Dans un arrêt du 11 mai 2023 (n° 21-25.136) publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de Cassation approuve la licéité d’un Golden Hello (ou prime d’arrivée) et son conditionnement à un remboursement partiel en cas de démission prématurée.
Au visa des articles L. 1121-1 et L. 1221-1 du code du travail, et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la cour de cassation affirme qu’une clause convenue entre les parties, dont l'objet est de fidéliser le salarié dont l'employeur souhaite s'assurer la collaboration dans la durée, peut, sans porter une atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du travail, subordonner l'acquisition de l'intégralité d'une prime d'arrivée, indépendante de la rémunération de l'activité du salarié, à une condition de présence de ce dernier dans l'entreprise pendant une certaine durée après son versement et prévoir le remboursement de la prime au prorata du temps que le salarié, en raison de sa démission.
Dès lors, viole ces textes la cour d'appel de Paris qui, pour débouter l'employeur de sa demande tendant au remboursement de la prime d'arrivée au prorata, retient que l'employeur ne pouvait valablement subordonner l'octroi définitif de la prime initiale versée au salarié à la condition que ce dernier ne démissionne pas, et ce, à une date postérieure à son versement, dès lors que cette condition, qui avait pour effet de fixer un coût à la démission, portait atteinte à la liberté de travailler du salarié.
1) Faits et procédure
M. [W] a été engagé en qualité d'opérateur sur les marchés financiers, à compter du 1er janvier 2016, par la société Tullet Prebon, aux droits de laquelle se trouve la société TP ICAP Europe.
Le contrat de travail liant les parties prévoyait une clause visant à verser au salarié nouvellement recruté une prime d’arrivée ou golden hello de 150 000 euros.
Le salarié devrait rembourser ladite prime partiellement en cas de démission dans les trente-six mois de sa prise de fonction.
Le salarié a démissionné le 16 mars 2017, soit avant la fin de l’échéance de la période de 36 mois.L'employeur a saisi la juridiction prud'homale le 12 septembre 2017 pour obtenir notamment le remboursement partiel de la prime de golden hello.
Le salarié, quant à lui refusait de rembourser la prime car, selon lui, cela portait atteinte à sa liberté de démissionner.
Dans un arrêt du 9 septembre 2021 (RG 19/02239), la Cour d'appel de Paris, a donné raison au salarié.
La société s’est pourvue en cassation.
2) Moyens
L'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de l'intégralité de ses demandes et de lui ordonner de remettre au salarié un solde de tout compte sans astreinte, alors que :
- « ne porte pas atteinte à la liberté du travail, la clause subordonnant l'acquisition de l'intégralité d'une prime d'arrivée, indépendante de la rémunération de l'activité du salarié, à une condition de présence dans l'entreprise après son versement pendant une durée convenue entre les parties et prévoyant l'acquisition de cette prime au prorata du temps passé par le salarié dans l'entreprise et le remboursement du solde en cas de démission avant l'échéance prévue ;
- qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 et L. 1121-1du code du travail, 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige. »
3) Solution
Au visa des articles L. 1121-1 et L. 1221-1 du code du travail, et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 , la Cour de cassation affirme qu’Il résulte de ces textes qu'une clause convenue entre les parties, dont l'objet est de fidéliser le salarié dont l'employeur souhaite s'assurer la collaboration dans la durée, peut, sans porter une atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du travail, subordonner l'acquisition de l'intégralité d'une prime d'arrivée, indépendante de la rémunération de l'activité du salarié, à une condition de présence de ce dernier dans l'entreprise pendant une certaine durée après son versement et prévoir le remboursement de la prime au prorata du temps que le salarié, en raison de sa démission, n'aura pas passé dans l'entreprise avant l'échéance prévue.
Pour débouter l'employeur de l'intégralité de ses demandes, l'arrêt de la Cour d’appel de Paris, après avoir relevé que l'article 7.3 du contrat de travail prévoyait le versement dans les trente jours de l'entrée en fonction du salarié d'une prime initiale d'un montant de 150 000 euros et que ce dernier devrait rembourser ladite prime partiellement en cas de démission dans les trente-six mois de sa prise de fonction, retient que l'employeur ne pouvait valablement subordonner l'octroi définitif de la prime initiale versée au salarié en janvier 2016 à la condition que ce dernier ne démissionne pas, et ce, à une date postérieure à son versement, dès lors que cette condition, qui avait pour effet de fixer un coût à la démission, portait ce faisant atteinte à la liberté de travailler du salarié.
En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel de Paris sans renvoi et condamne le salarié à rembourser la somme de 79 166,67 euros à titre de remboursement de la prime de golden hello
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c. cass. 11 mai 2023, n° 21-25.136
https://www.courdecassation.fr/decision/645c9453e48085d0f84a357b
Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
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