Falcon distribue deux disques de Bob Dylan: Blowin in the Wind et Gates of Eden.
Ces CD incorporent des titres issus d'albums qui ont été publiés aux États-Unis d'Amérique avant le 1er janvier 1966.
Sony, requérante au principal, est la filiale allemande de la multinationale japonaise homonyme.
Sony a demandé devant le Landgericht compétent qu'il soit interdit à Falcon de reproduire et/ou de faire reproduire et de distribuer et/ou de faire distribuer les phonogrammes Bob Dylan – Blowin in the Wind et Bob Dylan – Gates of Eden. Elle a demandé, par ailleurs, la condamnation de Falcon à fournir des informations ainsi que la constatation de l'obligation d'indemnisation incombant à cette dernière.
Falcon a fait valoir qu'aucun producteur de phonogrammes ne possède de droits sur le territoire national s'agissant des albums de Bob Dylan enregistrés avant le 1er janvier 1966.
Le Landgericht a rejeté la demande de Sony. La juridiction d'appel, saisie par cette dernière, a admis que les droits du producteur de phonogrammes concernant les objets en cause au principal ont indiscutablement été transférés de manière valable à Sony. Toutefois, cette juridiction a rejeté le recours de Sony en estimant que, en vertu de la convention pour la protection des producteurs de phonogrammes contre la reproduction non autorisée de leur phonogrammes, adoptée à Genève le 29 octobre 1971, en vigueur en Allemagne et aux États-Unis, les producteurs de phonogrammes ne peuvent bénéficier de la protection des droits d'auteur découlant de l'article 85 de l'UrhG que pour les prestations postérieures au 1er janvier 1966.
De surcroît, la juridiction d'appel a estimé que les enregistrements musicaux antérieurs à cette date ne sauraient non plus être protégés en vertu de l'article 137f de l'UrhG qui est une disposition transitoire pour l'adaptation du droit national à la directive 93/98. En effet, le paragraphe 2 de cet article ne s'appliquerait pas aux phonogrammes produits avant le 1er janvier 1966 étant donné qu'ils n'ont été protégés à aucun moment en Allemagne.
C'est dans ces conditions que Sony s'est pourvue en «Revision» contre l'arrêt de la juridiction d'appel devant le Bundesgerichtshof qui, estimant que l'issue du pourvoi qui lui est présenté dépend de l'interprétation de l'article 10, paragraphe 2, de la directive 2006/116, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:
«1) La durée de protection prévue par la directive 2006/116 [...] est-elle, dans les conditions de l'article 10, paragraphe 2, de celle-ci, également applicable lorsque l'objet en cause n'était protégé à aucun moment dans l'État membre dans lequel la protection est réclamée?
2) En cas de réponse affirmative à la première question:
a) Faut-il considérer que les dispositions nationales au sens de l'article 10, paragraphe 2, de la directive 2006/116 [...] comprennent également les dispositions des États membres relatives à la protection de titulaires qui ne sont pas des ressortissants de la Communauté?
b) La durée de protection prévue par la directive 2006/116 [...] est-elle, conformément à l'article 10, paragraphe 2, également applicable aux objets qui, au 1er juillet 1995, répondaient certes aux critères de protection énoncés dans la directive 92/100 [...], mais dont les titulaires ne sont pas des ressortissants de la Communauté?»
Pour motiver sa réponse la Cour commence par évoquer le droit applicable en la matière.
PUis elle énonce: "Il en découle que, pour une œuvre ou un objet protégé, au 1er juillet 1995, dans au moins un État membre selon les dispositions nationales de cet État membre, le fait que le titulaire de cette protection soit ressortissant d'un pays tiers et ne dispose pas, dans l'État membre dans lequel la durée de la protection prévue par la directive 2006/116 est réclamée, d'une protection en vertu du droit national de ce dernier État membre, n'est pas déterminant pour l'application de l'article 10, paragraphe 2, de ladite directive. Ce qui importe c'est, en effet, de savoir si l'œuvre ou l'objet en cause bénéficiait d'une protection au 1er juillet 1995, en vertu des dispositions nationales d'au moins un État membre."
La réponse tombe:
1) La durée de la protection prévue par la directive 2006/116/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative à la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins, est également applicable, en vertu de l'article 10, paragraphe 2, de cette directive, lorsque l'objet en cause n'a été protégé à aucun moment dans l'État membre dans lequel la protection est réclamée.
2) L'article 10, paragraphe 2, de la directive 2006/116 doit être interprété en ce sens que les durées de protection prévues par cette directive s'appliquent dans une situation où l'œuvre ou l'objet en cause était, au 1er juillet 1995, protégé en tant que tel dans au moins un État membre en application des dispositions nationales de cet État membre relatives au droit d'auteur ou aux droits voisins et où le titulaire de tels droits sur cette œuvre ou cet objet, ressortissant d'un pays tiers, bénéficiait, à cette date, de la protection prévue par ces dispositions nationales.
Le droit d'auteur reste vigoureux en dépit de la liberté de circulation des oeuvres.
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