Par trois décisions du 17 décembre 2010, le Conseil constitutionnel, saisi de questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) relatives à la détention provisoire, a censuré certaines dispositions et formulé des réserves d'interprétation.

Inconstitutionnalité de l'article 207, alinéa 1, du Code de procédure pénale.

- Dans la QPC n° 2010-81, le Conseil constitutionnel était saisi de la conformité à la Constitution du premier alinéa de l'article 207 du Code de procédure pénale, prévoyant que lorsqu'une chambre de l'instruction infirme une décision du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention (JLD) et rend une décision ayant pour objet de maintenir ou de prolonger la détention provisoire, elle peut se déclarer seule compétente pour statuer en cette matière dans la suite de la procédure. Cette disposition est censurée par le Conseil constitutionnel qui considère que ce pouvoir discrétionnaire laissé à la chambre de l'instruction prive le mis en examen de l'application de certaines garanties constitutionnelles, notamment du droit à un double degré de juridiction. Cette déclaration d'inconstitutionnalité est à effet immédiat. En conséquence, cessent de produire effet, à compter de cette date, les décisions par lesquelles une chambre de l'instruction s'était réservée la compétence pour statuer sur les demandes de mise en liberté et prolonger le cas échéant la détention provisoire. Il en va de même en matière de contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique.

Équilibre des droits des parties et réserves liées au « petit dépôt ».

- Dans la QPC n°2010-62, le Conseil constitutionnel était saisi de la conformité à la Constitution de l'article 148 du Code de procédure pénale qui permet à toute personne placée en détention provisoire, à tout moment, de demander sa mise en liberté.

Lorsque le juge d'instruction n'accède pas à sa demande, celle-ci est transférée au JLD, qui statue au regard de l'avis motivé du juge d'instruction et des réquisitions du ministère public. Le Conseil constitutionnel juge que cette disposition est conforme à la Constitution mais émet une réserve d'interprétation : le JLD ne peut refuser la demande de mise en liberté sans que l'avocat du mis en examen ait eu lui-même copie de l'avis du juge d'instruction et des réquisitions, et ce afin de respecter l'équilibre des droits des parties.

Dans la QPC n° 2010-80, le Conseil constitutionnel était saisi de la conformité à la Constitution de l'article 803-3 du Code de procédure pénale aux termes duquel, en cas de nécessité, une personne peut être retenue à l'issue de sa garde à vue, pour une durée maximale de 20 heures dans les locaux du TGI en vue de son déferrement devant un magistrat de ce tribunal (procédure parfois appelé le « petit dépôt »).

Pour le Conseil constitutionnel, cette privation de liberté n'est pas en soi inconstitutionnelle, dès lors qu'elle est liée à des contraintes matérielles et qu'elle est strictement enfermée dans un délai (limitée à 20 heures et impossible si la garde à vue a duré plus de 72 heures). Le Conseil constitutionnel formule cependant une double réserve :

- le magistrat devant lequel la personne est appelée à comparaître doit être informé sans délai de l'arrivée de la personne déférée dans les locaux de la juridiction, afin qu'il puisse porter une appréciation immédiate sur l'opportunité de cette rétention ;

- si la garde à vue a été renouvelée par le procureur de la République, la personne retenue doit être impérativement présentée à un magistrat du siège avant expiration du délai de 20 heures. La seule présentation à un parquetier dans ce délai ne serait pas conforme à la Constitution.

(Cons. constit., 17 déc. 2010, n° 2010-81 QPCCons. constit., 17 déc. 2010, n°2010-62 QPCCons. constit., 17 déc. 2010, n° 2010-80 QPC)