La Cour de cassation a récemment mis un coup d’arrêt à une pratique largement répandue dans le cadre des cessions de bail. A l’occasion de ce type d’opération, il était fréquent de prévoir, au stade de la promesse, que l’acte définitif de cession est conditionné par la conclusion d’un nouveau bail entre le bailleur et le bénéficiaire (futur) nouveau preneur.

Une telle situation se trouve à la base de l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt de la Haute Cour. Une société A s’était engagée à céder le bail dont elle était titulaire à la société B sous condition de la signature d’un nouveau bail entre cette dernière et le bailleur avant une certaine date, notamment. Les pourparlers devant mener à la conclusion du nouveau bail n’ayant pas abouti à cette fameuse date, la société B, invoquant la caducité de la promesse, n’a pas honoré le rendez-vous de signature de la cession de bail. Bien entendu, la société A a saisi le juge afin que celui-ci déclare la vente parfaite. La Cour d’appel ayant rejeté sa demande, la société A a porté le litige devant la Cour de cassation.

L’arrêt d’appel est cassé pour violation de l’article 1168 du Code civil : « la clause qui prévoit une condition portant sur un élément essentiel à la formation du contrat doit être réputée non écrite ». La Cour de cassation considère ainsi que la condition examinée porte sur l’objet même du contrat de cession, et donc sur une des conditions essentielles pour la validité d’une convention telles qu’énumérées aux termes de l’article 1108 du Code civil, est réputée non écrite. En conséquence, le bénéficiaire ne pouvant pas s’en prévaloir, la vente est parfaite et le promettant peut forcer le bénéficiaire à la conclure.

Cette décision remet en cause une pratique jusqu’alors fréquente et régulière du droit commercial et des affaires en appelant au respect de l’orthodoxie du droit des obligations. Des solutions demeurent néanmoins parmi lesquelles figure en particulier la négociation directe entre le promettant et le bailleur en vue de la modification du bail sous condition résolutoire de la cession du bail ainsi modifié à un bénéficiaire qui en promet alors l'acquisition.

Cass. 3ème civ. 22-10-2015 n° 14-20.096