Cour de cassation

chambre civile 3

Audience publique du mercredi 18 septembre 2013

N° de pourvoi: 12-16.359

Non publié au bulletin Cassation partielle

Attendu, selon les arrêts attaqués (Douai, 14 juin 2010 et 29 septembre 2011) , que la société civile immobilière Les Salicornes (la société) a acquis, par acte du 9 novembre 1982, deux terrains afin d'y réaliser un groupe d'immeubles composé de trois bâtiments dont l'un a été édifié et vendu par lots en état futur d'achèvement ; qu'elle a fait établir un "règlement de copropriété général" et un "règlement de copropriété du bâtiment A" applicable à un syndicat secondaire pour la gestion interne de ce bâtiment ; que le permis de construire obtenu le 12 mars 1981 a été annulé par arrêt du Conseil d'Etat du 22 avril 2005 ; que l'ordonnance désignant un administrateur provisoire a été rétractée par arrêt du 6 décembre 2006 ; que le pourvoi contre cet arrêt a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 20 novembre 2007 aux motifs que la création du syndicat secondaire et celle du syndicat principal étant subordonnées à l'édification du second bâtiment, il n'existait qu'un seul syndicat de copropriétaires ; qu'après mise en demeure de remettre en état le terrain d'assiette sur lequel elle avait commencé à édifier les bâtiments B et C, la société a, par acte du 10 octobre 2005, assigné le syndicat secondaire "syndicat des copropriétaires du bâtiment A", neuf copropriétaires et la société Opale Gestion Immobilière, syndic, en son nom personnel en paiement de dommages-intérêts pour inexécution des dispositions du règlement de copropriété et abus de droit ; qu'elle a, en cause d'appel, par acte du 10 décembre 2009, assigné sur le fondement de l'article 908 du code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires de la Résidence Les Salicornes (le syndicat) ; que ce dernier et la société Opale Gestion Immobilière ont soulevé l'irrecevabilité de l'appel ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident du syndicat des copropriétaires :

Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de dire l'action de la société recevable, alors, selon le moyen :

1°/ qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir ; que cette situation n'est pas susceptible d'être régularisée lorsque la prétention est émise par ou contre une partie dépourvue de personnalité juridique ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le syndicat secondaire, syndicat des copropriétaires du bâtiment A d'habitation de l'ensemble immobilier Les Salicornes, assigné en première instance par la société civile immobilière Les Salicornes n'avait pas d'existence légale, mais que cette erreur de dénomination avait été rectifiée par les conclusions déposées devant la cour d'appel postérieurement à l'arrêt rendu par la Cour de cassation, ainsi que par l'assignation du syndicat des copropriétaires en vertu de l'article 908 du code de procédure civile ; qu'en statuant ainsi, alors que l'instance ayant été introduite contre une partie dépourvue de la personnalité juridique, cette irrégularité ne pouvait être couverte, la cour d'appel a violé l'article 32 du code de procédure civile ;

2°/ que les fins de non-recevoir doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que la désignation du syndicat secondaire ne pouvait avoir induit le syndicat des copropriétaires en erreur sur la personne morale visée et ne créait aucune confusion possible ; qu'en se fondant ainsi sur l'absence de grief causé au syndicat des copropriétaires par la désignation du syndicat secondaire, pour rejeter le fin de non recevoir tirée de son défaut de qualité, la cour d'appel a violé l'article 124 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'il avait été jugé qu'aucun autre syndicat des copropriétaires n'avait jamais existé, que l'erreur de dénomination de la personne morale avait été rectifiée dans les conclusions déposées devant la cour postérieurement à l'arrêt du 20 novembre 2007, que le syndicat avait été assigné en vertu de l'article 908 du code de procédure civile et que les demandes formées contre celui-ci avaient le même objet et tendaient aux mêmes fins que celles contenues dans l'assignation introductive d'instance, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que l'erreur de dénomination de la personne morale, ensuite rectifiée, était sans incidence et que l'assignation n'encourait pas la nullité et n'affectait pas la recevabilité de l'appel ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais, sur le second moyen du pourvoi incident du syndicat des copropriétaires :

Vu l'article 1er de la loi du 10 juillet 1965 ;

Attendu que, pour dire que la société est propriétaire du lot 64 de la copropriété constitutif du droit de construire tel que décrit dans le règlement de copropriété, l'arrêt relève que le règlement de copropriété décrit le groupe d'immeubles comme comprenant un terrain, l'emplacement du bâtiment A à construire, un bâtiment B et un bâtiment C, étant précisé que ces deux derniers bâtiments ne formeront qu'un seul ensemble, les fondations étant communes, représentant le lot 64 et retient qu'en affectant 6.000 dix-millièmes des parties communes au lot 64, le règlement de copropriété reconnaît à ce lot, non encore bâti, un droit de construire portant sur des ouvrages dont la description est contenue dans les documents annexés au règlement de copropriété ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la partie privative du lot 64 était constituée du droit de construire les bâtiments B et C, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Opale gestion Immobilière qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Et attendu qu'aucun grief n'est dirigé contre l'arrêt rendu le 14 juin 2010 par la cour d'appel de Douai ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les moyens du pourvoi principal et le second moyen du pourvoi incident de la société Opale gestion immobilière :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 14 juin 2010 par la cour d'appel de Douai ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'appel recevable, l'arrêt rendu le 29 septembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la SCI Les Salicornes aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;