, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit médical et dommages corporels, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.

Pour le contacter, appelez-le au 02.40.89.00.70, ou prenez contact au moyen du formulaire de contact afin qu’une réponse vous soit apportée dans les meilleurs délais.

Consultez d'autres articles sur le même thème ou sur un thème voisin du domaine de Maitre Vincent RAFFIN. http://www.brg-avocats.fr/

 


[1] Civ. 1ère 14 avril 2016 n°14-23909 

[2] CE 14 décembre 2011 n°330644

[3] CE 13 février 2012 n°336293

[4] Recommandation  n° R 84 20