Par un arrêt de la Cour d’appel de Poitiers du 4 septembre 2025, la chambre sociale se prononce sur la requalification de missions d’intérim en contrat à durée indéterminée, la règle applicable à l’indemnité de fin de mission et la recevabilité d’une intervention syndicale. La solution articule contrôle du motif de recours, recentrage de l’indemnité de précarité à la lumière d’une évolution jurisprudentielle et rappel des exigences de représentation en justice.

Un salarié a effectué une mission d’intérim du 19 juillet au 22 décembre 2017 au sein d’une entreprise utilisatrice, au motif d’un « accroissement temporaire d’activité », avec une suspension pendant la fermeture estivale. L’avenant visait des « commandes supplémentaires […] à finaliser avant les congés d’été », bien que la mission se soit poursuivie au-delà de ceux-ci. Un contrat à durée indéterminée a été conclu le 2 janvier 2018, sur les mêmes fonctions.

Saisi, le conseil de prud’hommes de La Rochelle a requalifié la relation à compter du 19 juillet 2017, alloué l’indemnité de requalification, admis partiellement l’intervention du syndicat, et condamné l’entreprise de travail temporaire au paiement de l’indemnité de fin de mission. Les défenderesses ont interjeté appel, contestant la requalification et l’indemnité de précarité, tandis que le salarié, soutenu par le syndicat, concluait à la confirmation, sollicitant en outre la recevabilité de l’intervention pour l’ensemble des chefs.

La cour devait, d’abord, apprécier si les éléments produits caractérisaient un accroissement ponctuel justifiant le recours à l’intérim, au regard des articles L.1251-5, L.1251-6 et L.1251-40 du code du travail. Elle devait, ensuite, déterminer si l’indemnité de précarité restait due malgré la requalification et l’embauche ultérieure, au regard de l’article L.1251-32 et de la jurisprudence la plus récente. Elle était, enfin, conduite à trancher la recevabilité de l’intervention syndicale au regard des articles 117 et 121 du code de procédure civile et des pouvoirs justificatifs requis.

La Cour d’appel de Poitiers confirme la requalification, au motif que « Il incombe à l’entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat de mission ». Elle retient qu’« Il n’est ainsi produit aucun tableau illustrant l’évolution des commandes laissant apparaître cet accroissement temporaire d’activité », en présence d’un carnet de commandes durablement supérieur aux capacités. Elle en déduit que « les contrats de travail temporaire ont eu pour effet de pourvoir durablement des emplois liés à l’activité normale et permanente de l’entreprise », et décide que « Partant, il convient […] de requalifier la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 19 juillet 2017 ». Elle accorde l’indemnité de requalification d’un mois, conformément à l’article L.1251-41, lequel énonce que « Si le conseil de prud’hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité […] ne pouvant être inférieure à un mois de salaire ». En revanche, elle déboute le salarié de l’indemnité de fin de mission, rappelant que « En revanche, l’indemnité de précarité, lorsqu’elle n’a pas été versée au salarié au terme du contrat de mission, ne lui est pas due dans l’hypothèse d’une requalification […] ». Enfin, l’intervention du syndicat est déclarée irrecevable, la cour relevant qu’« Il est constant que le représentant d’un syndicat en justice doit justifier d’un pouvoir spécial ou d’une disposition des statuts », et constatant, en l’absence de pièces, que « ce syndicat n’est pas valablement représenté dans la présente procédure ».

 

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