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Voir notes de :
- M. ZALEWSKI-SICARD, Gaz. Pal., 2014, n° 61, p. 29.
- M. SIZAIRE, Revue « CONSTRUCTION URBANISME », 2014, n° 3, p. 33.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 22 janvier 2014
N° de pourvoi: 12-29.368
Publié au bulletin Cassation
Sur le premier moyen :
Vu les articles 1601-3 du code civil et R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, ensemble les articles 1er et 10 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 octobre 2012) rendu sur renvoi après cassation (3e civ., 10 février 2009, n° 08-12. 131), que la société Résidence Altamira (la société) a fait édifier un immeuble sur un terrain lui appartenant qu'elle a placé sous le régime de la copropriété et vendu par lots en l'état futur d'achèvement ; que par acte des 5 et 12 février 1975, M. et Mme X... ont acquis les lots 125 et 43 de l'immeuble dont la livraison était prévue le 31 août 1975 ; que la société a été condamnée par arrêt du 3 mars 1983 à délivrer les lots aux acquéreurs ; que le syndicat des copropriétaires de la résidence Altamira a assigné M. et Mme X... en paiement de l'arriéré de charges de copropriété ;
Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt retient qu'un immeuble vendu par lots en l'état futur d'achèvement se trouve soumis au statut de la copropriété dès qu'il est pour partie habitable et qu'il appartient à deux copropriétaires au moins et que la défaillance du vendeur dans son obligation d'achever les parties privatives d'un lot n'exonère pas l'acquéreur de celui-ci du payement des charges de copropriété ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'acquéreur n'est tenu des charges de copropriété qu'à partir de l'achèvement des lots acquis et sans rechercher si les lots étaient achevés à la date d'exigibilité des charges, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne le syndicat des copropriétaires résidence Altamira aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires résidence Altamira à payer à M. et Mme X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande du syndicat des copropriétaires résidence Altamira ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné les époux X... à payer au Syndicat des Copropriétaires de la Résidence Altamira la somme de 13. 606, 21 euros au titre des charges exigibles à la date du 17 décembre 2009 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'un immeuble vendu par lots en l'état futur d'achèvement se trouve soumis au régime de la copropriété dès qu'il est pour partie habitable et qu'il appartient à deux copropriétaires au moins ; que la défaillance du vendeur dans son obligation d'achever les parties privatives d'un lot n'exonère pas l'acquéreur de celui-ci du paiement des charges de copropriété ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE par actes notariés des 5 et 12 février 1975, Monsieur et Madame Y... ont vendu en l'état futur d'achèvement les biens et droits immobiliers des lots n° 125 (appartement) et n° 43 (cave) qu'ils avaient acquis le 20 mai 1974 de la Société Civile Immobilière « Résidence Altamira » dans l'immeuble dénommé « Résidence Altamira », sis à Mandelieu ; que pour s'opposer à la demande principale du Syndicat des Copropriétaires, les époux X... font valoir qu'ils n'ont pas la qualité de copropriétaires, dans la mesure où il n'y a pas eu livraison des lots acquis et où la réception ne peut intervenir, le studio n'étant pas achevé au sens de l'article R 261-1 du Code de la construction d'habitation ; que selon l'article 1601-3 du Code civil, « la vente en l'état futur d'achèvement est le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l'acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l'acquéreur au fur et à mesure de leur exécution ; l'acquéreur est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux. Le vendeur conserve les pouvoirs du maître de l'ouvrage jusqu'à la réception des travaux » ; que l'article 1601-4 du Code civil prévoit « la cession des droits par l'acquéreur des droits qu'il tient d'une vente d'immeuble à construire substitue de plein droit le cessionnaire dans les obligations de l'acquéreur envers le vendeur » ; qu'ainsi, à la différence de la vente à terme, dans l'hypothèse d'une vente en l'état futur d'achèvement, le transfert de propriété s'effectue immédiatement ; qu'il importe peu, dès lors, que l'acquéreur n'ait pas pris possession de son lot ou qu'il n'y ait pas eu de réception, dans la mesure où c'est lui qui est désormais le propriétaire du sol, de ce qui a été construit et, au fur et à mesure, de ce qui se construit et non plus le vendeur ; que c'est donc l'acquéreur qui a la qualité de copropriétaire, dès lors que la copropriété est constituée et qui est redevable des charges, conformément à la loi de 1965 ; qu'en conséquence, Monsieur X... Antoine et Madame X... née A...Michelle ayant acquis les lots 125 et 48 au sein de la copropriété de la Résidence l'Altamira, en l'état futur d'achèvement, ont bien la qualité de propriétaires et sont redevables de la quote-part de charges et provisions ;
ALORS QU'en cas de vente d'un lot de copropriété en l'état futur d'achèvement, le vendeur et l'acquéreur ont sur ce lot des droits concurrents tant que le bien immobilier correspondant n'est pas achevé, c'est-à-dire que tant que n'ont pas été exécutés les ouvrages ni installés les éléments d'équipements indispensables à l'utilisation, conformément à sa destination, de l'immeuble faisant l'objet du contrat ; qu'il s'ensuit que, jusqu'à l'achèvement de l'ouvrage, l'acquéreur du lot à construire ne peut être regardé comme tenu, et en tout cas comme seul tenu, au règlement des charges de copropriété y afférentes ; qu'en considérant néanmoins que les époux X... étaient seuls redevables des charges de copropriété afférentes aux lots litigieux et en les condamnant à régler l'intégralité de ces charges, sans s'être préalablement assurés que l'appartement en cause disposait des éléments d'équipements indispensables à son utilisation et qu'il pouvait dès lors être regardé comme achevé, ce que contestaient fermement les époux X... dans leurs conclusions d'appel, preuves à l'appui (cf. leurs dernières écritures, p. 6 à 8), la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles 1601-3 du Code civil, R 261-1 du Code de la construction et d'habitation et 10 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné les époux X... à payer au Syndicat des Copropriétaires de la Résidence Altamira la somme de 13. 606, 21 euros au titre des charges exigibles à la date du 17 décembre 2009 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'aucune dépense de chauffage n'a été mise à la charge des époux X... ; que les dépenses d'eau sont relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes ; que les dépenses d'électricité ont été entraînées par des équipements communs présentant une utilité objective pour les lots des époux X... ; que ces derniers sont donc tenus de participer à ces dépenses sans pouvoir opposer au Syndicat des Copropriétaires le fait, d'une part, que leur lot 125 ne dispose pas de convecteur électrique, ne bénéficie pas d'installation sanitaire ni même de l'eau, d'autre part, que leur lot n° 43 ne serait pas identifiable, ce que, de surcroît, ils ne démontrent pas ; que le Syndicat des Copropriétaires justifie de l'exigibilité de sa créance par la production des procès-verbaux des assemblées générales ayant approuvé les comptes de l'exercice 1994/ 1995 et des exercices postérieurs, des décomptes de charges, des relevés d'appels de fonds adressés aux époux X... et d'un état récapitulatif détaillé de sa créance faisant apparaître un solde débiteur de 13. 606, 21 euros à la date du 17 décembre 2009 ; que les époux X... ne rapportant pas la preuve de leur libération, il convient de les condamner au paiement de cette somme ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE selon l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipements communs en fonction de l'utilité que services et éléments présentent à l'égard de chaque lot ; qu'ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5 ; que le règlement de copropriété fixe la quote-part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges ; que le Tribunal doit donc distinguer selon la nature des charges réclamées et déterminer s'il s'agit de charges communes générales imputables aux copropriétaires en fonction de leurs tantièmes ou de charges communes spéciales imputables en fonction de l'utilité qu'elles présentent pour les lots litigieux ; que la notion d'utilité est appréciée « in abstracto », objectivement par rapport à chaque lot et non pas de l'usage que les copropriétaires en font au gré de leur convenance ; que l'article 10 alinéa 1er ne vise pas l'utilisation réellement faite par les copropriétaires d'un élément d'équiquement, mais prend en compte une utilité objective et directe, à l'exclusion de l'utilité résiduelle ou fortuite, tout en retenant également l'usage des parties privatives compte tenu de leur destination ; qu'en l'espèce, les époux X... contestent l'utilité des charges réclamées ; qu'il résulte des tableaux de répartition des charges, de l'état des dépenses et du décompte individuel des époux X... arrêté au 5 août 2004 que les charges de piscine ne sont pas réclamées par le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence Altamira ; que s'agissant de l'entretien des espaces verts par les copropriétaires, il a été décidé par l'Assemblée Générale des copropriétaires du 22 juillet 1983 que si ces derniers n'assuraient pas un entretien régulier, celui-ci serait effectué par le jardinier de la copropriété et leur serait facturé en charges particulières ; que les frais de nettoyage des espaces verts des lots appartenant aux époux X... leur sont donc imputables ; que s'agissant du chauffage, le raccordement du lot est techniquement possible, comme cela est déclaré en l'espèce, dans l'hypothèse de la réalisation des travaux prescrits par Monsieur B..., expert, ces charges doivent donc être considérées comme présentant une utilité objective pour les défendeurs ; que les frais de carrelage du local à poubelles, d'étanchéité ou de confortement ou les travaux de transformateur présentent une utilité objective pour les époux X..., s'agissant de l'entretien des parties communes accessibles à tous et tous les copropriétaires étant susceptibles de bénéficier de l'électricité dans les parties communes ; qu'il en est de même de l'ascenseur, dans la mesure où l'entrée se fait par un étage et que l'appartement des défendeurs est situé au rez-de-chaussée ; que l'étude de sécurité constitue des dépenses générales communes ; qu'en revanche, ne présente aucune utilité objective pour les époux X... les charges relatives à la porte d'entrée D pour un montant de 15, 25 euros ;
ALORS QUE, D'UNE PART, les copropriétaires ne sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipements communs qu'en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de leurs lots ; qu'ils ne sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes que proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots ; qu'il s'en déduit que l'obligation d'un copropriétaire au paiement de sa quote-part de charges est subordonnée à l'existence effective de son lot privatif, ce qui suppose que celui-ci soit objectivement de nature à servir à l'usage auquel il est destiné, de sorte que si en raison de son inachèvement, ou encore d'un sinistre, l'appartement constituant un lot privatif est impropre à servir à l'usage d'habitation auquel il est destiné, aucune charge ne peut être réclamée à son propriétaire ; qu'en condamnant néanmoins les époux X... au paiement d'un arriéré de charges, sans s'assurer que leur appartement, compte tenu de son inachèvement et de son état de dégradation, n'était pas radicalement inhabitable, la Cour prive sa décision de base légale au regard des articles 5, 6 et 10 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, à partir du moment où un lot privatif se trouve être, en raison d'un sinistre ou de son inachèvement, impropre à l'usage auquel il est destiné et qu'il ne présente de ce fait objectivement aucune utilité pour son propriétaire, les services collectifs et éléments d'équipements communs ne peuvent par hypothèse lui être davantage d'une quelconque utilité, ce qui interdit de mettre à la charge de ce copropriétaire de telles dépenses ; qu'en décidant le contraire, pour mettre notamment à la charge des époux X... les dépenses d'électricité afférentes à l'usage des équipements communs dont est doté l'immeuble collectif, la Cour viole l'article 10 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.
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