Le propriétaire d’un château en Bourgogne y a découvert un livre d'heures qu’il a confié à un commissaire-priseur parisien pour expertise puis vente.
 
Après expertise, ce manuscrit enluminé du XVe siècle d'une très grande valeur a été attribué aux frères de Limbourg.
 
En octobre 2013, il a été frauduleusement exporté vers la Belgique, puis vendu par la succursale bruxelloise de la maison de ventes parisienne.
 
Frauduleusement = sans certificat d’exportation.
 
[Et pour cause : il était hautement probable, compte tenu de la nature du manuscrit, que le certificat soit refusé et le bien classé trésor national]
 
En septembre 2016, le nouvel acquéreur, un libraire suisse, a tenté de revendre le manuscrit à la TEFAF de Maastricht.
 
C’est là que l'Office central de lutte contre le trafic de biens culturels est intervenu et que l’affaire a éclaté.
 
Le commissaire-priseur parisien, le directeur juridique de la maison de ventes parisienne et le responsable de la succursale bruxelloise ont été poursuivis du chef d'exportation illégale d'un bien culturel.
 
En effet, dès lors que le livre d'heures présentait un intérêt historique, artistique ou archéologique au sens de l'art. L. 111-2 du code du patrimoine, son exportation était soumise à autorisation administrative.
 
Le commissaire-priseur a été le plus lourdement sanctionné, pour complicité : 8 mois de prison avec sursis + 100.000 € d’amende.
 
Il a formé un pourvoi contre l’arrêt d’appel ayant prononcé cette condamnation, estimant que la complicité supposait d'avoir participé activement à l'organisation du transport du bien, ce qui n’était pas le cas.
 
Le 15 mars 2022, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté son pourvoi.
 
Pour la Cour, il n’est pas nécessaire d’établir que le commissaire-priseur a participé directement ou indirectement à l'opération matérielle de transport transfrontalier du manuscrit.
 
Il suffit de démontrer qu’il a sciemment apporté son concours à l’opération illicite par :

  • la fourniture de la structure permettant la revente à l’étranger (la succursale belge)
  • la participation au stratagème visant à éluder les obligations de demande de certificat d’exportation

Rappel : en cas d’exportation sans certificat, la peine maximale encourue est de 2 ans de prison + 450.000 € d’amende.