La cour d'appel de Rouen, chambre sociale, a rendu le 11 septembre 2025 un arrêt relatif à la contestation d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse. Cette décision s'inscrit dans le contentieux classique du droit du licenciement disciplinaire et de ses conditions de mise en oeuvre.

Un salarié a été engagé en qualité de cariste manutentionnaire par une société de transport, d'abord dans le cadre de missions intérimaires en 2019, puis par contrat à durée déterminée, avant que la relation contractuelle ne se poursuive sous la forme d'un contrat à durée indéterminée à compter du 9 mars 2020. Le 26 septembre 2022, ce salarié a porté une gifle à un collègue devant plusieurs témoins. Il a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable qui s'est tenu le 14 octobre 2022. L'employeur lui a ensuite demandé de reprendre son travail le 17 octobre 2022, avant de le convoquer à un second entretien préalable le 28 novembre suivant. Le licenciement pour cause réelle et sérieuse lui a été notifié le 8 décembre 2022, fondé sur les faits de violence et sur le prétendu non-respect d'un engagement pris lors du premier entretien préalable.

Le salarié a saisi le conseil de prud'hommes du Havre qui, par jugement du 5 juillet 2024, a jugé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de ses demandes indemnitaires. Le salarié a interjeté appel de cette décision.

Devant la cour d'appel, le salarié soutenait que l'employeur n'avait pas respecté le délai d'un mois prévu par l'article L. 1332-2 du code du travail entre l'entretien préalable du 14 octobre 2022 et la notification du licenciement intervenue le 8 décembre 2022. Il contestait également l'existence d'un quelconque engagement de sa part et produisait des messages attestant de ses tentatives de contact avec son collègue. L'employeur soutenait avoir respecté la procédure en considérant que le second entretien préalable du 28 novembre 2022 constituait le point de départ du délai et que les griefs étaient établis.

La question posée à la cour était double : d'une part, le non-respect du délai d'un mois entre l'entretien préalable et la notification du licenciement prive-t-il ce dernier de cause réelle et sérieuse ? D'autre part, l'employeur rapporte-t-il la preuve de l'engagement prétendument pris par le salarié et de son inexécution ?

La cour d'appel de Rouen a infirmé le jugement entrepris et jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle a considéré que les faits de violence du 26 septembre 2022 ne pouvaient légitimer le licenciement dès lors que celui-ci avait été notifié plus d'un mois après l'entretien préalable du 14 octobre 2022, peu important que l'employeur ait procédé à un second entretien préalable. Elle a également estimé que l'employeur n'établissait pas avec certitude l'existence d'un engagement pris par le salarié, les attestations produites étant contradictoires et le salarié justifiant avoir tenté de contacter son collègue.

Cette décision mérite examen tant du point de vue du respect impératif des délais de la procédure disciplinaire (I) que de la charge de la preuve pesant sur l'employeur en matière de licenciement (II).

 

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