PARIS-NORMANDIE

 

une avocate normande cosigne une tribune sur la présomption d’innocence

Trois questions.

En pleine tempête Polanski, une avocate du barreau de Rouen cosigne une tribune appelant au respect de la présomption d’innocence. Un choix qu’elle défend malgré le climat délétère.

  Anthony QUINDROIT

Publié le 10/03/2020 à 20:13

Mis à jour le 10/03/2020 à 20:13

Temps de lecture : 1 minute

 

 

Plus d’une centaine d’avocates ont signé une tribune dans Le Monde appelant, après la polémique Roman Polanski aux César, au nécessaire respect de la présomption d’innocence. Parmi elles, Me Sophie Challan-Belval, inscrite au barreau de Rouen. Elle s’explique.

Pourquoi avoir pris cet engagement ?

Sophie Challan-Belval : « D’abord, ce n’est pas une tribune de défense de Polanski ; je ne suis ni son avocate, ni son amie, ni de son fan-club. Je me fiche totalement de cette affaire. J’ai signé pour rappeler les principes fondamentaux en droit que sont la présomption d’innocence et la prescription. C’est primordial, car cette affaire en suit une autre et en précède une nouvelle, en l’occurrence, cette fois, autour de Woody Allen. Et c’est systématiquement le même débat, les mêmes argumentaires qui entraînent vers une présomption de culpabilité. Non, la présomption d’innocence est un principe pour éviter l’arbitraire. »

Mais pour beaucoup de militantes, qui ont d’ailleurs répondu à votre tribune, la parole des femmes est trop souvent confisquée, discréditée...

« Oui, il faut aussi lutter contre une présomption de mensonge qui pourrait être opposée aux femmes plaignantes. La parole des femmes doit en réalité être accueillie de la même façon que celle du mis en cause. Sur ce point, il y a un manque de moyens et de formation. Mais on ne peut pas condamner quelqu’un sans instruction, sans procès, sans débat contradictoire et sans décision de justice. Alors que, aujourd’hui, une accusation publique semble devenir une certitude de culpabilité. »

« Le tribunal médiatique m’effraie »

Que répondez-vous à celles qui vous taxent d’anti-féminisme ?

« Je soutiens #MeeToo, je suis référente harcèlement et discrimination au barreau. Je suis active dans cette lutte et ne suis pas l’ennemie des militantes. Mais cette tribune vise à rappeler de la nuance. Aucune femme et aucun homme ne peut être un symbole. On ne peut pas utiliser des affaires qui ne sont pas judiciairement jugées. Le tribunal médiatique m’effraie. Les réseaux sociaux ne peuvent pas décider qui est coupable et qui est innocent. »

Anthony Quindroit

Journaliste, service reportage Rouen

a.quindroit@paris-normandie.fr