Vous avez fait appel à un entrepreneur pour réaliser des travaux de rénovation dans votre appartement et les ouvriers ont déserté votre chantier. La date de livraison prévue dans le contrat ou le devis est dépassée et il ne vous donne plus de nouvelles.

 

Plusieurs hypothèses sont envisageables : il travaille sur un autre chantier ou il a déposé son bilan et fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire.

 

Quoi qu’il en soit, vous êtes victime d’un abandon de chantier.

 

Cette situation est de plus en plus fréquente et les maîtres d’ouvrage se trouvent démunis face à une entreprise qui a souvent été payée à l’avance.

 

Voici quelques réflexes à avoir et quelques conseils à suivre en cas d’abandon de chantier.

 

  • La mise en demeure de reprendre les travaux

 

C’est la première démarche à effectuer. Vous devez mettre votre entrepreneur en demeure, par lettre recommandée avec accusé de réception, de reprendre les travaux en lui fixant un délai déterminé (huit jours à compter de la réception de la mise en demeure).

 

Dans ce courrier, il convient de rappeler la date précise de livraison, telle qu’elle avait été définie et d’envisager l’application d’éventuelles pénalités de retard.

 

Vous devez également lui indiquer que vous cessez tout paiement jusqu’à la reprise des travaux et que vous ferez constater l’abandon de chantier par un huissier de justice.

 

Souvent, l’inertie de l’entreprise est due à ses difficultés financières et à sa mise en redressement judiciaire ; il faut alors adresser votre mise en demeure à l’administrateur judiciaire qui représente la société et dont vous pourrez obtenir les coordonnées auprès du greffe du Tribunal de Commerce du siège de l’entreprise. Ce dernier a un mois pour vous répondre, son silence dans ce délai étant considéré comme un refus de poursuivre le chantier.

 

  • Le procès-verbal de constat de l’arrêt de chanter par un huissier

 

Votre entrepreneur n’a pas déféré à votre mise en demeure dans le délai imparti, il ne vous a pas répondu ou ne vous a pas fourni d’explication valable ; il convient alors de faire constater l’arrêt de chantier par un huissier de justice.

 

L’huissier établit un procès-verbal de constat détaillant les travaux déjà exécutés et ceux qui ne sont pas terminés, il signale l’absence d’ouvriers et recense le matériel abandonné sur place.

 

Ce constat vous sera également utile si vous décidez ensuite de confier l’achèvement du chantier à une autre entreprise. Il est donc important que vous remettiez à l’huissier le devis d’origine et que vous lui indiquiez le montant des acomptes que vous avez déjà versés à l’entreprise défaillante.

 

  • L’établissement d’un nouveau devis par une autre entreprise pour l’achèvement du chantier

 

Faites venir une autre entreprise en lui demandant d’établir un devis complet pour finir le chantier. Ce devis est indispensable pour chiffrer votre réclamation devant le Juge.

 

  • La procédure à engager

 

Vous avez ensuite la possibilité de choisir entre plusieurs procédures devant les tribunaux :

 

  • Une procédure de référé pour demander au juge d’ordonner à l’entreprise défaillante la finition des travaux sous astreinte (il faut que le montant de l’astreinte soit dissuasif, par exemple 150 € par jour de retard). Mais cette solution ne présente aucun intérêt si l’entreprise est en redressement ou pire en liquidation judiciaire.

     

  • Une procédure de référé afin de faire constater l’abandon de chantier et d’obtenir l’autorisation du juge de poursuivre les travaux avec une autre entreprise de votre choix et ce aux frais de l’entrepreneur ayant abandonné votre chantier

     

    Il faut alors demander au juge de condamner l’entreprise défaillante à vous verser une provision correspondant au montant du nouveau devis que vous avez fait établir pour l’achèvement du chantier.

     

    Le fondement juridique de cette action est l’article 1144 du Code civil selon lequel « Le créancier peut aussi, en cas d'inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l'obligation aux dépens du débiteur. Celui-ci peut être condamné à faire l'avance des sommes nécessaires à cette exécution. »

     

    Cette procédure si elle est bien menée est rapide et très efficace, mais vous ne pouvez pas prétendre à des dommages et intérêts pour le préjudice subi, ceux-ci ne pouvant être octroyés que par le juge du fond.

     

  • Une procédure au fond pour demander la résiliation du contrat et obtenir des dommages et intérêts, en application de l’article 1142 du code civil.


    Cette action au fond est plus longue et coûteuse, mais elle vous permet de solliciter la réparation intégrale de votre préjudice (notamment le trouble de jouissance en raison du retard pris par le chantier) et cela même quand l’entreprise est en redressement judiciaire, si l’administrateur n’a pas répondu dans le mois de votre mise en demeure.

 

Pour toutes ces procédures, le Tribunal compétent est celui du siège social de l’entreprise défaillante ou bien celui du lieu d’exécution du contrat, c’est-à-dire votre chantier.

 

La réussite de ces procédures judiciaires dépend de la bonne préparation en amont du dossier.

 

Face au silence et à l’inertie d’une entreprise et quelle que soit la nature des travaux, il faut donc que le maître d’ouvrage – celui qui a commandé les travaux - puisse confier à son Avocat un dossier très complet, comprenant une mise en demeure, un constat d’huissier et un devis d‘achèvement du chantier…