Par une décision du 15 février 2021, le Conseil d’État rappelle que l’urgence s’apprécie strictement en matière de référé-suspension adossé à un recours “Tarn-et-Garonne”, tout en ouvrant une brèche lorsque le candidat sortant, évincé, est en situation de dépendance économique vis-à-vis de l’administration.

On a avait vu que l’hypothèse d’un marché procurant plus d’un tiers du chiffre d’affaires de la société évincé n’est pas suffisant pour qualifier l’urgence, dans le cadre d’un référé-suspension (CE, 19 janvier 2015, société Ribière : n°385634).

Le Conseil d’État rappelle tout d’abord que :

Lorsque le tribunal administratif est saisi d’une demande contestant la validité d’un contrat, le juge des référés peut être saisi, sur ce fondement, d’une demande tendant à la suspension de son exécution, qu’il peut ordonner lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de ce contrat et à conduire à la cessation de son exécution ou à son annulation, eu égard aux intérêts en présence.

Puis d’ajouter :

en constatant qu’il ressortait des pièces du dossier que le chiffre d’affaires de la société Omega + était intégralement assuré par l’exploitation des salles de spectacles dont elle assurait précédemment la gestion et que son avenir à court terme était fragilisé par la perte de ce contrat et en en déduisant que l’attribution du contrat litigieux à une autre société portait une atteinte grave et immédiate à ses intérêts, l’auteur de l’ordonnance attaquée n’a pas dénaturé les pièces du dossier.

Deux critères s’évincent de la décision pour que la procédure soit couronnée de succès :

  • L’existence d’un doute sérieux quant à la légalité du contrat ;
  • L’urgence résultant d’une atteinte suffisamment grave et immédiate portée par son exécution à la situation ou aux intérêts du requérant, ici la dépendance économique incarnée par la perte du contrat perdu.

Le chas de l’urgence est donc difficile à passer, mais pas impossible comme nous le montre cette décision du Conseil d’État. Ainsi, lorsque sa survie économique de l’entreprise dépend d’un seul contrat, le référé-suspension apparait comme une nécessité. La décision citée nous en donnant une éclatante illustration.


CE, 15 février 2021, commune de Toulon : n°445488.

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