La possibilité de saisine du Conseil d’Etat pour avis se révèle fort utile et précieuse.

 

Les juridictions du fond savent en faire usage à bon escient et l’on ne peut que s’en réjouir.

 

Le délai de recours de 2 mois et son opposabilité au requérant nourrissent encore parfois le contentieux indemnitaire et entache à regret la recevabilité de la demande formulée par une victime, ce qui peut se révéler dramatique.

 

Le tribunal soumettait donc la question suivante à la haute juridiction :

 

« En matière de responsabilité extracontractuelle de la puissance publique, un justiciable qui n'a pas saisi le juge administratif dans le délai de recours contentieux qui lui était ouvert par la notification de la décision de l'administration rejetant sa réclamation indemnitaire ne spécifiant, dans une première hypothèse, aucun chef de préjudice ou, dans une seconde, que certains chefs de préjudice, peut-il, après avoir saisi l'administration d'une nouvelle réclamation indemnitaire faisant état du même fait générateur de responsabilité et sans se heurter à une forclusion, saisir le juge d'une requête indemnitaire spécifiant cette fois, dans la première hypothèse, un ou des chefs de préjudice ou, dans la seconde, d'autres chefs de préjudice que ceux invoqués par la première réclamation ? »

 

Le Conseil d’Etat réponde en deux temps :

En premier lieu, il conclut que « une fois expiré ce délai de deux mois, la victime saisit le juge d'une demande indemnitaire portant sur la réparation de dommages causés par le même fait générateur, cette demande est tardive et, par suite, irrecevable. Il en va ainsi alors même que ce recours indemnitaire indiquerait pour la première fois les chefs de préjudice auxquels se rattachent les dommages, ou invoquerait d'autres chefs de préjudice, ou aurait été précédé d'une nouvelle décision administrative de rejet à la suite d'une nouvelle réclamation portant sur les conséquences de ce même fait générateur."

En second lieu, il indique qu’« il n'est fait exception à ce qui est dit au point précédent que dans le cas où la victime demande réparation de dommages qui, tout en étant causés par le même fait générateur, sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement à la décision administrative ayant rejeté sa réclamation. 

Le conseil prend alors même le soin de préciser que « la victime peut également, si le juge administratif est déjà saisi par elle du litige indemnitaire né du refus opposé à sa réclamation, ne pas saisir l'administration d'une nouvelle réclamation et invoquer directement l'existence de ces dommages devant le juge administratif saisi du litige en premier ressort afin que, sous réserve le cas échéant des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle, il y statue par la même décision. La victime peut faire de même devant le juge d'appel, dans la limite toutefois du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant de l'indemnité demandée au titre des dommages qui sont nés, ou se sont aggravés, ou ont été révélés dans toute leur ampleur postérieurement au jugement de première instance. »

 

Avis n° 439366 du 19 février 2021

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