Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

 

 

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 septembre 2022




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 688 F-D

Pourvoi n° B 21-11.263




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

Mme [S] [D], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 21-11.263 contre les arrêts rendus les 30 janvier 2020 et 11 février 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige l'opposant au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Marignane Plage Concorde dont le siège est [Adresse 1], représenté par le syndicat coopératif Marignane Plage Concorde, domicilié à la même adresse, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jobert, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [D], de la SAS Hannotin Avocats, avocat du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Marignane Plage Concorde, après débats en l'audience publique du 12 juillet 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jobert, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 30 janvier 2020, rectifié le 11 février 2021), le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Marignane Plage Concorde (le syndicat des copropriétaires) a assigné Mme [D], copropriétaire, en paiement d'un arriéré de charges.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

2. Mme [D] fait grief à l'arrêt du 30 janvier 2022 de la condamner à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de 5 545,03 euros au titre de l'arriéré de charges et provisions arrêté au 31 août 2017 et de 60 euros au titre de frais nécessaires de recouvrement alors :

« 1°/ que dans leurs conclusions d'appel, le syndicat des copropriétaires et Mme [D] demandaient à la cour d'appel de statuer sur les comptes arrêtés à la date du 7 novembre 2019, actualisés depuis le jugement de première instance ; qu'en condamnant Mme [D] à payer au syndicat des copropriétaires une somme au titre de l'arriéré de charges et provisions arrêté à la date antérieure du 31 août 2017, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé les articles 4, 5 et 561 du code de procédure civile.

2°/ que le juge ne peut se prononcer sur des choses non demandées ; que dans ses conclusions d'appel, le syndicat des copropriétaires sollicitait sa condamnation au paiement de la somme de 4 571,91 euros au titre des charges impayées, comptes arrêtés au 7 novembre 2019 ; qu'en la condamnant à lui payer la somme supérieure à celle demandée de 5.545,03 euros au titre de l'arriéré de charges et provisions arrêté au 31 août 2017 avec intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2016, outre 60 euros au titre de frais nécessaires de recouvrement, la cour d'appel a violé l'article 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile :

3. Selon le premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

4. Aux termes du second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

5. L'arrêt condamne Mme [D] à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de 5 545,03 euros, au titre de l'arriéré de charges et provisions arrêté au 31 août 2017, et de 60 euros au titre de frais nécessaires de recouvrement.

6. En statuant ainsi, alors que le syndicat des copropriétaires avait demandé le paiement de la somme de 4 571,91 euros, au titre de l'arriéré de charges impayées arrêté au 7 novembre 2019, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige et s'est prononcée sur ce qu'il ne lui était pas demandé, a violé les textes susvisés.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. Mme [D] fait grief à l'arrêt du 30 janvier 2020 de déclarer irrecevable sa demande en mainlevée totale ou partielle d'hypothèque, alors « que les parties peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'en retenant que sa demande tendant à ce que soit ordonnée la mainlevée totale ou partielle de l'hypothèque prise par le syndicat était nouvelle et, partant, irrecevable quand cette demande était l'accessoire ou la conséquence de ses prétentions contestant le montant de sa dette de charges impayées sur le fondement de laquelle l'hypothèque avait été inscrite, la cour d'appel a violé l'article 566 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 564 à 567 du code de procédure civile :

8. Il résulte de ces textes qu'une cour d'appel, saisie d'une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité, devant elle, de prétentions nouvelles ou la relevant d'office, est tenue de l'examiner au regard des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du code de procédure civile.

9. Pour déclarer irrecevable la demande en mainlevée totale ou partielle de l'hypothèque prise par le syndicat des copropriétaires, l'arrêt retient qu'il s'agit d'une prétention nouvelle.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, même d'office, si cette demande ne constituait pas l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles formées par Mme [D] en première instance, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme [D] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Marignane Plage Concorde les sommes de 5 545,03 euros, au titre de l'arriéré de charges et provisions arrêté au 31 août 2017, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juillet 2016, et de 60 euros au titre de frais nécessaires de recouvrement et déclare irrecevable la demande de Mme [D] en mainlevée totale ou partielle d'hypothèque, l'arrêt rendu le 30 janvier 2020, rectifié le 11 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Marignagne Plage Concorde aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Marignagne Plage Concorde et le condamne à payer à Mme [D] la somme de 3 000 euros ;