Vente immobilière : 1) vices cachés - acquéreurs successifs - actions récursoires (conditions); 2) Agent immobilier - responsabilité
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 21 janvier 2015
N° de pourvoi: 13-17.982
Non publié au bulletin Rejet

M. Terrier (président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boullez, SCP Boutet-Hourdeaux, avocat(s)

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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mars 2013), que le 3 juillet 2000, M. X... a acquis de M. Y... et Mme Z... (les consorts Y...- Z...) une maison d'habitation qu'il a vendue le 23 août 2002 par l'intermédiaire de l'agence immobilière Atella immo (la société Atella immo) à M. et Mme B... ; que ceux-ci, se plaignant d'infiltrations d'eau, ont assigné, après expertise, en annulation de la vente et indemnisation de leurs préjudices la société Atella immo et M. X..., qui a appelé en garantie les consorts Y...- Z... ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action en garantie des vices cachés de M. et Mme B..., de prononcer la résolution de la vente et de le condamner à leur verser diverses sommes, alors, selon le moyen :

1°/ que le vendeur qui n'est pas un professionnel, peut se prévaloir de la stipulation d'une clause l'exonérant de la garantie des vices cachés, sauf à établir qu'il avait eu effectivement connaissance du vice avant la vente ; qu'en se déterminant en considération de M. A... qui a précisé que la cause des dégâts était identique à ceux qu'il avait constatés lors de la première visite technique du 22 mai 2001 pour en déduire, même en l'absence de devis ou de tout autre écrit remis à M. X... à l'occasion de cette première visite, que ce dernier avait été nécessairement informé du vice résultant du pourrissement de la toiture, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser la mauvaise foi de M. X..., à défaut d'avoir constaté d'où il résultait que M. A... aurait expressément averti M. X... que la cause des désordres provenait des fuites de la toiture qui étaient cachées par la présence d'un matelas d'isolation phonique ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1643 du code civil ;

2°/ que la bonne foi du vendeur profane est toujours présumée ; qu'il s'ensuit qu'il appartenait à M. et Mme B... de rapporter la preuve de la mauvaise foi de M. X... en démontrant qu'il avait connaissance des vices provenant de la toiture et qu'il avait sollicité les services de M. A... aux fins d'y remédier ; qu'en imposant à M. X... de rapporter la preuve que le passage de M. A... était justifié par la nécessité d'évaluer le coût de la remise en état de la charpente affaissée, ce qui serait contredit par l'absence de devis, mais qu'elle n'était pas justifiée par les fuites de la toiture dont il n'avait pas connaissance, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve ; qu'ainsi, elle a violé les articles 1315 et 1643 du Code civil ;

3°/ que le vendeur qui n'est pas un professionnel, est présumé ignorer les vices de la chose vendue ; qu'en retenant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... ne pouvait ignorer l'existence des vices, à supposer même qu'il n'ait pas su que leur cause résidait dans une toiture fuyarde, la cour d'appel qui tient pour inopérante la démonstration que M. X... ignorait que les désordres trouvaient leur cause dans le vice de la toiture dont le pourrissement était dissimulé par la présence d'un matelas d'isolation phonique, a posé à la charge du vendeur profane, une présomption de connaissance des vices, en violation de l'article 1643 du code civil ;

4°/ qu'en retenant que M. X... avait déjà fait établir un constat de dégât des eaux au 2ème étage dans le mois suivant son acquisition, quand une telle circonstance n'était pas d'avantage de nature à établir que M. X... ait eu connaissance des désordres affectant la toiture et son caractère fuyard, la cour d'appel a déduit un motif inopérant, en violation de l'article 1643 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que, dans son attestation, M. A..., entrepreneur contacté en mai 2001 par M. X... pour établir un devis de réfection de la couverture, précisait que les causes des dégâts constatés en octobre 2002 existaient déjà en mai 2001, relevé, sans inversion de la charge de la preuve, que M. X..., qui s'était contenté de repeindre les murs pour faire disparaître les traces d'infiltration et permettre la vente, avait connaissance du vice dans son ampleur au moment de la vente et retenu qu'il ne pouvait être considéré de bonne foi, la cour d'appel, abstraction faite d'un motif surabondant relatif à un constat de dégâts des eaux, en a exactement déduit que M. X... ne pouvait se prévaloir de la clause d'exonération des vices cachés incluse dans l'acte de vente ;

D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action en garantie des vices cachés de M. et Mme B..., de prononcer la résolution de la vente et de le condamner à leur verser diverses sommes, alors, selon le moyen, que l'action rédhibitoire est fermée à l'acquéreur lorsqu'il n'est plus en mesure de restituer la chose qui est perdue par l'effet de sa négligence et de son manque d'entretien ; qu'en refusant de s'expliquer sur les manquements des acheteurs à leur obligation d'entretien courant comme sur leur refus d'adopter les mesures conservatoires qui auraient permis d'éviter que la maison ne tombe en ruine pour la raison que la perte de la chose n'est que la conséquence directe du défaut de la chose vendue, ainsi que l'expert en a attesté, au lieu de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'entretien de la maison par les acquéreurs et la pose adéquate d'une bâche préconisée par l'expert aurait permis d'éviter que la maison ne tombe en ruine et qu'elle ne fasse l'objet d'un arrêté de péril au point qu'elle ne doive être rebâtie, la cour d'appel a violé les articles 1644 et 1647 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, constaté que le vice caché constitué par le pourrissement très avancé des bois, chevrons et liteaux composant l'ossature de la charpente n'était pas décelable dans son ampleur par M. et Mme B... lors de la vente, relevé que la perte de l'immeuble, y compris l'effondrement de ses parties supérieures, était la conséquence directe du vice qui l'affectait et retenu que M. et Mme B... étaient dans l'incapacité de procéder aux travaux de réfection de la couverture préconisés par l'expert, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a pu en déduire que, même en l'absence de bâchage immédiat, les demandes de M. et Mme B... pouvaient être accueillies ;

D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu, d'une part, que le premier moyen étant rejeté, la première branche, qui invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que M. X... avait eu connaissance en mai 2001 du vice affectant la toiture de l'immeuble acheté aux consorts Y...- Z... et ne les avait attraits en garantie de ce vice qu'en 2007 et que son action soumise aux dispositions de l'article 1648 du code civil, dans sa rédaction applicable, n'avait pas été intentée dans un bref délai à compter de la découverte de ce vice, la cour d'appel, qui n'a pas adopté les motifs contraires du jugement, en a exactement déduit que son action à leur encontre était prescrite ;

D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de garantie des condamnations prononcées à son encontre au profit de M. et Mme B... par la société Atella Immo, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera nécessairement l'annulation, par voie de conséquence, des dispositions de l'arrêt déboutant M. X... de l'appel en garantie qu'il avait formé à l'encontre de son agent immobilier en se fondant sur la prétendue connaissance qu'il avait acquise du vice en mai 2001 ;

2°/ que tenu d'une obligation d'information et de conseil à l'égard du vendeur qui l'a mandaté, l'agent immobilier est tenu de le mettre en garde contre les vices dont est affecté l'immeuble qu'il se propose de vendre, et de procéder au besoin aux contrôles qui lui permettraient d'en découvrir l'existence d'autant qu'il est averti par son mandant de la nécessité de procéder à certains travaux affectant sa structure lourde tels que des travaux de toiture ; qu'en retenant, pour dégager la société Attela Immo de toute responsabilité à l'égard de son mandant, qu'il n'était pas établi qu'elle ait eu des connaissances des vices affectant la toiture de l'immeuble, quand il lui appartenait de se renseigner sur l'état de la toiture dont le vendeur l'avait informé qu'elle nécessitait des travaux de réfection, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1991 du code civil ;

3°/ que l'agent immobilier doit déconseiller à son client de mettre en vente un immeuble défectueux, à supposer même que le vendeur en connaisse les vices ; qu'en retenant, par des motifs adoptés des premiers juges, que M. X... ne pouvait exiger de l'agent immobilier qu'il lui déconseille de mettre en vente un immeuble comprenant des vices, bien qu'il ait informé son mandataire de la nécessité de travaux, la cour d'appel a violé l'article 1147 et 1991 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que le premier moyen étant rejeté, la première branche, qui invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé qu'aucun élément n'établissait que la société Atella immo, à laquelle M. X... avait indiqué que des travaux étaient à prévoir au niveau de la toiture, avait eu connaissance du vice caché affectant l'immeuble, ni été informée par M. X... de sa réalité et retenu que l'état apparent de l'immeuble ne justifiait, de la part de cette société qui n'était pas un professionnel de la construction, aucune investigation supplémentaire par rapport à l'information qui lui avait été donnée, la cour d'appel a pu, par ces seuls motifs, en déduire qu'elle n'avait pas manqué à son obligation de renseignement et de conseil à l'égard de M. X... ;

D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la société Atella immo la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;