Comment se déroule l’expertise médicale judiciaire ? Quels documents et pièces dois-je communiquer à l’expert ? Faut-il être assisté lors de l’expertise ?

De manière générale, le processus judiciaire d’indemnisation commence par la saisine du Tribunal, le plus souvent le juge des référés. Ce dernier est saisi par voie d’assignation afin de désigner un expert judiciaire qui évaluera l’intégralité des préjudices corporels subis par la victime.

En outre, le juge peut d’ores et déjà verser à la victime une provision dans l’attente de l’indemnisation définitive.

Bien que le juge ait un pouvoir souverain d’appréciation pour fixer l’indemnisation, il fait le plus souvent appel à un expert médical pour pouvoir statuer le plus justement possible. Le médecin-expert est plus apte à comprendre et maîtriser les incidences juridiques de la mission qui lui est confiée et, par conséquent, à rédiger un rapport d’expertise judiciaire.

L’objectif de l’expertise médicale est d’évaluer précisément l’ensemble des préjudices subis par la victime.

L’expertise médicale peut être sollicitée par chacune des parties (le plus souvent la victime).

Une fois désigné par le Juge, l’expert va prendre contact avec les parties à la procédure (généralement la victime et l’assureur du responsable) et solliciter à chacune d’elles l’ensemble des documents et des pièces permettant l’évaluation médico-légale du dommage corporel.

S’agissant de la victime, il lui faudra adresser à l’expert son entier dossier médical, toutes les pièces justificatives propres à éclairer l’expert sur l’existence même ou bien sur l’étendue des préjudices allégués. Des attestations ou certificats médicaux pertinents peuvent également être communiqués à l’expert afin d’emporter sa conviction sur tel ou tel aspect du préjudice.

En outre, il faut considérer l’expertise comme une discussion entre l’expert et la victime. Il ne faut pas hésiter à émettre des doléances et lui apporter toutes les précisions utiles à l’examen médical en vue de la rédaction de son rapport.

L’expertise est certainement la phase où la victime à le plus besoin d’être conseillée et assistée.

Bien que le médecin expert soit indépendant et objectif, il ne faut pas éluder le fait que durant cette phase se joue en grande partie l’indemnisation de la victime.

Le responsable et son assureur seront eux assistés de médecins-conseils et d’avocats dont la mission est de minimiser les préjudices de la victime.

Ce rapport de force doit inciter la victime à se faire assister d’un médecin conseil et d’un avocat, lesquels disposent des connaissances médicales et juridiques permettant de s’assurer que l’ensemble des préjudices seront justement évalués par le médecin expert.

Une réunion préparatoire entre la victime et son médecin-conseil doit être organisée avant la réunion d’expertise afin de balayer tout le spectre de la mission technique de l’expert judiciaire.

De son côté, l’avocat devra faire en sorte que les responsabilités soient bien établies. Il faudra identifier l’assureur payeur, chiffrer les préjudices, préparer la victime à la réunion en lui apportant toutes les informations nécessaires au déroulement de l’expertise, en un mot : DESACRALISER l’expertise !

A l’issue de la réunion d’expertise, le médecin expert rédigera le plus souvent un pré-rapport sur lequel les parties pourront discuter en apportant des observations et/ou précisions sur des éléments techniques.

A l’issue de ce débat technique, l’expert judiciaire rédigera son rapport définitif et le transmettra à la juridiction saisie du litige.

Selon l'article 246 du nouveau Code de procédure civile, "le juge n'est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien".

Dans la réalité judiciaire, il apparaît au contraire que le juge (qui n’est pas un technicien médical) se réfugie bien souvent derrière les conclusions de l’expert pour statuer sur le montant de l’indemnisation de la victime.

Le juge transcrit en droit les constatations de l’expert afin d’en déterminer une indemnisation chiffrée.

L’expert judiciaire dispose donc d’un pouvoir important qu’il ne faut surtout pas sous-estimer !

En matière de réparation du dommage corporel, les délais sont longs pour obtenir un rapport d’expertise médicale judiciaire. Il faut compter entre un et deux ans entre la demande d’expertise judiciaire et la rédaction du rapport d’expertise !!

A l’issue du rapport d’expertise, la compagnie d’assurance du responsable présentera une offre indemnitaire, fondée sur le rapport de l’expert.

A ce stade de la procédure, le rôle de l’avocat est primordial puisqu’il dispose de connaissances juridiques et d’une expérience lui permettant d’analyser, de vérifier et de négocier avec l’assureur du responsable afin d’obtenir de manière amiable ou judiciairement une indemnisation intégrale.

Si l’offre proposée par l’assureur se révèle insuffisante, il ne faudra pas hésiter à demander au Tribunal de trancher sur le montant de l’indemnisation définitive.

Karim HELLAL