Hémorragie intra-oculaire: manquement du médecin à son devoir d'information

Le médecin est tenu de donner à son patient sur son état de santé une information portant sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.

Délivrée au cours d'un entretien individuel, cette information doit être loyale, claire et appropriée, la charge de la preuve de son exécution pesant sur le praticien, même si elle peut être faite par tous moyens (CSP, art. L. 1111-2 et R. 4127-35).

Il est cependant prévu qu'une situation d'urgence constitue une exception à la délivrance de l'information que le patient est en droit d'attendre.

Commet un manquement à son obligation d'information, le chirurgien ophtalmologiste qui ne délivre pas l'information sur les risques encourus d'une opération intervenant 48h après la chirurgie de la cataracte subie par la patiente, alors que l'état de santé de cette dernière lui permettait de recevoir une information sur l'intervention à laquelle il allait procéder en raison de la rupture capsulaire et de la luxation dans le vitré d'un morceau de cristallin.

Si l'intervention devait être réalisée dans un court délai, en revanche, ces 48h ne peuvent caractériser une urgence qui aurait autorisé le médecin à passer outre une obligation d'information spécifique.

Le fait que la société française d'ophtalmologie n'ait pas édité de fiche d'information dédiée à cet incident médical ne dispensait par le chirurgien de la fournir sous une autre forme.

Toutefois, le dommage découlant d'une violation du devoir d'information n'est pas l'atteinte à l'intégrité physique elle-même consécutive à l'intervention subie mais la perte d'une chance d'échapper à cette intervention et aux conséquences du risque qui s'est finalement réalisé. Son existence doit s'apprécier en prenant en considération l'état de santé du patient, son évolution prévisible, sa personnalité, les raisons pour lesquelles les investigations ou les soins à risques lui sont proposés ainsi que les caractéristiques de ces investigations, de ces soins et de ces risques, les effets qu'aurait pu avoir une telle information quant à son consentement ou à son refus. Or en l'espèce, l'intervention s'imposait, ce qui signifie que même mieux informée, la victime ne pouvait pas renoncer à cette opération dont l'objet était de protéger une fonction visuelle et sans laquelle elle aurait été perdue.

Reste toutefois, la possible indemnisation du préjudice dit "d'impréparation".

(Cour d'Appel d'Aix en Provence, 6 février 2020 n°19/03350)