Le préjudice de jouissance devait être cantonné à la période d'inachèvement en lien direct avec la faute retenue
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 21-11.344
- ECLI:FR:CCASS:2022:C300095
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 02 février 2022
Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, du 12 novembre 2020
Président
Mme Teiller (président)
Avocat(s)
SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SARL Le Prado - Gilbert
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
VB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 février 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 95 F-D
Pourvoi n° Q 21-11.344
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022
1°/ Mme [U] [N]-[R],
2°/ M. [W] [N]-[R],
domiciliés tous deux [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° Q 21-11.344 contre l'arrêt rendu le 12 novembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-4), dans le litige les opposant à M. [Y] [J], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [N]-[R], de Me Le Prado, avocat de M. [J], après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 novembre 2020), suivant devis accepté du 28 octobre 2007, M. et Mme [N]-[R] ont confié à M. [J] des travaux d'aménagement de leur appartement.
2. M. [J] a abandonné le chantier au mois de juin 2008.
3. Après avoir vainement mis en demeure M. [J] d'achever les travaux, M. et Mme [N]-[R] ont porté plainte à son encontre avec constitution de partie civile devant un juge d'instruction des chefs d'escroquerie et de travail dissimulé.
4. Par acte du 14 mars 2013, M. et Mme [N]-[R] ont assigné M. [J] en remboursement des sommes versées et réparation de leurs préjudices.
5. Par ordonnance du 20 mai 2014, le juge de mise en état a sursis à statuer sur ces demandes jusqu'à la décision définitive de la juridiction pénale.
6. Par jugement définitif du 4 mai 2016, M. [J] a été déclaré coupable des délits de travail dissimulé et d'escroquerie au préjudice de M. et Mme [N]-[R].
7. L'instance civile a été reprise.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche, ci-après annexés
8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en ses première et troisième branches Enoncé du moyen
9. M. et Mme [N]-[R] font grief à l'arrêt de limiter à la somme de 10 000 euros la condamnation prononcée au titre de la réparation de leur préjudice de jouissance, alors :
« 1°/ que la victime d'une inexécution contractuelle n'est pas tenue d'y remédier dans l'intérêt du débiteur défaillant ; qu'en retenant, pour limiter le montant de l'indemnité due en réparation de leur préjudice de jouissance, que les époux [N] auraient dû faire procéder à des travaux pour achever le chantier abandonné par M. [J], la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu, 1231-1, du code civil
3°/ que doit être réparé tout dommage qui, sans la faute, aurait pu être évité ; qu'en retenant, pour limiter l'indemnisation du préjudice de jouissance des époux [N], que ceux-ci « auraient dû en toute hypothèse différer leur jouissance des lieux faisant l'objet des travaux, du fait de la nécessité de trouver une autre entreprise acceptant de poursuivre les travaux », cependant que, si M. [J] n'avait pas abandonné le chantier, les époux [N] n'auraient pas été contraints de trouver une autre entreprise et n'auraient donc pas subi le préjudice de jouissance dont ils sollicitaient l'indemnisation, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
10. La cour d'appel, qui a relevé que le devis de travaux s'élevait à la somme de 21 767,20 euros, a retenu que le coût des travaux réalisés, qui n'étaient pas affectés de désordres ou de malfaçons justifiant une reprise, devait être évalué à la somme de 10 000 euros.
11. Ayant constaté que les maîtres de l'ouvrage avaient laissé les lieux en l'état depuis l'abandon de chantier par M. [J], alors que leurs paiements ne représentaient qu'un peu plus de la moitié du montant du devis, faisant ainsi ressortir que M. et Mme [N]-[R] étaient en mesure de financer les travaux d'achèvement sans supplément de prix, elle a pu en déduire, abstraction faite de motifs surabondants, que le préjudice de jouissance, qu'elle n'a pas limité dans l'intérêt de l'auteur du dommage, devait être cantonné à la période d'inachèvement en lien direct avec la faute retenue.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [N]-[R] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
CIV. 3
VB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 février 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 95 F-D
Pourvoi n° Q 21-11.344
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022
1°/ Mme [U] [N]-[R],
2°/ M. [W] [N]-[R],
domiciliés tous deux [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° Q 21-11.344 contre l'arrêt rendu le 12 novembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-4), dans le litige les opposant à M. [Y] [J], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [N]-[R], de Me Le Prado, avocat de M. [J], après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 novembre 2020), suivant devis accepté du 28 octobre 2007, M. et Mme [N]-[R] ont confié à M. [J] des travaux d'aménagement de leur appartement.
2. M. [J] a abandonné le chantier au mois de juin 2008.
3. Après avoir vainement mis en demeure M. [J] d'achever les travaux, M. et Mme [N]-[R] ont porté plainte à son encontre avec constitution de partie civile devant un juge d'instruction des chefs d'escroquerie et de travail dissimulé.
4. Par acte du 14 mars 2013, M. et Mme [N]-[R] ont assigné M. [J] en remboursement des sommes versées et réparation de leurs préjudices.
5. Par ordonnance du 20 mai 2014, le juge de mise en état a sursis à statuer sur ces demandes jusqu'à la décision définitive de la juridiction pénale.
6. Par jugement définitif du 4 mai 2016, M. [J] a été déclaré coupable des délits de travail dissimulé et d'escroquerie au préjudice de M. et Mme [N]-[R].
7. L'instance civile a été reprise.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche, ci-après annexés
8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en ses première et troisième branches Enoncé du moyen
9. M. et Mme [N]-[R] font grief à l'arrêt de limiter à la somme de 10 000 euros la condamnation prononcée au titre de la réparation de leur préjudice de jouissance, alors :
« 1°/ que la victime d'une inexécution contractuelle n'est pas tenue d'y remédier dans l'intérêt du débiteur défaillant ; qu'en retenant, pour limiter le montant de l'indemnité due en réparation de leur préjudice de jouissance, que les époux [N] auraient dû faire procéder à des travaux pour achever le chantier abandonné par M. [J], la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu, 1231-1, du code civil
3°/ que doit être réparé tout dommage qui, sans la faute, aurait pu être évité ; qu'en retenant, pour limiter l'indemnisation du préjudice de jouissance des époux [N], que ceux-ci « auraient dû en toute hypothèse différer leur jouissance des lieux faisant l'objet des travaux, du fait de la nécessité de trouver une autre entreprise acceptant de poursuivre les travaux », cependant que, si M. [J] n'avait pas abandonné le chantier, les époux [N] n'auraient pas été contraints de trouver une autre entreprise et n'auraient donc pas subi le préjudice de jouissance dont ils sollicitaient l'indemnisation, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
10. La cour d'appel, qui a relevé que le devis de travaux s'élevait à la somme de 21 767,20 euros, a retenu que le coût des travaux réalisés, qui n'étaient pas affectés de désordres ou de malfaçons justifiant une reprise, devait être évalué à la somme de 10 000 euros.
11. Ayant constaté que les maîtres de l'ouvrage avaient laissé les lieux en l'état depuis l'abandon de chantier par M. [J], alors que leurs paiements ne représentaient qu'un peu plus de la moitié du montant du devis, faisant ainsi ressortir que M. et Mme [N]-[R] étaient en mesure de financer les travaux d'achèvement sans supplément de prix, elle a pu en déduire, abstraction faite de motifs surabondants, que le préjudice de jouissance, qu'elle n'a pas limité dans l'intérêt de l'auteur du dommage, devait être cantonné à la période d'inachèvement en lien direct avec la faute retenue.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme [N]-[R] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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