OUI : dans un arrêt en date du 09 février 2004, le Conseil d’Etat a considéré qu’est susceptible de présenter un caractère utile au sens de l'article R.532-1 du code de justice administrative une mesure d'expertise contradictoire sollicitée par un fonctionnaire aux fins d'évaluer le préjudice corporel subi par lui à la suite de l'accident de service dont il a été victime.


Comme vous le savez si vous me lisez régulièrement sur le site www.jurisconsulte.net , le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident de service ou de la maladie professionnelle ou d’origine professionnelle, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément peut obtenir de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique.

Une action de droit commun peut également aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage subi par le fonctionnaire dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de la collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait.

Conseil d'État, Assemblée, 04/07/2003, 211106, Publié au recueil Lebon (Mme Moya-Caville)

Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 16/12/2013, 353798 (Centre Hospitalier de Royan)

Mais il est TOUJOURS très difficile d’évaluer le montant du préjudice subi.

Alors même que les conséquences dommageables d'un accident sont susceptibles d'ouvrir droit à une pension forfaitaire d'invalidité (rente invalidité en cas de retraite pour invalidité ou allocation temporaire d’invalidité en cas de reprise d’activité), tout fonctionnaire conserve le droit de réclamer à son employeur public (Etat, collectivités locales ou établissement public de santé …) dans les conditions du droit commun, une indemnisation complémentaire destinée à lui procurer la réparation intégrale du préjudice corporel subi, dès lors que ce dernier serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombe à celui-ci.

En conséquence, est susceptible de présenter un caractère utile au sens de l'article R.532-1 du code de justice administrative une mesure d'expertise contradictoire sollicitée par un fonctionnaire aux fins d'évaluer le préjudice corporel subi par lui à la suite de l'accident de service dont il a été victime.

SOURCE : Conseil d'État, 7ème / 2ème SSR, 09/02/2004, 252865

JURISPRUDENCE :

Conseil d'État, Assemblée, 04/07/2003, 211106, Publié au recueil Lebon (Mme Moya-Caville)

« Les dispositions des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite et, pour les fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, le II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 et les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font cependant pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique. Elle ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci. »

Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 16/12/2013, 353798 (Centre Hospitalier de Royan)

« Compte tenu des conditions posées à son octroi et de son mode de calcul, l'allocation temporaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait. »

En ce qu'elles excluent la réparation complémentaire de tout préjudice patrimonial au titre de la garantie des risques et incluent ainsi la totalité des préjudices patrimoniaux dans l'objet de ces prestations :

  • s'agissant de l'allocation temporaire d'invalidité, CE, Assemblée, 4 juillet 2003, Mme Moya-Caville, n° 211106, p. 323 ;
  • s'agissant de la rente viagère d'invalidité, CE, 25 juin 2008, Mme Baron, n° 286910, T. pp. 833 et 922. Rappr.,
  • s'agissant de la rente d'accident du travail, CE, Section, avis, 8 mars 2013, M. Doget, n° 361273, à publier au Recueil ;
  • s'agissant de la pension militaire d'invalidité, CE, 7 octobre 2013, Ministre de la défense c/ Hamblin, n° 337851, à publier au Recueil. Comp.,

Sur l'objet de l'allocation temporaire d'invalidité, Cass. crim., 19 mai 2009, n° 08-86050, Bull. crim. 2009, n° 95 ; Cass. civ. 2è, 11 juin 2009, n° 08-11853, Bull. 2009, II, n° 161 ;

Sur l'objet de la rente viagère d'invalidité, Cass., Avis, 29 octobre 2007, n° 07-00016, Bull. 2007, avis, n° 11.