Le Conseil d’Etat, par un arrêt de principe en date du 4 juillet 2003[1], a posé le principe que si, conformément au Code de pensions civiles et militaires de retraite et au décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse Nationale de Retraite des Agents des Collectivités Locales, il peut être déterminé forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d’un accident de service ou atteint d’une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l’atteinte qu’il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l’obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu’ils peuvent courir dans l’exercice de leurs fonctions, ces dispositions ne font cependant pas obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré du fait de l’accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d’agrément obtienne de la collectivité qui l’emploie, même en l’absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l’atteinte à l’intégrité physique, ni à ce qu’une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l’ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l’accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l’état d’un ouvrage public dont l’entretien incombait à celle-ci.

 

En matière d’indemnisation des dommages imputables à un accident de service dont a été victime un agent, l’on sait toute l’évolution jurisprudentielle administrative essentiellement initiée à partir de l’arrêt Moya-Caville, puis confirmée et précisée notamment par l’arrêt du Conseil d’état du 16 décembre 2013, lequel a considérablement élargi le champ des préjudices indemnisables en matière de responsabilité sans faute[2], puis, par l’arrêt du Conseil d’état du 14 novembre 2014[3].

 

Récemment, la Cour Administrative d’Appel de Versailles a également rappelé, aux termes d’un arrêt en date du 8 février 2018, que :

 

« La rente viagère d’invalidité et l’allocation temporaire d’invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l’incidence professionnelle résultant de l’incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle ; que les dispositions qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l’obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu’ils peuvent courir dans l’exercice de leurs fonctions ; que ces dispositions ne font en revanche pas obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l’invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d’une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l’emploie, même en l’absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu’une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l’ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment ou l’invalidité ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne (…) ».[4]

 

En substance, l’agent a donc désormais la faculté :

 

  1. A titre principal, d’initier une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait.

 

  1. A titre subsidiaire, d’obtenir, en complément de l’allocation temporaire d’invalidité (ATI), une indemnité complémentaire réparant les préjudices patrimoniaux d’une autre nature que ceux réparés par l’ATI et/ ou les préjudices personnels[5].

 

Par cet arrêt du 7 février 2020, la Cour administrative d’appel de Nantes,  juge en ce sens et rappelle que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, peut obtenir de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité.

 

En revanche la cour ne s’inscrit pas dans cette lignée jurisprudentielle quant à l’étendue des préjudices indemnisables en matière de responsabilité sans faute dans la mesure où elle juge  qu’en l'absence de toute faute du centre hospitalier ainsi que cela a été précisé au point 5, les conclusions de M. G... tendant à l'octroi d'une indemnisation complémentaire au titre de la perte de revenus professionnels ne peuvent qu'être rejetées, le versement de l'allocation temporaire d'invalidité à M. G... devant être regardé comme couvrant de manière forfaitaire ces postes de préjudice.

 

Une telle position est particulièrement préjudiciable à la victime dans l’hypothèse où elle celle-ci démontrerait pourtant que l’allocation temporaire ne compense pas totalement son traitement habituel et qu’elle subit une perte de revenus.

 

Maître Vincent RAFFIN, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit médical et dommages corporels, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.

Pour le contacter, appelez-le au 02.40.89.00.70, ou prenez contact au moyen du formulaire de contact afin qu’une réponse vous soit apportée dans les meilleurs délais.

Consultez d'autres articles sur le même thème ou sur un thème voisin du domaine de Maitre Vincent RAFFIN. http://www.brg-avocats.fr/

CAA NANTES, 7.02.2020,  18 NT 03449   https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000041548641?tab_selection=all&searchField=ALL&query=18NT03449&page=1&init=true

 


[1] CE. 04.07.2003, MOYA-CAVILLE (Juris Data n° 2003-065604)

[2] CE, 16.12.2013, n°353798

[3] CE 14.11.2014 n°357999

[4] CAA Versaille 8 février 2018 n°16VE00412

[5] V. en ce sens, arrêt précité, CE, 16.12.2013, n°353798