Au début du XXe siècle, une fresque de 10 tableaux, représentant 10 villes desservies par la ligne Paris-Menton, a été peinte à la Gare de Lyon à Paris.

En 1981, répondant à un appel d’offres de la SNCF, l'atelier de X a restauré cette fresque et peint une nouvelle fresque de 11 tableaux.

En 2009, la SNCF a informé X qu’elle souhaitait faire restaurer cette fresque.

X interdisait alors qu’il soit fait appel à un autre artiste que lui et dénonçait des altérations sur la fresque.

La SNCF a cependant attribué le chantier à un tiers, chantier qui a été achevé en 2018.

[entretemps la gare a subi un incendie]

En 2018, X a alors fait assigner la SNCF en violation de son droit moral d'auteur.

Le 4 mars 2022, la CA Paris a débouté X de ses demandes, dans un arrêt très intéressant sur 3 points :

1.  X est-il l’auteur des fresques de 1981 ? [OUI]

La SNCF refusait de reconnaître la qualité d’auteur de X au motif que la fresque aurait été réalisée par un autre artiste, Y, qui en revendiquait la paternité.

Cependant, X a versé de nombreuses attestations prouvant l'intervention de plusieurs artistes de son atelier, dont Y, dans la conception et la réalisation de la fresque, la contribution des divers artistes ne pouvant être distinguée.

La fresque est donc une œuvre collective.

Par ailleurs, il est établi que cette œuvre collective a été réalisée sous l’autorité de X puisque :

  • c’est X qui a établi le devis en 1981
  • c’est à X que la SNCF a passé commande
  • c’est avec X que la SNCF a échangé
  • c’est X qui a signé le PV de réception des travaux

X est donc l’auteur de la fresque.

2. La demande de X fondée sur son droit moral est-elle prescrite ? [OUI]

X reprochait à la SNCF des négligences dans l'entretien de l’œuvre et d'avoir porté atteinte à l'intégrité de celle-ci.

Cependant, la Cour rappelle que :

  • le droit moral de l'auteur est imprescriptible
  • mais l'action fondée sur une atteinte au droit moral se prescrit par 5 ans à compter du jour où l’artiste a connu ou aurait dû connaître l'existence de l'atteinte

Or, dès 2009, X s’était plaint à la SNCF des dégradations subies par la fresque.

L’action de X, initiée en 2018, est donc prescrite.

3. La SNCF avait-elle l’obligation de faire appel à X pour restaurer la fresque ? [NON]

X reprochait à la SNCF de ne pas l’avoir associé à l'exécution des travaux de restauration.

Mais pour la Cour, la SNCF n'avait aucune obligation de recourir à X ni pour avis, ni pour exécuter les travaux de réfection.

La SNCF avait l’obligation d’entretenir l'œuvre, mais pas de la faire entretenir par X lui-même, ni même sous son contrôle.

Tout au plus X aurait pu se plaindre d’une rénovation inappropriée et donc d’une atteinte à l’intégrité de l’œuvre, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Il est donc possible de faire restaurer l'œuvre d'un artiste par un tiers, mais attention à l'atteinte au droit moral de l'artiste en cas de restauration ratée !