Cet article est une présentation rapide et sommaire de l'infraction de recel afin de permettre au public de mieux comprendre en quoi elle consiste.
Le recel, après avoir été réprimé au titre de la complicité, est devenu une infraction autonome depuis de longue date (loi du 22 mars 1915).
La définition actuelle découle du nouveau code pénal de 1992 ;
Le recel est une infraction particulière car, pour exister, il faut une infraction préalable.
L’élément légal de l’infraction, c'est à dire le texte de loi qui prévoit l'existence de cette infraction et les conditions pour qu'elle puisse être poursuivie, est l’article 321-1 du Code Pénal.
sa rédaction fait clairement apparaitre dans sa rédaction la nécessité de l'existence d'une infraction prélable :
Article 321-1 du Code Pénal :
« Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit.
Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit.
Le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende. »
Le mot « chose » est très large et aucune définition juridique du terme employé dans ce contexte n’existe.
Selon la jurisprudence et les auteurs de doctrine, le terme doit être entendu très largement.
Par contre, à une époque la jurisprudence avait admis que la « chose » objet du recel pouvait être une information.
Cette jurisprudence a été abandonnée depuis Cass.crim. 3 avril 1995 93-81.569 (documents en annexe : arrêt et commentaire publié au J.C.P N° 20 du 17 mai 1995 édition G II N° 22429). Voir également la jurisprudence de la CEDH décision du 7 juin 2007 Dupuis et a / France n° 1914/02 (document en annexe).
Attention toutefois le recel de violation du secret professionnel est toujours sanctionné. Voir par exemple un arrêt d ela chambre criminelle de la cour de cassation du 19 octobre 2005 n° 04-85.098 que vous pouvez trouver sur le site de la cour de cassation ou légifrance.
Quelles sont les principales conséquences de la nécessité de l’existence de d'une infraction préalable ?
- L’amnistie de l’infraction préalable fait disparaitre le recel, sauf s’il s’agit d’une amnistie personnelle
- L’immunité familiale de l’auteur de l’infraction préalable ne bénéficie pas au receleur
- La relaxe définitive de l’auteur de l’infraction préalable ne fait pas disparaitre l’incrimination de recel si cette relaxe ne repose pas sur l’inexistence de l’infraction ; exemple les éléments constitutifs de l’infraction préalable ne sont pas réunis
- L’abrogation de la loi pénale incriminant l’infraction préalable fait disparaitre le recel
- Il n’est pas nécessaire que l’auteur de l’infraction préalable soit condamné, poursuivi ou même identifié ; par exemple, il suffit que le téléphone retrouvé en possession du présumé receleur provienne d’un vol, même si l’auteur du vol est inconnu
- Il n’est pas nécessaire que la qualification précise de l’infraction préalable soit établie ; par exemple hésitation entre escroquerie ou simple faux
- La détention d’images pédopornographiques fait l’objet d’une incrimination spécifique et ne peut donc pas être poursuivie au titre du recel article 227-23 du Code Pénal (loi du 4 mars 2002)
- Le recel de faux documents administratifs fait l’objet d’une incrimination spécifique (article 441-3 du Code pénal)
Parfois le recel est qualifié de recel aggravé :
ce recel est prévu et réprimé par l'article 321-2 du Code Pénal :
« Le recel est puni de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 euros d'amende :
1° Lorsqu'il est commis de façon habituelle ou en utilisant les facilités que procure l'exercice d'une activité professionnelle ;
2° Lorsqu'il est commis en bande organisée. »
Une autre particularité existe en matière de santion de l'infraction de recel.
En effet lorsque l'infraction préalable est connue de la personne poursuivie en qualité de receleur potentiel, la peine qui lui sera appliquée sera celle prévue pour l'infraction préalable.
Article 321-4 du Code Pénal :
« Lorsque l'infraction dont provient le bien recelé est punie d'une peine privative de liberté d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des articles 321-1 ou 321-2, le receleur est puni des peines attachées à l'infraction dont il a eu connaissance et, si cette infraction est accompagnée de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances dont il a eu connaissance. »
Autre particularité, par rapport à la récidive cette fois :
Pour mémoire, la récidive est le fait d'avoir déjà été condamné, de façon définitive, pour une infraction identique ou appartemant à la même caégorie d'infractions, dans un temps déterminé (en général 5 ans).
Dans cette hypohèse la loi prévoir, selon l'Article 321-5 du Code Pénal :
« Le recel est assimilé, au regard de la récidive, à l'infraction dont provient le bien recelé. »
Enfin il faut rappeler que le recel est une infraction continue, c'est à dire que pendant toute la durée de la détention, dissimulation, la prescription ne commence pas à courir.
En ce qui concerne la tentative n’est pas prévue et n’est donc pas punissable.
Concrètement, quels sont les agissements qui peuvent être considérés comme constituant l'élément matériel du recel ?
Le recel est la détention d’une chose provenant d’un crime ou d’un délit.
Sont donc exclues les choses qui proviendraient d’une contravention.
On considère classiquement que le recel peut être un recel par dissimulation, par détention ou par transmission.
Recel par détention : la détention personnelle de la chose n’est pas indispensable. La jurisprudence a retenu le recel en cas de paiement par l’auteur de l’infraction de dette du mis en cause (chèques vols servant à payer le loyer d'un ami qui, rappelons le, doit savoir que les chèques sont volés);
La jurisprudence a considérer que le recel peut être constitué par une économie réalisée Cass. Crim. N° 15-81.187 du 1er juin2016 ;
Recel bénéfice : il est proche du précédent. C’est, par exemple, accepter de consommer des boissons en sachant qu’elles proviennent d’un vol. ou de se faire offrir un repas payer par des chèques volés ou détournés. Il arrive que soient considérés comme receleurs des personnes qui, après avoir été informées d'un cambriolage, acepte d epartager un repas avec boissons provenant du vol.
Recel par dissimulation : il s’agit de cacher la chose provenant d’une infraction. Exemple la dissimulation d'un objet volé. Lors des interventions dans les collèges (les avocats ont des missions de sensibilisation des jeunes aux lois et régles appicables, notamment dans le cadre du programme d'EMC pour lesquels des professeurs nous invitent) nous rappelons aux élèves qu'il faut refuser de "garder" pour un ami un objet qu'il ne devrait pas détenir (téléphone de valeur, carte bancaire au nom d'un tiers etc)
Recel intermédiaire ou transmission : il s’agit soit d’un déplacement géographique de la chose (transport routier d’un véhicule volé) ou de la remise de la chose de la main à la main ou encore il suffit de servir d’intermédiaire (pour une négociation). Les exemples sont nombreux et variés : servir d'intermédiaire pour la négociation de bijoux de provenance douteuse, proposer des vêtements de marque dans un bar, etc.
La question fréquemment posée est : Mais si je suis de bonne foi ?
Effectivement la personne mise en cause pour recel doit avoir connaissance de la provenance frauduleuse de la chose.
Cette connaissance doit être clairement établie, et rappelons que le doute doit bénéficier à l’accusé.
Dans un cas d’espèce un prévenu avait convaincu le tribunal de son ignorance de l’origine frauduleuse de l’augmentation des revenus de son couple en apportant au tribunal des enveloppes de relevés de comptes bancaires, non ouvertes et comportant la date d’expédition Cass. Crim. 05 avril 2006 n° 05-83.789.
Mais la cour de cassation considère que cette appréciation relève du pouvoir des juges du fond. Concrètement cela se passera au cas par cas, en fonction des circonstances dans lesquelles le recel supposé a eu ieu, mais également des éléments de preuve que la personne mise en cause pourra avancer afin de justifier de sa bonne foi, c'est à dire de son ignorance de la provenance frauduleuse d ela chose.
A signaler un point important, le recel n’est pas punissable dans un cas particulier, celui du mis en cause qui produit des documents nécessaires à faire valoir ses droits en justice.
Attention toutefois la jurisprudence considère que les choses doivent être strictement nécessaires à l’exercice des droits de la défense. Par exemple pour un salarié devant le Conseil de Prud'hommes.
La connaissance de l’origine frauduleuse est suffisante et il n’est pas nécessaire que le mis en cause connaisse la nature de l’infraction d’origine.
Par contre, si le mis en cause connait la nature de l’infraction d’origine, les dispositions de l’article 321-4 du Code Pénal recevront application (cf. supra).
La preuve de la connaissance de la provenance frauduleuse peut résulter du comportement du mis en cause et divers agissements peuvent être révélateurs de sa mauvaise foi.
Exemple en cas de vol d’un tableau, ne pas avoir alerter les autorités malgré les annonces parues, avoir acquis des bijoux de grande valeur à un vendeur à la sauvette et à prix moindre, etc..
Sont donc pris en compte le montant de l’opération le caractère caché de la transaction ou dans un lieu inhabituel notamment.
Il est nécessaire de rechercher à quel moment le mis en cause a eu connaissance du caractère frauduleux de la chose. Il est admis par la jurisprudence que le recel peur commencer lorsque le mis en cause conserve la chose après avoir appris sa provenance, même si la détention avait débuté longtemps auparavant.
Depuis 1977 la jurisprudence fait une distinction pour l’acquéreur de bonne foi. Dans ce cas, malgré la connaissance de la provenance du bien il n’y a pas de recel : exemple l’acquéreur de bonne foi d’un véhicule automobile d’occasion .
Ces quelques lignes sont un résumé des grandes régles qui s'appliquent à l'infraction de recel.
Pour des précisions sur un cas particulier, n'hésitez pas à consulter un avocat.
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