1) Sur la demande tendant à prononcer la nullité du licenciement et les conséquences financières s’y rapportant.

Il résulte de l’alinéa 1er du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 qu’est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie, le licenciement intervenu en raison d’une action en justice introduite ou susceptible d’être introduite par le salarié à l’encontre de son employeur.

La postériorité de la rupture d’un contrat de travail par rapport à l’action en justice d’un salarié et l’absence de preuve par l’employeur de ce que sa décision est motivée par des éléments étrangers à toute volonté de rétorsion permettent d’établir que la rupture a été prononcée en raison de l’action en justice initiée par le salarié.

Le Conseil de Prud’hommes considère en l’espèce que « si la requête initiale n’a été déposée auprès du Conseil de prud’hommes que le 8 novembre 2017, soit postérieurement à l’échange de courriel interne du 3 novembre 2017 mentionnant l’intention de l’employeur de mettre fin à la collaboration avec Madame X, il ressort d’un SMS de Madame L, secrétaire de rédaction, en date du 19 octobre 2017, que l’employeur était informé dès cette date de l’intention de la demanderesse de se faire assister par un avocat pour exercer une action en justice à l’encontre de la société Télérama ».

Il appartient donc à la société Télérama de démontrer que sa décision est motivée par des éléments étrangers à toute volonté de rétorsion consécutive à l’action en justice initiée par la salariée.

A cet égard, la lettre notifiant le licenciement de Madame X, la société Télérama reproche à cette dernière :
. d’une part, de ne pas avoir envoyé à temps un article sur un documentaire et en omettant délibérément de prévenir la société de sa transmission dans le système informatique de l’entreprise, la contraignant à supprimer le sujet de la publication ;
. d’autre part, de ne pas s’être présentée à une table ronde pour laquelle sa participation au nom de la société Télérama avait été actée, sans prendre la peine d’en avertir la société, ni la chaine de télévision organisatrice de l’évènement.

Toutefois, le Conseil de prud’hommes constate que :
. Ses supérieurs hiérarchiques connaissaient ces faits antérieurement et qu’aucun reproche n’a été adressée à l’intéressée avant l’envoi de sa lettre de convocation à un entretien préalable de licenciement le 16 novembre 2017 ;
. La société Télérama ne justifie d’aucune difficulté de bouclage, un autre article ayant été substitué à l’article manquant ;
. Les supérieurs de Madame X lui ont adressé des messages de soutien, dépourvus de tout reproche, au contraire, Monsieur R, rédacteur en chef adjoint, lui écrivait le 13 octobre 2017 par SMS : « à ton retour tu trouveras porte et bureau ouvert pour parler de tout et surtout d’avenir » et Madame H, rédactrice en chef le 15 octobre 2017 : « nous n’avons pas su te faire savoir à quel point nous apprécions ton travail ».

La société Télérama apporte aucune explication crédible à son changement soudain d’attitude envers Madame X, postérieurement à sa connaissance de l’imminence d’une procédure prud’homale, alors que d’une part la société Télérama n’établit aucune volonté de la demanderesse de nuire à son employeur dans le fait d’avoir placé le projet d’article demandé sur le système informatique de l’entreprise sans en avertir expressément Monsieur R, et d’autre part, la société ne justifie d’aucune conséquence pour l’entreprise de l’absence de Madame X lors de la table ronde organisée par Canal + au sujet de la série « Paris etc ».

Les éléments produits par la société Télérama n’apparaissent pas suffisamment sérieux pour démontrer que le licenciement de Madame X était motivé par des éléments étrangers à toute volonté de rétorsion consécutive à son action en justice.


En conséquence, le Conseil de prud’hommes affirme que le licenciement de Madame X par la société Télérama du 20 décembre 2017 est nul.

Il ordonne la réintégration de Madame X au poste de journaliste au sein de la société Télérama moyennant un salaire brut mensuel de 2 686,42 euros.

Par ailleurs, le salarié dont le licenciement est nul car attentatoire à une liberté fondamentale et qui demande sa réintégration a droit au paiement d’une indemnité égale au montant de la rémunération qu’il aurait dû percevoir entre son éviction de l’entreprise et sa réintégration, sans déduction des éventuels revenus de remplacement dont il a pu bénéficier pendant cette période.

Compte tenu d’un salaire mensuel brut de 2 686, 42 euros, le Conseil de Prud’hommes condamne la société Télérama à payer à Madame X la somme brute totale de 94 024, 70 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2017 à septembre 2020 inclus.

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Frédéric CHHUM avocat et membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)

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