Servitude dite du tour d'échelle
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 22-18.909
- ECLI:FR:CCASS:2024:C300265
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 30 mai 2024
Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Carpentras, du 13 mai 2022
Président
Mme Teiller (président)
Avocat(s)
SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 30 mai 2024
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 265 F-D
Pourvoi n° G 22-18.909
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 MAI 2024
M. [G] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 22-18.909 contre le jugement civil rendu le 13 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Carpentras, dans le litige l'opposant à Mme [O] [K], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Baraké, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [B], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [K], après débats en l'audience publique du 3 avril 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Baraké, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Carpentras, 13 mai 2022), rendu en dernier ressort, Mme [K] a demandé à son voisin, M. [B], l'autorisation d'accéder à sa propriété pour installer un échafaudage nécessaire à la réalisation de travaux de rénovation de la façade de son immeuble.
2. Celui-ci a accepté, sous réserve que le passage des éléments de l'échafaudage soit réalisé par-dessus le mur séparatif des deux propriétés, et non par l'ouverture existant dans cet ouvrage, devant laquelle est implanté un poulailler.
3. Dénonçant le non-respect des modalités de cet accord et des dégradations, M. [B] a assigné Mme [K] en réparation de divers préjudices.
4. Celle-ci a demandé reconventionnellement sa condamnation au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
5. M. [B] fait grief au jugement de rejeter l'ensemble de ses demandes et de le condamner à payer à Mme [K] une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors « que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en l'espèce, M. [B] faisait valoir que Mme [K] avait commis une faute en détruisant son poulailler afin d'accéder à son terrain et d'y poser un échafaudage ; que pour écarter les demandes indemnitaires de M. [B], le tribunal s'est borné à juger que les conditions du tour d'échelle « étaient parfaitement réunies, Mme [K] promettant une remise en état des lieux après travaux » ; qu'en se déterminant ainsi, quand la réunion des conditions permettant la reconnaissance d'un droit de tour d'échelle ne permettait pas à elle seule d'exclure la faute de Mme [K] consistant dans la destruction du poulailler de M. [B], et à exclure l'indemnisation des préjudices subis du fait de cette destruction, le tribunal, qui s'est prononcé par des motifs impropres à justifier la solution retenue, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1241 et 1240 du code civil. » Réponse de la cour
Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil :
6. Aux termes de ce texte, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
7. Pour rejeter les demandes, l'arrêt relève que M. [B] avait donné son autorisation à Mme [K] d'accéder à sa cour pour y installer un échafaudage, à condition que les ouvriers ne passent pas par l'ouverture existant dans le mur séparatif de leurs propriétés, en raison de la présence d'un poulailler.
8. Il retient que les conditions de « la servitude dite du tour d'échelle » étaient réunies, et que, s'étant opposé à la remise en état à laquelle Mme [K] s'était engagée, celui-ci ne peut prétendre à une indemnisation de ses préjudices.
9. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à écarter l'existence d'une faute tenant à la méconnaissance des conditions posées par le propriétaire pour autoriser l'accès à son fonds, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt rejetant les demandes de M. [B] entraîne la cassation du chef de dispositif le condamnant au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de Mme [K] au titre d'un préjudice d'agrément, le jugement rendu le 13 mai 2022, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Carpentras ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire d'Avignon ;
Condamne Mme [K] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [K] et la condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300265
Publié par ALBERT CASTON à 11:50
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Libellés : responsabilité délictuelle , tour d'échelle , voisinage
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