Saisie d’une action en responsabilité suite au retard (8 mois) du Juge des tutelles pour statuer sur une demande de résiliation de bail, la Cour d’appel de PARIS a condamné l’État à indemniser le préjudice moral et financier subi par le majeur sous curatelle.
En droit : un délai de réponse aux requêtes de 3 mois, non assorti de sanction légale...
Le juge des tutelles dispose d’un délai de réponse trois mois pour statuer sur les requêtes qui lui sont adressées pendant le cours d’une mesure de curatelle ou de tutelle.
Bien que n’étant assorti d’aucune sanction légale, tout retard injustifié est susceptible d’engager la responsabilité de l’État et/ou celle du tuteur ou du curateur, c’est ce que la Cour d’Appel de PARIS a jugé le 09 avril 2015.
Qui n'exclut pas la responsabilité des organes de la tutelle (Juge des tutelles, Greffier, curateur, tuteur)
Tous les organes de la mesure de protection judiciaire sont responsables du dommage résultant d'une faute quelconque qu'ils commettent dans l'exercice de leur fonction.
Lorsque la faute à l'origine du dommage a été commise dans l'organisation et le fonctionnement de la mesure de protection par le juge des tutelles, le greffier, l'action en responsabilité diligentée par la personne protégée ou par ses héritiers est dirigée contre l'Etat[1].
Il en résulte pour les majeurs protégés que pour engager la responsabilité de l'État, la loi n'exige pas la démonstration d'une faute lourde ou d'un déni de justice mais uniquement celle d'une faute simple.
Ces textes traduisent la volonté du législateur d'assurer une protection toute particulière des personnes vulnérables bénéficiant d'une mesure judiciaire pour lesquelles les décisions des organes de protection ont des conséquences tant sur leur vie personnelle que sur leur patrimoine.
Et le délai fixé par la loi traduit bien l'obligation de répondre avec célérité aux demandes qui notamment, comme au cas particulier, peuvent avoir des incidences financières importantes pour ceux qui disposent de revenus modestes avec des budgets calculés au plus juste de sorte que toute dépense inutile engage ses moyens de subsistance.
En l’espèce : aucune faute du curateur mais condamnation de l’Agent judiciaire du Trésor
Une autorisation de résiliation de bail est une requête qui présente un caractère d'urgence particulier en ce qu'elle peut engendrer, si elle n'est pas rendue dans un délai raisonnable, pour le majeur protégé un coût financier inutile résultant de la poursuite du paiement des loyers pour un logement qu'il n'occupe plus.
Le déroulement de la procédure révèle ainsi deux fautes du service public de la justice, celle du juge initialement saisi qui n'a pas statué sur la requête avant de se dessaisir du dossier et celle de la juridiction auquel le dossier a été transmis, qui n'a statué qu'à la suite de différentes relances du curateur, alors que le dossier ne présentait aucun caractère de complexité et ne justifiait aucune investigation particulière[2].
Claudia CANINI
Avocat – Droit des Majeurs protégés
[1] C. civ. art. 421 et 422
[2] Cour d'appel Paris Pôle 4, chambre 9, 9 Avril 2015
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