Cour de cassation

chambre civile 3

Audience publique du mardi 8 octobre 2013

N° de pourvoi: 09-12.326

Non publié au bulletin Rejet

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 décembre 2008), que M. X... a confié à M. Y..., architecte, la réalisation d'une maison ; qu'au motif que le coût prévisionnel de la construction, après consultation des entreprises, était très supérieur à l'enveloppe financière qu'il avait indiquée, le maître de l'ouvrage a résilié le contrat, choisi un autre architecte pour réaliser la maison et assigné M. Y... en remboursement des honoraires et en réparation de son préjudice ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à rembourser à M. X... le montant des honoraires perçus, alors, selon le moyen :

1°/ que M. Y... faisait valoir dans ses conclusions d'appel, pour s'opposer à la demande de restitution d'honoraires versés par M. X..., que le projet qu'il avait conçu était parfaitement réalisable sur le plan financier, son échec n'étant dû qu'à des appels d'offre infructueux en raison d'une hausse passagère des prix et des marchés de travaux ; que d'ailleurs, M. X... reconnaissait que la construction finalement édifiée l'avait été à un coût au mètre carré proche de celui retenu par M. Y..., et qui dépassait l'enveloppe financière évoquée dans le contrat de maîtrise d'oeuvre ; qu'en décidant cependant, pour ordonner la restitution de la totalité des honoraires perçus par M. Y..., que celui-ci avait conçu un projet irréalisable financièrement et qu'il apparaissait que le projet finalement réalisé par M. X... était moins onéreux que celui de M. Y..., sans s'expliquer sur la faible différence de prix entre les deux projets, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'il résulte des motifs de l'arrêt attaqué que les travaux réalisés sur la base des plans conçus par M. Z... se sont élevés à la somme de 238 000 euros, et que l'enveloppe financière mentionnée dans le contrat de maîtrise d'oeuvre était de 213 033,48 euros ; qu'en retenant que M. Z... avait élaboré un projet tenant dans une enveloppe financière conforme à celle initialement fixée par le maître d'ouvrage, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1147 et 1184 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le projet élaboré par l'architecte n'avait reçu aucune offre d'entreprise pour la charpente et s'élevait à la somme de 378 752,41 euros ou, après recherches d'économies, à la somme de 319 720,10 euros excédant l'enveloppe financière de 216 033,48 euros qu'il s'était engagé à respecter, la cour d'appel, sans avoir à procéder à une comparaison des coûts que ces constatations rendaient inopérante, a pu retenir que le projet de M. Y... était irréalisable et que l'architecte, dont la faute rendait ses études inutiles, n'avait pas droit à rémunération ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. X... la somme de 6 700 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que M. Y... a soutenu que M. X... avait pris seul la décision de quitter l'est de la France en avril 2003, avant même de signer le contrat avec lui, et que comme ce contrat ne contenait aucun délai pour la réalisation de la construction, il ne pouvait être tenu responsable des loyers qu'avait dû acquitter M. X... jusqu'à la réalisation effective de sa maison ; qu'en condamnant cependant M. Y... à payer à ce titre une somme de 6 700 euros, tout en reconnaissant que l'architecte ne s'était jamais engagé à réaliser la construction dans un certain délai, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'architecte, tenu à une obligation de renseignement et à un devoir de conseil, devait concevoir un ouvrage respectant l'enveloppe financière qui lui avait été indiquée et retenu que les manquements de M. Y... dans l'estimation du coût des travaux avaient rendu son projet irréalisable et entraîné un retard très important dans le démarrage des travaux, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que ce dépassement de délai avait causé au maître de l'ouvrage un préjudice direct et certain dont elle a souverainement évalué le montant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de M. Y... ;