14ème législature

Question N° : 10018 de M. François Loncle ( Socialiste, républicain et citoyen - Eure ) Question écrite

Ministère interrogé > Justice Ministère attributaire > Justice

Rubrique > professions judiciaires et juridiques Tête d'analyse > avocats Analyse > accès à la profession

Question publiée au JO le : 13/11/2012 page : 6433

Réponse publiée au JO le : 05/03/2013 page : 2623

Date de renouvellement : 19/02/2013

Texte de la question

M. François Loncle attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le décret n° 2012-441 relatif aux conditions particulières d'accès à la profession d'avocat. Publié en catimini le 3 avril 2012 au Journal officiel, ce décret institue de nouvelles passerelles vers le métier d'avocat pour « les personnes ayant exercé des responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi pendant huit années », à la seule autre condition de posséder une maîtrise de droit ou un diplôme équivalent. Cette généreuse disposition s'applique, en fait, aux anciens ministres et parlementaires qui bénéficient, en outre, d'avantages supplémentaires puisqu'ils sont dispensés de « formation théorique et pratique ainsi que du certificat d'aptitude à la profession d'avocat ». Autrement dit, les personnes concernées peuvent désormais revêtir la robe d'avocat sans avoir jamais suivi de formation spécifique ni passé d'examen. Cette dérogation équivaut à un privilège éhonté, dans la mesure où un mandat électif ou une fonction gouvernementale ne peut, en aucune façon, se substituer à un diplôme, ou permettre l'exercice d'un métier qui requiert des compétences particulières. C'est pourquoi il lui demande d'abroger un texte inique qui, non seulement dégrade la belle profession d'avocat, mais accroît les risques de conflits d'intérêt, voire de trafics d'influence.

Texte de la réponse

L'accès à la profession d'avocat est réservé par la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques aux titulaires d'une maîtrise en droit ou d'un diplôme équivalent. Le décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat prévoit des dispenses de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) en faveur de « personnes ayant exercé certaines fonctions ou activités en France ». Il s'agit notamment des magistrats (judiciaires et administratifs), notaires, huissiers, maîtres de conférences en droit, fonctionnaires de catégorie A, juristes d'entreprise etc.. . Une autre dérogation dispense du CAPA les personnes ayant exercé en qualité de cadre pendant huit ans une activité juridique à titre principal, sous réserve de la réussite à un examen de contrôle des connaissances en déontologie et réglementation professionnelle. Il résultait d'une pratique en cours dans certains barreaux que le parlementaire souhaitant aaccéder à la profession était assimilé à un fonctionnaire de catégorie A (article 98 4° du décret de 1991) s'il justifiait d'une maîtrise en droit et d'une ancienneté d'au moins huit ans. En 2011, cette lecture critiquable du décret a été contestée par le parquet. Pour « légaliser » cette pratique, est intervenue la modification dite « passerelle » du décret du 3 avril 2012 qui a créé un nouvel article 97-1. Celui-ci avait ouvert l'accès à la profession d'avocat aux « personnes justifiant de huit ans au moins d'exercice de responsabilités publiques les faisant directement participer à l'élaboration de la loi », c'est-à-dire aux anciens parlementaires et aux anciens ministres qui sont dispensés de la formation pratique et du CAPA. Les critiques justifiées du décret « passerelle » portent en particulier sur l'absence d'examen de contrôle des connaissances déontologiques et sur les risques de conflits d'intérêts. Pleinement consciente de ces critiques, la garde des sceaux a annoncé l'abrogation de l'article 97-1 et une réflexion s'est engagée, en concertation avec la profession sur les conditions d'accès à la profession.