Depuis la loi de finance rectificative du 29 décembre 2016 (L. n° 2016-1918, 29 déc. 2016), les agents de l'administration fiscale peuvent effectuer des visites en tous lieux, même privés, où sont susceptibles d'être détenus des pièces et documents se rapportant à des agissements frauduleux en matière d'impôts sur le revenu, sur les bénéfices ou de taxes sur le chiffre d'affaires.

Plus que cela, les agents peuvent procéder à la saisie des documents accessibles ou disponibles depuis les locaux visités, notamment ceux présents sur un support informatique, quand bien même ces documents seraient stockés sur des serveurs informatiques situés dans des lieux distincts (L'article L. 16 B du LPF).

Ces dispositions, viennent d’être déclarées conformes à la constitution par le Conseil Constitutionnel dans une décision - rendue sur une question prioritaire de constitutionnalité -, en date du 11 mars 2022 (Cons. const., 11 mars 2022, n° 2021-980 QPC).

Le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions contestées « procèdent à une conciliation équilibrée entre l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale et le droit au respect de la vie privée ».

 

Aller plus loin : La lutte contre la fraude fiscale se fait, en droit français, le nid de très nombreuses exceptions aux règles de droit commun, mais également aux règles spéciales et même, tel que c’est le cas en l’espèce, aux droits fondamentaux d'inviolabilité du domicile et du respect à la vie privée.

Un autre exemple fort de la prééminence qu’accorde le législateur français à la lutte contre la fraude fiscale face aux autres objectifs non pas moins importants, est le droit accordé à l’administration fiscale de poursuivre à titre personnel le dirigeant de fait ou de droit d’une société faisant objet d’une procédure collective.

En principe, le jugement d’ouverture d’une procédure collective, arrête les poursuites individuelles à l’égard du débiteur qui fait objet de cette procédure et ce, qu’il s’agisse d’une action tendant à :

  • la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;
  • la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent ;
  • l'exécution forcée tant sur les meubles que sur les immeubles du débiteur (y compris, toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.

Il s’agit d’un des principes cardinaux du droit des procédures collectives - gage de leur succès -, reposant sur la nécessité d’une part, d’imposer une discipline collective aux créanciers et d’autre part, ne pas dégrader la situation du débiteur plus qu’elle ne l’est déjà.

 

Quant aux dirigeants de fait ou de droit d’une société en procédure collective, ces derniers ne sont en principe pas iniquités, à moins que la liquidation judiciaire fasse apparaître une insuffisance d'actif (ou son aggravation), due à une gestion fautive de sa part.

Dans ce cas, le liquidateur ou le ministère public, pourront poursuivre ledit dirigeant en comblement du passif et le tribunal pourra décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, par les dirigeants ayant contribué à la faute de gestion.

Donc à moins d’avoir commis une faute de gestion ayant fait apparaître ou aggraver une insuffisance d’actif, le ou les dirigeants de la société en liquidation ne peuvent être poursuivis à titre personnel.

C’est sans compter sur l’exception offerte par le législateur à l’administration fiscale.

Et pour cause, l’administration pourra, après avoir effectué un contrôle fiscal, poursuivre en justice le dirigeant de fait ou de droit d'une société en procédure collective, si elle estime qu’il se soit rendu responsable de fraude fiscale. A ce titre, elle pourra solliciter sa condamnation solidaire au paiement des impositions et pénalités non recouvrés du fait de cette fraude. 

Toutefois, en cas de condamnation le dirigent pourra contester la décision.

Attention : les éventuelles voies de recours exercées contre la décision de condamnation ne font pas obstacle à ce que le comptable public prenne à l’encontre du dirigent, des mesures conservatoires en vue de préserver le recouvrement de la créance du Trésor (ex : hypothèque provisoire), avec toutes les conséquences qui en découlent.

 

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Jeudi, 24 mars 2022