OUI : afin de mettre la pression sur l'autorité administrative qui instruit le recours administratif et en même temps gagner un peu de temps sur l'instruction de l'affaire. Dans un arrêt en date du 25 avril 2003, le Conseil d’Etat a rappelé que le juge administratif, saisi prématurément d'une requête dirigée contre une décision qui n'est pas encore intervenue, ne peut faire usage du pouvoir, qu'il tient de l'article R.222-1 du code de justice administrative, de la rejeter par ordonnance pour irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance, dès lors que l'irrecevabilité de telles conclusions peut être couverte en cours d'instance par l'intervention de la décision, prématurément attaquée, entre l'introduction de l'instance et le jugement du litige.


Le Professeur René CHAPUS écrivait dans son traité de droit du contentieux administratif, Domat droit public, Montchrestien, 11° édition 2004, n°661-3, p. 550 : « il n'est pas nécessaire d'attendre l'intervention de cette décision pour saisir la juridiction. Son intervention en cours d'instance régularisera le recours ».

La jurisprudence du Conseil d’Etat a confirmé que la régularisation des recours prématurés peut être assurée par l’intervention pendant l'instance d’une décision expresse ou implicite portant rejet de la demande formée devant l’administration par l'intéressé.

Pour les décisions suscitées par une demande antérieure à l’introduction du recours, ce point est tranché depuis plus de quatre-vingts ans (Conseil d’Etat, Section. 22 juillet 1938, Lambert, p. 718) et depuis près de cinquante ans pour les décisions nées d’une demande postérieures à l’introduction de la requête (Conseil d'Etat, du 8 juillet 1970, 72891, publié au recueil Lebon : « Aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut lui être opposée, si, postérieurement à l'enregistrement de sa demande, il a saisi l'administration d'une réclamation, le silence gardé par celle-ci pendant plus de quatre mois faisant naître une décision implicite de rejet contre laquelle les conclusions de la demande doivent être regardées comme dirigées.). »

Voir également :

Conseil d’Etat, 7 Octobre 1977, Chaler et Racanier, DA 1977, n°397

Conseil d'Etat, 1 SS, du 15 juin 1994, 126723, inédit au recueil Lebon (société des laboratoires Lucien )

« Considérant qu'en l'absence de décision expresse du ministre des affaires sociales et de l'intégration la SOCIETE DES LABORATOIRES LUCIEN devait attaquer la décision implicite née du silence gardé pendant quatre mois sur son recours administratif ; que si le délai de quatre mois n'était pas arrivé à son terme lorsque la société a saisi le Conseil d'Etat le 14 juin 1991 d'une requête dirigée contre la prétendue décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre il est constant que ce délai est expiré à la date à laquelle le Conseil d'Etat est appelé à statuer ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la requête de la SOCIETE DES LABORATOIRES LUCIEN serait irrecevable faute de décision préalable ; »

Conseil d'Etat, 2ème et 1ère sous-sections réunies, du 25 avril 2003, 238683, mentionné aux tables du recueil Lebon (SA Clinique Les Châtaigner »)

« Le juge, saisi prématurément d'une requête dirigée contre une décision qui n'est pas encore intervenue, ne peut faire usage du pouvoir, qu'il tient de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, de la rejeter par ordonnance pour irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance, dès lors que l'irrecevabilité de telles conclusions peut être couverte en cours d'instance par l'intervention de la décision, prématurément attaquée, entre l'introduction de l'instance et le jugement du litige. »