Définition du délit de cyber-harcèlement


Selon l’article 222-33-2-2 du code pénal, « Le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n'ont entraîné aucune incapacité de travail.

L'infraction est également constituée :

a) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;

b) Lorsque ces propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ».

Lorsque le harcèlement est commis en ligne, les peines sont doublées : on passe de un an à deux ans d’emprisonnement et de 15 000€ à 30 000€ d’amende.

 

Les éléments constitutifs du délit de cyber-harcèlement


  A. Des propos ou comportements répétés

L’auteur doit tenir des propos ou adopter des comportements qualifiés de « répétés ». Un seul propos ou acte ne suffit pas. Il s’agit donc, selon la doctrine, d’une infraction d’habitude.

Sur Internet, les propos sont, le plus souvent, constitués par des commentaires d’internautes, des messages sur des blogs ou forums, des vidéos, etc. Les comportements peuvent, par exemple, consister en des montages d’images ou de vidéos.

Les propos ou comportements répétés peuvent s’inscrire dans un cadre quelconque : professionnel, familial, amical, scolaire, etc., ou même être le fait d’un inconnu.

La jurisprudence a précisé que des propos ou comportements répétés adressés à des tiers caractérisaient le délit de harcèlement moral dès lors que le prévenu ne pouvait ignorer que ces propos ou comportements parviendraient à la connaissance de la personne qu’ils visaient (Crim., 9 mai 2018, n° 17-83.623).

  B. La conséquence recherchée ou obtenue : la dégradation des conditions de vie se traduisant par une altération de la santé physique ou mentale de la victime

Les propos ou comportements répétés doivent avoir abouti, ou doivent avoir eu pour objet d’aboutir, à un résultat précis : la dégradation des conditions de vie de la victime.

On vise donc des actes qui ont pour but ou pour effet d’humilier l’autre, de le fragiliser psychologiquement, à tel point que ses conditions de vie s’en trouvent impactées.

Plus précisément, la dégradation des conditions de vie doit se traduire par une altération de la santé physique ou mentale de la victime : maux de ventre, anxiété, stress, dépression, tentatives de suicide, etc.).

Les faits peuvent n’avoir entraîné aucune incapacité totale de travail, l’infraction de harcèlement sera malgré tout caractérisée.

La Cour de cassation exige que les juges du fond caractérisent en quoi les actes reprochés au prévenu ont eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la victime se traduisant par une atteinte à sa santé physique ou mentale, à peine de cassation (Crim., 9 mai 2018, n° 17-83.623).

  C. Un harcèlement commis en ligne

Le harcèlement doit être commis sur Internet, d’où le nom de cyber-harcèlement.

Il importe peu que le harcèlement apparaisse sur un site public, tel qu’un forum, ou sur un site privé.

  D. L’élément moral de l’infraction

Le harcèlement moral constitue une infraction intentionnelle.

L’auteur doit avoir conscience du fait que, par ses actes ou propos, il risque d’altérer la santé physique ou mentale de sa victime et d’entraîner, par conséquent, une dégradation de ses conditions de vie.

 

Les responsables du délit de cyber-harcèlement


Le premier responsable est celui qui commet matériellement l’infraction, c’est-à-dire celui qui tient des propos ou adopte des comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la victime.

Toutefois, la responsabilité des intermédiaires techniques, à savoir les hébergeurs qui stockent les contenus de tiers (forums, blogs, etc.) ou les fournisseurs d’accès Internet, pourra être engagée à condition de prouver :

  • Que l’intermédiaire avait connaissance des contenus publiés ;
  • Qu’il n’a pas agi rapidement pour faire retirer ces contenus dès qu’il en a eu connaissance.

La victime peut, par ailleurs, demander directement aux intermédiaires techniques le retrait des contenus litigieux. Plus largement, toute personne peut signaler un contenu qu’elle juge obscène ou menaçant, et notamment une situation de harcèlement dont un tiers serait victime.

 

La répression du délit de cyber-harcèlement


Le harcèlement moral « classique » est puni d’un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende.

Toutefois, une liste de cinq circonstances aggravantes prévue à l’article 222-33-2-2 vient aggraver la répression.

Ainsi, le fait de commettre un harcèlement en ligne constitue un harcèlement moral aggravé passible d’une peine de deux ans d’emprisonnement et 30 000€ d’amende.

La peine est encore plus lourde lorsque les faits s’accompagnent d’une autre circonstance aggravante de la liste, notamment lorsqu’ils sont commis sur un mineur de quinze ans : la peine est alors de trois ans d’emprisonnement et 45 000€ d’amende.

La tentative de l’infraction n’est pas punissable.

Des peines complémentaires sont prévues par l’article 222-44 du même code.