Le Conseil d’État, par une décision en date du 19 juin 2019 (n°413967) indique que le DDTM peut émettre à l’encontre d’un seul bénéficiaire la taxe d’aménagement, charge à lui, de solliciter le paiement auprès des autres bénéficiaires.

Faits :

Messieurs A et B ont chacun obtenu d’une commune un permis de construire pour la construction d’une maison individuelle. Le terrain d’assiette devait faire l’objet d’une division avant l’achèvement de la construction. C’est dans ces conditions que le DDTM a émis deux titres de perceptions d’un montant de 3.095 et 355 euros à l’encontre de M.A.

M. A contestait, bien entendu, qu’il soit mis à sa charge ces deux titres de perception. Le Tribunal administratif de Nantes lui a donné raison. C’est contre ce jugement que le Ministre de la cohésion et des territoires s’est pourvu.

Question de droit :

Est-il possible de mettre à la charge d’un seul propriétaire la taxe d’aménagement qui porte sur deux propriétés qui n’ont pas encore fait l'objet d'une division parcellaire ?

Considérant de principe :

« 4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un permis de construire a été délivré à plusieurs personnes physiques ou morales pour la construction de bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance avant l'achèvement des travaux conformément à l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme, les redevables de la taxe d'aménagement dont ce permis est le fait générateur sont les titulaires de celui-ci, chacun d'entre eux étant redevable de l'intégralité de la taxe due à raison de l'opération de construction autorisée. Dans une telle hypothèse, l'administration compétente peut mettre cette taxe à la charge soit de l'un quelconque des bénéficiaires du permis, soit de chacun de ces bénéficiaires à la condition alors que le montant cumulé correspondant aux différents titres de perception émis n'excède pas celui de la taxe due à raison de la délivrance du permis. Par suite, en jugeant que le service ordonnateur ne pouvait mettre la taxe d'aménagement due à raison de l'opération de construction autorisée par le permis de construire délivré le 17 mai 2013 à la charge du seul M. A... au motif que M. et Mme B...étaient, eux aussi, bénéficiaires du permis et, par suite, redevables de cette taxe, le tribunal a commis une erreur de droit. Le ministre de la cohésion des territoires et de la mer est fondé pour ce motif, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation du jugement qu'il attaque. »

Enseignement n°1 :

La taxe d' aménagement instituée par la loi n°2010-1568 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 et codifiée aux articles L. 331-1 à L. 331-34 du Code de l'urbanisme est destinée à permettre aux collectivités territoriales de financer les actions et opérations qui contribuent à la réalisation des objectifs définis à l'article L. 121-1 du même code en assurant notamment un développement urbain et rural maîtrisé, une gestion de l'habitat favorisant la diversité des fonctions urbaines et la mixité sociale, une utilisation économe et équilibré des espaces naturels, urbains ou ruraux dans le respect des objectifs du développement durable.

Bien qu'affectée au financement de l'urbanisme, la taxe d'aménagement ne peut pas être confondue avec les participations. Comme la taxe locale d'équipement, à laquelle elle se substitue, elle constitue une imposition à caractère forfaitaire et général sur la construction, la reconstruction ou l'agrandissement de bâtiments qui est destinée au financement des équipements généraux de la commune et qui, malgré le lien établi désormais entre la taxe d' aménagement et les plans d'urbanisme, reste exigible, selon les termes de la doctrine administrative antérieure, même pour une construction qui ne nécessiterait la réalisation d'aucun équipement public (Rép. min. no 90582, JOAN 22 août 2006, p. 8931).

En ce qui concerne les communes, les communautés urbaines et les intercommunalités, la taxe locale est instituée de plein droit pour celles qui sont dotées d’un PLU ou d’un POS.

En l’espèce, la commune assiette du projet objet du litige était bien dotée d’un PLU. Ce qui rendait immédiatement exigible cette taxe.

Enseignement n°2 :

L’article L.331-6 du code de l’urbanisme indique que, sans exonération expresse, cette taxe est due pour toutes les opérations d'aménagement, de construction, de reconstruction et d'agrandissement des bâtiments, installations ou aménagements de toute nature soumises à un régime d'autorisation en vertu du Code de l'urbanisme.

A contrario, sont exonérées de plein droit les constructions visées à l’article R.331-4 du code de la construction. Il s’agit principalement des constructions édifiées pour le compte de l’État, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des EPA, des GIP, des associations reconnues d’utilité publique, des congrégations et autres constructions cultuelles, des caisses d’assurances maladie, des mutuelles et organisations inter-gouvernementales.

Dans ce litige, il ne pouvait être contesté que, s’agissant de construction de maisons individuelles, la taxe d’aménagement était clairement exigible.

Enseignement n°3 :

En l’espèce, le Conseil d’État rappelle que cette taxe était bien exigible pour les constructions envisagées. Il indique ensuite que lorsqu’un permis de construire a été octroyé à plusieurs personnes, il est loisible à l’autorité administrative d’adresser à l’un des propriétaires ou à chacun d’entre eux les titres de perception afférents à cette taxe. Le montant cumulé de ces titres ne doit toutefois pas dépasser le montant de la taxe due pour la délivrance du permis de construire. Enfin, lorsque le titre de perception est adressé à un seul des propriétaires, il lui incombe alors d’obtenir de la part des autres propriétaires le versement de la part de la taxe correspondant aux constructions.

Pour notre part, nous trouvons cette solution très illogique et irraisonnée dans la mesure où un particulier ne dispose pas des mêmes moyens que l’administration, qui bénéficie du privlège du préalable, pour recouvrer cette somme et, pourra se retrouver dans l’obligation d’introduire une procédure afin d’obtenir paiement de cette créance. Cette solution est donc, à notre sens, aberrante.