Vous souhaitez vous porter acquéreur d’un bien immobilier indivis et formulez à ce titre, une offre d’achat.

En principe, la vente étant un acte de disposition, l’accord de l’ensemble des indivisaires est nécessaire afin de conclure l’acte de vente.

Or, problème, dans votre cas, l’un des indivisaires refuse de donner son accord à la vente (car il n’est pas d’accord avec le prix proposé, les conditions de la vente, ou le principe même de la vente).

 

Il est néanmoins possible de passer outre ce refus, sous certaines conditions.

En effet, les indivisaires souhaitant la conclusion de la vente peuvent saisir le Juge, demandant à être autorisé à procéder à la vente.

En effet, aux termes de l’article 815-5 du Code civil :

« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun […]

L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut ».

Il ressort de ce texte que l’autorisation judiciaire de vendre le bien amiablement est opposable à l’indivisaire qui refuse la vente, laquelle peut donc, en principe, intervenir dès le prononcé du jugement.

Tout se passe donc comme si l'indivisaire récalcitrant avait donné son consentement.

Cette décision prive de son efficacité la volonté de l'indivisaire dont le refus met en péril l'intérêt commun et elle complète le pouvoir insuffisant des autres indivisaires. L'autorité du juge vient donc au secours de la volonté des indivisaires consentant à l'acte pour garantir à celui-ci sa pleine validité et le rendre opposable à tous, y compris à l'indivisaire récalcitrant.

 

Toutefois, cela ne signifie pas que cet acte l'oblige. Il devra, certes, en respecter l'existence, puisqu'il lui est opposable, mais il ne saurait être lié par un acte auquel il est demeuré tiers.

Par conséquent, insuffisant à empêcher la conclusion d'un acte conforme à l'intérêt commun et autorisé par le juge, le refus d'un indivisaire ne peut néanmoins être source pour lui d'une obligation à laquelle il n'aurait pas consenti.

Cela signifie, par exemple, qu'en cas de vente d'un bien indivis autorisée en justice sur le fondement de l'article 815-5 du Code civil susmentionné, l'indivisaire qui s'est opposé à la vente ne pourra certes plus prétendre utiliser le bien vendu (c'est l'effet de l'opposabilité), mais il ne sera pas tenu, à l'égard de l'acquéreur, de la garantie des vices cachés.

 

De surcroît, la décision judiciaire autorisant la vente, n’est pas une décision définitive, tant qu’elle n’est pas passée en force de chose jugée. Autrement dit, tant qu’elle est susceptible d’une voie de recours.

Ce qui veut dire que, même si la vente peut être régularisée en vertu d'une décision exécutoire, sa remise en cause (par le biais d’un appel ou un pourvoit en cassation), pourrait affecter la validité de l'acte.

Concrètement, si l’indivisaire interjette appel de la décision autorisant ses coindivisaires à vous vendre le bien immobilier en dépit de son refus, cet appel, ne vous empêche pas, en principe, de vous porter néanmoins acquéreur dudit bien.

Toutefois, ce ne serait pas sans prise de risque certaine puisque la décision autorisant la vente, pourrait être réformée en appel.

 

Quelles en seraient les conséquences pour vous ?

La réformation de la décision autorisant la vente, n’entraine pas automatiquement la nullité de la vente passée entre temps.

En effet, aux termes d’une jurisprudence souvent réaffirmée, la vente d'un immeuble indivis faite par un seul des indivisaires sans l'accord des autres est valable à concurrence des droits indivis appartenant au vendeur.

Autrement dit, la cession d'un bien indivis par un seul indivisaire est opposable aux coïndivisaires à concurrence de la quote-part de son auteur.

Par conséquent, vous pourrez donc conclure la vente sans attendre l’issue de la procédure d’appel initiée par l’indivisaire récalcitrant.

D’ailleurs, le notaire à qui il serait demandé de procéder aux formalités de la vente, ne pourra exiger au préalable, un certificat de non-opposition ou de non-appel.

Toutefois, si la Cour d’appel réforme le jugement de première instance, vous ne pourrez-vous porter acquéreurs qu’à hauteur de la quote-part appartenant aux coindivisaires qui accepteront de signer l’acte de vente.

Par conséquent, vous vous retrouverez en indivision avec l’indivisaire qui a refusé la vente…

 

En bref : il est tout à fait possible de se porter acquéreur d’un bien indivis, et ce, en dépit du refus d’un des indivisaires, néanmoins, la procédure peut s’avérer longue et pas entièrement satisfaisante pour vous.

Pour plus de conseils et/ou assistance dans le cadre de l’acquisition d’un bien immobilier (litigieuse ou non), vous pouvez contacter notre Cabinet.

 

Samedi 22 janvier 2022