Cour de cassation

chambre commerciale

Audience publique du mardi 26 février 2013

N° de pourvoi: 11-28.397

Non publié au bulletin Rejet

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 6 octobre 2011), que la société Steel'form, aux droits de laquelle vient la société Steelform, a recherché la responsabilité de son expert-comptable, la société civile professionnelle X... Y... Z... A... B... C... (l'expert-comptable), chargé de l'établissement des comptes annuels, lui reprochant de ne pas lui avoir révélé l'irrégularité résultant de l'absence de constitution d'une réserve spéciale de participation pour les exercices allant de 1992 à 2004, obligation à laquelle elle était soumise à la suite du franchissement du seuil du nombre de salariés prévu par la loi ;

Attendu que la société Steelform fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen :

1°/ que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations des juges du fond que la société Steel'form n'a été informée de l'absence d'accord de participation en faveur de ses salariés et n'a, par conséquent, eu connaissance du dommage que par le rapport de son commissaire aux comptes du 5 mars 2004 ; qu'en jugeant cependant que le point de départ de la prescription devait être fixé au jour où l'obligation de l'expert-comptable a été exécutée, c'est à dire à chaque remise annuelle des comptes, pour en déduire que la responsabilité de la SCP X... Y... Z... A... B... C... ne pouvait être recherchée que pour l'exécution de ses obligations à compter du 21 février 1997, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4 du code de commerce ;

2/ que l'expert-comptable chargé d'établir les comptes et bilan annuels d'une société doit, compte-tenu des informations qu'il détient, s'assurer que ces comptes et bilan sont, en tout point, conformes aux exigences légales ; qu'il doit en conséquence vérifier si l'effectif de la société excède cinquante salariés afin, le cas échéant, d'inscrire en comptabilité la réserve de participation des salariés ainsi qu'une provision correspondant à l'intérêt prévu par l'article L. 442-12 ancien du code du travail ; qu'en l'espèce, la SCP X... Y... Z... A... B... C... s'est vue confier la mission d'établir les comptes et bilan annuels de la société Steel'form de 1992 à 2004 ; qu'en jugeant, par motifs adoptés, que la SCP X... Y... Z... A... B... C... n'était pas tenue de constater le nombre de salariés travaillant dans l'entreprise, cependant que la mission comptable qui lui avait été confiée imposait un tel calcul, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

3/ que l'expert-comptable chargé d'établir les comptes et bilan annuels d'une société est tenu, si les éléments dont il dispose révèlent que l'effectif de la société pourrait excéder cinquante salariés, d'alerter son client sur le risque de franchissement du seuil de cinquante salariés et sur la nécessité de constituer dans ce cas une réserve de participation et de conclure un accord de participation ; qu'en jugeant que l'expert-comptable n'avait pas manqué à son devoir de conseil dans la mesure où il ne pouvait connaître l'effectif exact de la société Steel'form, sans rechercher s'il aurait dû, compte-tenu des informations dont il disposait, en particulier l'importance des sommes payées mensuellement aux sociétés d'intérim, s'interroger sur le franchissement du seuil de cinquante salariés et alerter son client sur les risques afférents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

4/ que l'expert-comptable n'est pas dispensé de son devoir de conseil par les compétences de son client ou le fait qu'il soit assisté d'un professionnel ; qu'en relevant, pour exclure tout manquement de la SCP X... Y... Z... A... B... C... à ses obligations, que la société Steel'form avait eu recours à de multiples reprises, entre 1992 et 2004, à une aide juridique spécialisée pour les questions de droit social, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la mission confiée à l'expert-comptable portait sur l'établissement des comptes et bilan annuels, l'arrêt énonce que le devoir de conseil de l'expert-comptable est limité à la mission qui lui est confiée et retient que la faute alléguée ne saurait lui être reprochée dès lors qu'aucune mission en droit social ne lui avait été confiée ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations excluant toute faute de l'expert-comptable et rendant dès lors inopérant le grief de la première branche, et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la quatrième branche, c'est à bon droit et sans avoir à faire la recherche visée par la troisième branche que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses première et quatrième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Steelform aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Cabinet Z... A... B... C... la somme de 2 500 euros ;