NON : dans un jugement en date du 25 octobre 2023, le Tribunal administratif de la Guadeloupe a jugé qu’aucune loi ni règlement ne prévoit une obligation pour l'agent public d'informer son administration d'un changement d'affection au cours d'un premier congé longue durée.


Aux termes des articles L.822-12 et L.882-15 du code général de la fonction publique, applicables en l'espèce et codifiant à droit constant les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : « Le fonctionnaire en activité a droit à un congé de longue durée lorsqu'il est atteint de : ()2° Maladie mentale ; 3° Affection cancéreuse () » et « Le fonctionnaire bénéficiaire d'un congé de longue durée a droit : 1° Pendant trois ans à l'intégralité de son traitement ; 2° Pendant les deux années suivantes à la moitié de celui-ci. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence ».

Aux termes de l'article 19 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée : « Le fonctionnaire atteint de tuberculose, de maladie mentale, d'affection cancéreuse, de poliomyélite ou de déficit immunitaire grave et acquis qui est dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions et qui a épuisé à quelque titre que ce soit ses droits à plein traitement d'un congé de longue maladie est placé en congé de longue durée. Toutefois, l'intéressé peut demander à être placé ou maintenu en congé de longue maladie () ».

Aux termes de l'article 20 du même décret : « Lorsqu'un fonctionnaire a bénéficié d'un congé de longue durée au titre de l'une des affections énumérées à l'article 19 ci-dessus, tout congé accordé par la suite pour la même affection est un congé de longue durée dont la durée s'ajoute à celle du congé déjà attribué. Si le fonctionnaire contracte une autre affection ouvrant droit à un congé de longue durée, il a droit à l'intégralité d'un nouveau congé de longue durée ».

Il ressort des pièces du dossier que Mme C a bénéficié d'un congé longue durée dont la pathologie était inconnue pour l'administration, en raison des exigences propres au secret médical, qui appartient au groupe des affections cancéreuses.

Aucune loi ni règlement ne prévoit une obligation pour l'agent public d'informer son administration d'un changement d'affection au cours d'un premier congé longue durée.

Dans le cadre de l'instance, Mme C a levé le secret médical et a fourni les comptes rendus d'expertises sollicités dans le cadre de la saisine du comité médical départemental sur ses demandes successives d'attribution et de renouvellement du congé longue durée, ainsi que les certificats transmis sous pli confidentiel au comité médical départemental dans le cadre de ses demandes successives.

Ainsi, si l'attestation du Docteur D relative au congé longue durée de sa première affectation ne permet pas de déterminer la pathologie de la requérante ainsi que la catégorie à laquelle elle appartient, il ressort du certificat médical du Docteur A, en date du 5 octobre 2018, transmis sous pli confidentiel au comité médical départemental, que la requérante s'est vue diagnostiquée en juillet 2018 un cancer du côlon.

En outre, il ressort du compte rendu du Docteur B, établi en 2021, que la requérante est atteinte depuis 2018, année pendant laquelle elle a demandé et bénéficié de son premier congé longue maladie, d'une affection cancéreuse. Sur la seconde affection, il ressort du certificat médical établi par ce même praticien, en date du 7 janvier 2020, que la requérante était stabilisée au niveau oncologique mais qu'elle présentait un syndrome dépressif réactionnel à ses problèmes de santé. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier notamment de l'avis du comité médical départemental en date du 30 janvier 2020, rendu dans le cadre de la procédure propre à la décision du 14 février 2020, que le comité a signalé un « changement de pathologie » ainsi que le code du type de l'affectation, en l'espèce 202, dont il est constant qu'il correspond aux maladies mentales.

Ainsi, nonobstant l'absence de mention relative à la catégorie d'affectation au titre de laquelle le premier congé longue durée a été attribué, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et au regard des exigences propres au respect du secret médical entre un agent et son administration, de considérer que Madame C établit avoir été atteinte successivement d'une pathologie cancéreuse et d'une maladie mentale, pathologies appartenant à des catégories d'affection différentes.

Dès lors, et bien que Mme C n'ait jamais informé le centre hospitalier de son changement d'affection et des erreurs matérielles qui figurent sur l'avis du 30 janvier 2020 du comité médical en tant qu'il précise un changement de pathologie et non un changement d'affection et qu'il raye la mention « attribution », Mme C devait bénéficier d'un nouveau congé longue durée dès la décision du 14 février 2020.

Par suite, l'administration a commis une erreur d'appréciation en mettant en œuvre un passage à demi-traitement par décision du 7 mars 2022.

Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête et d'ordonner une expertise avant dire-droit, que la décision en date du 7 mars 2022 par laquelle la directrice du centre hospitalier de Basse-Terre a fixé la rémunération de Mme C à demi-traitement durant son congé de longue durée doit être annulée.

SOURCE : Tribunal administratif de la Guadeloupe - 1ère Chambre, 26 octobre 2023, n° 2200853