En matière de saisie immobilière, les délais sont pléthore et il n’est pas toujours facile de s’y retrouver.

Encore plus délicate est la question de la computation des délais.

L’arrêt du 7 septembre 2017 qui vient d’être rendu par la 2ème chambre civile de la Cour de Cassation nous éclaire sur cette question s’agissant du délai de péremption du commandement valant saisie immobilière.

En application de l’alinéa premier de l’article R. 321-20 du code des procédures civiles d’exécution, la loi dispose que « le commandement de payer valant saisie cesse de plein droit de produire effet si, dans les deux ans de sa publication, il n'a pas été mentionné en marge de cette publication un jugement constatant la vente du bien saisi. ».

A défaut, toute partie intéressée peut demander au Juge de l’Exécution de constater la péremption du commandement (article R. 321-21 du code des procédures civiles d’exécution).

L’article R. 321-22 du même code précise que « ce délai est suspendu ou prorogé, selon le cas, par la mention en marge de la copie du commandement publié d'une décision de justice ordonnant la suspension des procédures d'exécution, le report de la vente, la prorogation des effets du commandement ou la décision ordonnant la réitération des enchères. ».

L’arrêt commenté vient préciser clairement les cas de suspension ou de prorogation des effets du commandement ainsi que la computation du délai biennal.

En l’espèce, un jugement ordonnant la réitération des enchères avait été rendu, fixant la date de la nouvelle adjudication au 7 novembre 2013.

Puis, l’affaire avait été renvoyée à plusieurs reprises donnant notamment lieu à un jugement du 5 décembre 2013 publié en marge du commandement le 7 février 2014 constatant que le syndicat de copropriété était subrogé dans les poursuites et fixant une nouvelle date d’adjudication au 3 avril 2014.

Confirmant la décision du Premier Juge, la Cour d’Appel avait estimé que les effets du commandement avaient été prorogés pour une durée de deux ans par jugement du Juge de l’Exécution publié le 4 juillet 2013 mais également par la publication du jugement du 5 décembre 2013, estimant que le jugement de subrogation avait eu pour effet de proroger les effets du commandement jusqu’à ce que la vente soit publiée…

La Cour de Cassation censure l’arrêt en précisant clairement les cas de suspension et de prorogation des effets du commandement.

Selon la Cour, le délai de validité du commandement « est suspendu par la mention en marge de sa copie publiée d’une décision de justice emportant la suspension des procédures d’exécution, tant que cette décision produit ses effets, ainsi que d’une décision ordonnant le report, en vertu d’une disposition particulière, de l’adjudication ou la réitération des enchères, dans l’attente de l’adjudication à intervenir. ».

La Cour indique clairement « qu’en dehors de ces cas, le délai est prorogé par la publication d’un jugement ordonnant la prorogation des effets du commandement. ».

Ainsi, la Cour de Cassation estime que le jugement ordonnant la réitération des enchères a uniquement suspendu le délai de péremption à compter de sa publication et jusqu’à la date prévue pour l’adjudication le 7 novembre 2013 mais n’a pas, comme l’avait estimé les Juges du fond, prorogé les effets du commandement jusqu’à ce que la vente soit publiée.

En effet, les reports qui avaient été ordonnés l’avaient été pour des motifs étrangers aux causes de report de l’adjudication visées par les articles R. 322-19 (report pour cause d’appel) et R. 322-28 du code des procédures civiles d’exécution (force majeure ou saisine de la commission de surendettement).

Cet arrêt est donc riche d’enseignements et très utile pour les praticiens afin de ne pas s’emmêler les pinceaux entre les cas de suspension et de prorogation des effets du commandement.

D’un point de vue pratique, il convient de rester particulièrement vigilant, lorsque le délai de péremption du commandement est suspendu, et calculer le délai qui s’est écoulé depuis la publication du commandement jusqu’à la mention en marge de celui-ci de la décision de suspension.

Ce délai qui s’est écoulé s’ajoutera au délai qui commencera à recourir lorsque la suspension aura pris fin.

Si l’addition de ces deux délais approche les deux ans, il sera préférable pour l’avocat du créancier poursuivant de solliciter la prorogation des effets du commandement.