Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs
Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 20-16.337
- ECLI:FR:CCASS:2022:C200160
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du jeudi 03 février 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, du 20 janvier 2020
Président
M. Pireyre (président)
Avocat(s)
SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Thouin-Palat et Boucard
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 3 février 2022
Cassation
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 160 F-D
Pourvoi n° W 20-16.337
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 FÉVRIER 2022
1°/ M. [W] [I],
2°/ Mme [O] [M], épouse [I],
domiciliés tous deux [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° W 20-16.337 contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2020 par la cour d'appel de Nancy (chambre de l'exécution - JEX), dans le litige les opposant à la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. et Mme [I], de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 20 janvier 2020), la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne (la banque) a, sur le fondement d'un acte notarié de prêt en date du 5 juin 2000 garanti par le cautionnement solidaire de M. et Mme [I], fait délivrer à ces derniers, le 13 décembre 2017, un commandement de payer aux fins de saisie-vente.
2. M. et Mme [I] ont saisi un juge de l'exécution d'une contestation.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
3. M. et Mme [I] font grief à l'arrêt de les débouter de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la banque et de refuser en conséquence d'annuler les actes d'exécution diligentés par cette dernière, alors « que pour le défendeur à une action, seule constitue une demande en justice interrompant la prescription celle par laquelle il prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ; qu'en l'espèce, les époux [I] ont fait valoir que le jugement du tribunal de grande instance de Nancy du 14 mai 2010, infirmé par la cour d'appel de Nancy le 8 mars 2012, n'avait pas pu valablement interrompre la prescription car la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne n'avait pas formé de demande reconventionnelle tendant à la condamnation de Mme [I] à payer les sommes dues aux termes de l'acte notarié du 5 juin 2000 ; qu'en considérant que le jugement du 14 juin 2010 rendu entre Mme [I] en qualité de caution et la banque, infirmé par l'arrêt du 8 mars 2012, avait interrompu la prescription, sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
5. Pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que la banque est fondée à opposer dans le délai de prescription quinquennale qui pourrait être applicable, au regard de la nature commerciale de la créance attachée au titre exécutoire, des actes interruptifs, en l'occurrence le jugement du 14 octobre 2002 rendu par le tribunal de commerce de Nancy condamnant M. [I] en qualité de caution, le jugement d'adjudication du 8 décembre 2005, le procès-verbal de saisie-vente du 20 mai 2009, le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nancy du 14 juin 2010 entre Mme [I] en qualité de caution et la banque, infirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Nancy le 8 mars 2012, et le procès-verbal de saisie-attribution en date du 6 mars 2015.
6. Il en déduit que le commandement de payer, objet de la présente procédure, ayant été délivré le 13 décembre 2017, la créance de la banque n'est pas prescrite.
7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. et Mme [I] qui soutenaient que le jugement du 14 juin 2010, infirmé par la cour d'appel de Nancy le 8 mars 2012, n'avait pu valablement interrompre la prescription dans la mesure où, à aucun moment, la banque n'avait formé de demande reconventionnelle pour solliciter la condamnation de la seule Mme [I] à payer les sommes dues en vertu de l'acte authentique notarié, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. M. et Mme [I] font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors « que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a débouté les époux [I] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive dans la mesure où ils succombaient en leur appel, liant ainsi ce chef de dispositif à celui par lequel elle a statué au fond ; que la cassation du chef de dispositif critiqué par le premier moyen de cassation emportera dès lors cassation du chef du dispositif ayant débouté les époux [I] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt confirmant le jugement entrepris entraîne la cassation du chef de dispositif qui a rejeté toute autre demande, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne et la condamne à payer à M. et Mme [I] la somme globale de 3 000 euros ;
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 3 février 2022
Cassation
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 160 F-D
Pourvoi n° W 20-16.337
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 3 FÉVRIER 2022
1°/ M. [W] [I],
2°/ Mme [O] [M], épouse [I],
domiciliés tous deux [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° W 20-16.337 contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2020 par la cour d'appel de Nancy (chambre de l'exécution - JEX), dans le litige les opposant à la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. et Mme [I], de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 20 janvier 2020), la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne (la banque) a, sur le fondement d'un acte notarié de prêt en date du 5 juin 2000 garanti par le cautionnement solidaire de M. et Mme [I], fait délivrer à ces derniers, le 13 décembre 2017, un commandement de payer aux fins de saisie-vente.
2. M. et Mme [I] ont saisi un juge de l'exécution d'une contestation.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
3. M. et Mme [I] font grief à l'arrêt de les débouter de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de la banque et de refuser en conséquence d'annuler les actes d'exécution diligentés par cette dernière, alors « que pour le défendeur à une action, seule constitue une demande en justice interrompant la prescription celle par laquelle il prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire ; qu'en l'espèce, les époux [I] ont fait valoir que le jugement du tribunal de grande instance de Nancy du 14 mai 2010, infirmé par la cour d'appel de Nancy le 8 mars 2012, n'avait pas pu valablement interrompre la prescription car la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne n'avait pas formé de demande reconventionnelle tendant à la condamnation de Mme [I] à payer les sommes dues aux termes de l'acte notarié du 5 juin 2000 ; qu'en considérant que le jugement du 14 juin 2010 rendu entre Mme [I] en qualité de caution et la banque, infirmé par l'arrêt du 8 mars 2012, avait interrompu la prescription, sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
5. Pour confirmer le jugement, l'arrêt retient que la banque est fondée à opposer dans le délai de prescription quinquennale qui pourrait être applicable, au regard de la nature commerciale de la créance attachée au titre exécutoire, des actes interruptifs, en l'occurrence le jugement du 14 octobre 2002 rendu par le tribunal de commerce de Nancy condamnant M. [I] en qualité de caution, le jugement d'adjudication du 8 décembre 2005, le procès-verbal de saisie-vente du 20 mai 2009, le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nancy du 14 juin 2010 entre Mme [I] en qualité de caution et la banque, infirmé par l'arrêt de la cour d'appel de Nancy le 8 mars 2012, et le procès-verbal de saisie-attribution en date du 6 mars 2015.
6. Il en déduit que le commandement de payer, objet de la présente procédure, ayant été délivré le 13 décembre 2017, la créance de la banque n'est pas prescrite.
7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. et Mme [I] qui soutenaient que le jugement du 14 juin 2010, infirmé par la cour d'appel de Nancy le 8 mars 2012, n'avait pu valablement interrompre la prescription dans la mesure où, à aucun moment, la banque n'avait formé de demande reconventionnelle pour solliciter la condamnation de la seule Mme [I] à payer les sommes dues en vertu de l'acte authentique notarié, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. M. et Mme [I] font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors « que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a débouté les époux [I] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive dans la mesure où ils succombaient en leur appel, liant ainsi ce chef de dispositif à celui par lequel elle a statué au fond ; que la cassation du chef de dispositif critiqué par le premier moyen de cassation emportera dès lors cassation du chef du dispositif ayant débouté les époux [I] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des dispositions de l'arrêt confirmant le jugement entrepris entraîne la cassation du chef de dispositif qui a rejeté toute autre demande, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne et la condamne à payer à M. et Mme [I] la somme globale de 3 000 euros ;
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