Le 22 juin 2023 (RG n° 21/01121), la Cour d'appel de PARIS a été saisie d'un litige intéressant sur la double responsabilité du propriétaire d'un chien et du syndicat des copropriétaires d'un immeuble, lieu de la chute d'une personne promenant un chien à titre temporaire.
I. LES FAITS
Une personne, promenant le chien de son ami, s'arrête pour s'asseoir sur un muret dépendant d'une résidence en copropriété.
Le chien saute alors sur la personne, la renverse et la fait chuter en contrebas du muret, trois mètres plus bas.
La personne eest conduite à l'hôpital, où on lui diasgnostique un traumatisme crânien, de multiples fractures des vertèbres, et une paraplégie des membres inférieurs.
Le propriétaire du chie, déclare son sinistre auprès de son assureurr, la SA PACIFICA, qui refuse sa prise en charge, au motif que la matérialité des faits n'était pas établie !
La victime assigne alors la compagnie d'assurance PACIIFICA, le syndicat des copropriétaires de la résidence immobilière propriétaire du muret, l'assureur du Syndicat (la société GAN Eurocourtage et la Mutuelle Sociale Agricole (MSA), organisme dont elle dépend), en responsabilité et indemnisation devant le tribunal de grande instance de Paris.
La SAM Allianz IARD, venant aux droits de la compagnie GAN Eurocourtage par l'effet d'un transfert de portefeuilles et droits et obligations s'y rattachant du 14 septembre 2012, est volontairement intervenue à l'instance.
Le tribunal reconnaît la responsabilité du propriétaire du chien, mais refuse de retenir celle du syndicat.
Un appel est alors interjeté.
II. RESPONSABILITÉ DU PROPRIÉTAIRE DU CHIEN
Il est incontestable au regard des témoignages de tiers lors de l'accident, que le chien a été à l'origine de ce dernier : la personne, assise sur le muret, a chuté en arrière après le chien lui ait sauté dessus.
Aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de la victime qui promenait pour la première fois le chien et ignorait les habitudes de ce dernier, tendant à monter là où son maître s'assied...
La victime n'avait donc aucun pouvoir d'usage sur le chien, mais seulement un pouvoir de contrôle et de direction extrêmement limité, insuffisant pour considérer qu'elle en avait la garde.
La victime ignorait les habitudes du chien, le propriétaire de ce dernier ne l'en ayant jamais avertie.
Cela signifie qu'il n'y a pas eu de transfert de garde du chien et son propriétaire en est resté l'unique gardien, mais aussi que la victime n'a pas eu un comportement fautif d'exonérer en tout ou partie le propriétaire de sa responsabilité.
Les juges d'appel retiennent alors la responsabilité pleine et entière du propriétaire du chien, et condamne la SA PACIFICA, assureur de ce dernier, à indemniser la victime de ses préjudices.
III. RESPONSABILITÉ DU SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU FAIT DU MURET
Le syndicat des copropriétaires, représentant les copropriétaires de l'immeuble lieu de la chute, est le gardien du muret, partie commune, qui longe le bâtiment et sur lequel la victime s'est arrêtée avant de chuter.
Pour constater la responsabilité du syndicat en qualité de gardien du muret, les juges retiennent le rôle causal dudit muret, du fait de sa position anormale.
Ainsi, Un huissier de justice a constaté que le muret en cause est large de 17 centimètres et, à partir du sol longeant le bâtiment, est d'une hauteur de 68 à 84 centimètres, et de 72,5 centimètres à l'endroit où se situait la victime avant sa chute.
Le muret apparaît longer et protéger un passage pour piétons situé en contrebas de celui-ci, menant à l'entrée des caves de l'immeuble.
Dans ce contexte, le muret litigieux constitue un ouvrage de protection des personnes contre les risques de chute fortuite dans le vide, correspondant à la définition générale des garde-corps de l'article 1.5.1 de la norme NF P 01-012 relative à ceux-ci (éditiion juillet 1988, en vigueur lors des faits).
Dans son avant-propos, la norme précise que « pour les bâtiments d'habitation, elle complète l'article R111-15 du Code de la Construction et de l'Habitation (CCH) » et que « les règles prescrites (') sont des spécifications minimales propres à assurer la protection contre les chutes fortuites ou involontaires ».
La norme vise les cas où « la hauteur de chute (') dépasse un mètre » (article 1.4 relatif aux dispositions générales) et se trouve en l'espèce parfaitement applicable, alors qu'il a pu être constaté que le passage en contrebas du muret litigieux se situe à plus de trois mètres de profondeur (« environ 320 centimètres » à l'emplacement où se trouvait la victime avant sa chute, selon le constat d'huissier).
Or cette norme prévoit, pour les « garde-corps minces » (inférieurs à 20 centimètres de large, ainsi que cela est le cas en l'espèce), que leur hauteur minimale doit être de un mètre (cette hauteur minimale diminuant lorsque le garde-corps est plus épais), hauteur non respectée en l'espèce. Ainsi, le rôle causal du muret est établi car, par sa hauteur insuffisante, il a permis la chute de la victime, plus de trois mètres en contrebas. Aussi, les juges d'appel considèrent que le rôle causal d'une chose inerte réside dans le caractère anormal de celle-ci, l'anormalité résidant (au regard de la norme de construction applicable et citée ci-dessus) dans la situation dangereuse du muret.
De fait, les juges d'appel retiennent la responsabilité du syndicat des copropriétaires en qualité de gardien du muret et pour ne pas avoir envisagé la mise en conformité de ce dernier avec les normes de sécurité.
La victime pourra alors indemnisée par l'assureur du syndicat.
D'ailleurs, depuis les faits, la situation a été corrigée, le muret a été réhaussé et un grillage de sécurité a été posé.
Finalement, les juges d'appel n'ont fait qu'appliquer l'article 1242 du Code civil (ancien article 1384) aux termes duquel on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des choses que l'on a sous sa garde.
Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS
Tél. : 0689490792
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