Nous ne revenons pas sur les solutions jurisprudentielles chaotiques et éventuellement contradictoires entre les juridictions administratives et judiciaires et, même entre les propres chambres de la Cour de Cassation en charge du dommage corporel.
Tout cela a été suffisamment bien décrit et tracé.
Un espoir était né d’un arrêt de la Cour de Cassation rendu en 2019[1], l’AEEH étant alors considérée comme de nature non indemnitaire et donc non déductible ce qui améliorait mécaniquement à la hausse l’indemnisation des victimes.
Néanmoins, en matière administrative, un arrêt du Conseil d’Etat du 26 juillet 2018[2] semblait adopter une position contraire et retenir le caractère déductible de l’AEEH.
Si cela est exact sur le principe, il fallait néanmoins observer que le Conseil d’Etat posait des conditions, d’ordre comptable et mathématique, à cette déductibilité qui était donc tout sauf automatique.
C’est là où la lecture des arrêts de renvoi après cassation se révèle tout aussi contributive.
C’est l’arrêt rendu par la CAA de LYON ce 12 décembre 2019 sur renvoi du Conseil d’Etat.
La Cour commence par reprendre les principes posés par le Conseil d’Etat :
« 2. En vertu des principes qui régissent l'indemnisation par une personne publique des victimes d'un dommage dont elle doit répondre, il y a lieu de déduire de l'indemnisation allouée à la victime d'un dommage corporel au titre des frais d'assistance par une tierce personne le montant des prestations dont elle bénéficie par ailleurs et qui ont pour objet la prise en charge de tels frais. Il en est ainsi alors même que les dispositions en vigueur n'ouvrent pas à l'organisme qui sert ces prestations un recours subrogatoire contre l'auteur du dommage. La déduction n'a toutefois pas lieu d'être lorsqu'une disposition particulière permet à l'organisme qui a versé la prestation d'en réclamer le remboursement au bénéficiaire s'il revient à meilleure fortune.
3. Les règles rappelées au point précédent ne trouvent à s'appliquer que dans la mesure requise pour éviter une double indemnisation de la victime. Par suite, lorsque la personne publique responsable n'est tenue de réparer qu'une fraction du dommage corporel, notamment parce que la faute qui lui est imputable n'a entraîné qu'une perte de chance d'éviter ce dommage, la déduction ne se justifie, le cas échéant, que dans la mesure nécessaire pour éviter que le montant cumulé de l'indemnisation et des prestations excède le montant total des frais d'assistance par une tierce personne.
… cette déduction n'a lieu d'être que lorsque le montant cumulé de l'indemnisation incombant normalement au responsable et de l'allocation et de son complément excéderait le montant total des frais d'assistance par une tierce personne. L'indemnisation doit alors être diminuée du montant de cet excédent.»
Elle se livre alors au calcul commandé à savoir :
- Montant maximal de l’indemnisation pour l’aide humaine ;
- Montant de l’indemnisation dû par le responsable une fois appliqué le taux de perte de chance ;
- Calcul du monta perçu au titre de l’AEEH ;
- Vérification que la victime n’a pas perçu d’autres aides ;
- Calcul final : Comparaison entre le montant maximal de l’aide humaine (1) et le cumul de (2) et (3) et si 2 + 3 inférieur à 1 alors l’AEEH n’a pas à être déduite.
C’est très exactement ce à quoi va aboutir la cour d’appel :
« Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de déduire ladite allocation perçue de l'indemnisation incombant à l'établissement public de santé. »[3]
Les victimes peuvent donc être rassurées même s’il n’y pas de réponse définitive et que chaque situation appellera une déduction ou non, ce qui au regard de l’’individualisation de l’indemnisation n’est pas si mal.
Il faut aussi observer que le Conseil d’Etat écarte aussi semble-t-il la déductibilité lorsque le payeur bénéfice d’un recours subrogatoire comme c’est le cas par exemple lorsque l’ONIAM intervient en substitution d’un établissement dont la responsabilité est engagée pour erreur médicale.
Maître Vincent RAFFIN, Avocat associé au sein du cabinet BRG Avocats (Nantes-Paris), et responsable du département droit médical et dommages corporels, vous conseille, vous assiste et vous accompagne sur toute la France concernant vos litiges.
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[1] 17-25.855 2ème civ. C. Cass., 7 03 2019
[2] CE 26 07 2018 N°408806
[3] CAA LYON 12 12 2019 https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000039648316?tab_selection=cetat&searchField=ALL&query=15LY00519&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&pageSize=10&page=1&tab_selection=cetat#cetat
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