L’évaluation du taux de déficit fonctionnel permanent ne relève pas du monopole d’appréciation des médecins experts !

 

Le juge peut procéder à sa propre évaluation.

 

Nous le savions, le Conseil d’Etat[1] le rappelle ! dans cet arrêt du 24 mars 2021 en censurant un arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon[2] mais aussi en statuant immédiatement au fond, ce qui constitue un gain de temps et d’argent massif pour la victime.

 

La difficulté d’évaluation de la cécité se révèle singulière avec un taux de déficit fonctionnel qui varie nécessairement de manière exponentielle et non pas linéaire selon que la cécité est partielle et ne touche qu’un œil ou total et intéresse les deux yeux.

 

Le conseil d’état propose ainsi une méthode de détermination propre à la liquidation de ce poste de préjudice :

« Pour évaluer le montant de l'indemnité due au titre du préjudice de déficit fonctionnel permanent imputable à un accident alors que la victime souffrait antérieurement d'une infirmité de même nature, il appartient aux juges du fond de se livrer, en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce, à une estimation du préjudice de déficit fonctionnel permanent résultant directement de l'événement ayant causé la nouvelle infirmité. »

 

Le Conseil d’Etat en déduit alors que :

 

«  Par suite, si, pour évaluer le montant de l'indemnité due à M. A... au titre du préjudice de déficit fonctionnel permanent résultant de l'accident ayant causé une cécité totale de son oeil droit, il appartenait à la cour administrative d'appel de tenir compte, ainsi qu'elle l'a fait, de la cécité totale préexistante de son œil gauche, elle ne pouvait en revanche, sans erreur de droit, fixer une indemnisation fondée sur la différence entre le taux de déficit permanent fonctionnel imputable à sa cécité totale résultant de l'accident et le taux de déficit fonctionnel permanent dont il souffrait antérieurement. En effet, une telle différence entre deux taux, s'agissant de l'évaluation du déficit fonctionnel permanent, ne permet pas d'évaluer le préjudice résultant directement de l'accident. »

 

Autrement dit le taux de DFP final lié à l’accident n’est pas = à  DFP total – DFP antérieur.

 

Le Conseil d’Etat juge alors le fond du dossier :

 

« Il résulte de l'instruction et notamment des rapports d'expertise, que M. A... souffre, en raison de sa cécité totale, d'un taux de déficit fonctionnel permanent de 85%. Compte tenu, d'une part, du montant de l'indemnisation correspondant à un tel taux de déficit fonctionnel permanent pour une personne de son âge et, d'autre part, de la circonstance qu'il souffrait, avant l'accident en litige, d'un déficit fonctionnel permanent lié à la perte totale d'un de ses deux yeux, il sera fait, eu égard à l'indemnisation correspondant à cette infirmité d'un oeil, une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à 250 000 euros. »

 

L’indemnisation du DFP est ainsi portée de 150 000 € en appel à 250 000 € désormais.

CE 24 mars 2021 n°428924

 

Maître Vincent RAFFIN, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit médical et dommages corporels, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.

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[1] https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000043289896?juridiction=CONSEIL_ETAT&juridiction=TRIBUNAL_CONFLIT&page=1&pageSize=10&query=victime&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=cetat

[2] arrêt n° 16LY04280 du 15 janvier 2019, la cour administrative d'appel de Lyon