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Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 4 mars 2014
N° de pourvoi: 10-15.715
Non publié au bulletin Cassation
Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche, réunis :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 janvier 2010), que la société Cinetic et la société Finamur, venant aux droits de la société Slibail immobilier, ont passé avec la société Alsei, anciennement dénommée Adim, un contrat de promotion immobilière ayant pour objet la réalisation d'un bâtiment industriel dont une partie servant à l'usage d'atelier de chaînes de montage pour l'industrie automobile; que la livraison de l'immeuble est intervenue le 27 janvier 2004 avec une réserve concernant la propagation des bruits en zone d'activité ; qu'après expertise, les travaux de reprise nécessaires à la mise en conformité ont été réalisés et payés par la société Cinetic à hauteur de la somme de 156 392 euros ; que la société Cinetic a assigné les intervenants à l'acte de construire en paiement de cette somme et que des appels en garantie ont été formés ;
Attendu que pour condamner la société Alsei, anciennement dénommée Adim, in solidum avec la société cabinet MW architecture et la société MMA, à payer aux sociétés Finamur et Cinetic Assembly la somme de 156 392 euros, condamner la société Alsei, avec la société cabinet MW architecture, à garantir la société MMA de cette condamnation et condamner la société Alsei à rembourser aux sociétés Finamur et Cinetic Assembly la somme de 6 047,24 euros à titre d'intérêts, l'arrêt retient que les niveaux de bruit à certains postes de travail sont particulièrement élevés et justifient un traitement acoustique qui n'a pas été prévu, que cette situation est liée à la conception de l'ouvrage et constitue un désordre qui le rend impropre à sa destination et qu'il convient de condamner la société Adim, in solidum avec la société MMA, en vertu de l'article 1831-1 du code civil qui rend le promoteur débiteur de la garantie décennale ;
Qu'en statuant ainsi, tout en relevant que la société Cinetic Assembly avait, à la réception de l'ouvrage, formé une réserve concernant l'acoustique de l'atelier, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens des pourvois :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Cinetic Assembly et la société Finamur aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Alsei, demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société ALSEI, anciennement dénommée ADIM, in solidum avec la Société CABINET MW ARCHITECTURE et la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD, à payer aux sociétés FINAMUR et CINETIC ASSEMBLY la somme de 156.392 euros, d'avoir condamné la Société ALSEI, avec la Société CABINET MW ARCHITECTURE, à garantir la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD de cette condamnation et d'avoir condamné la Société ALSEI à rembourser aux sociétés FINAMUR et CINETIC ASSEMBLY la somme de 6.047,24 euros à titre d'intérêts ;
AUX MOTIFS QU'à la réception de l'ouvrage, la Société CINETIC ASSEMBLY a formé une réserve concernant la correction acoustique de l'atelier ; que les mesures effectuées par SOCOTEC confirment que l'atelier n'est pas conforme aux exigences de l'arrêté du 30 août 1990 ; que l'expert judiciaire a constaté que les niveaux de bruit à certains postes de travail sont particulièrement élevés et justifient un traitement acoustique qui n'a pas été prévu ; qu'il a constaté en effet l'absence totale de traitement acoustique par matériaux absorbants sur les parois verticales de l'atelier ainsi qu'en sous face de la couverture en bacs acier ; que les premiers juges ont estimé que cette situation ne constituait pas un désordre de nature décennale au motif qu'elle ne faisait pas obstacle à l'utilisation du bâtiment ; que le document de programmation établi par le maître de l'ouvrage mentionne au chapitre «recueil des données» que les zones cintrage et mécano-soudure sont des zones bruyantes à traiter et au chapitre «solution retenue» : « correction acoustique par bac perforé en option» ; qu'il précise que la zone cintrage est inchangée par rapport à l'actuelle implantation et que la zone mécano-soudure comprendra 6 postes de travail au lieu des 15 existants actuellement, toutes les autres machines étant implantées dans une zone commune ; que les premiers juges ont néanmoins estimé que le fait pour le maître de l'ouvrage de n'avoir pas averti les constructeurs des nuisances sonores générées par son activité et de n'avoir pas opté pour la correction acoustique proposée en option le constituait en faute et il a réparti la charge financière du sinistre entre le maître de l'ouvrage, le promoteur et l'architecte ; qu'il est constant que les locaux n'ont pas été aménagés de façon à éviter la réverbération du bruit sur ses parois et à limiter la propagation du bruit vers les autres locaux occupés par des travailleurs en contradiction avec les dispositions de l'article R 235-2-11 du Code du travail ; qu'une partie de ces locaux abrite des activités qui génèrent des intensités sonores supérieures au seuil d'utilisation des protections individuelles, de telle sorte que les personnes employées dans les autres ateliers supportent une intensité sonore anormale ; que cette situation, nonobstant le point de savoir si les seuils réglementaires ont été fixés régulièrement ou non, caractérise une contravention aux dispositions de l'article R 235-2-11 ; qu'elle est liée à la conception de l'ouvrage et constitue un désordre qui le rend impropre à sa destination ; que la propagation du bruit des ateliers de cintrage et de mécano-soudure dans le reste des bâtiments constitue un désordre qui porte atteinte à sa destination, le personnel ne pouvant travailler normalement dans ces locaux ; que ce désordre est donc de nature décennale ; que la réserve formée par le maître de l'ouvrage à la réception lui interdit de rechercher la garantie de l'assureur responsabilité décennale de ADIM ;
ALORS QUE si tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination, cette garantie n'est pas due, en revanche, s'agissant des désordres ayant fait l'objet d'une réserve à la réception ; qu'en décidant néanmoins que la Société ALSEI était tenue, envers la Société CINETIC ASSEMBLY, au titre de la garantie décennale des constructeurs, s'agissant des désordres acoustiques affectant l'ouvrage, après avoir pourtant constaté que ces désordres avaient fait l'objet, lors de la réception, de réserves de la part de la Société CINETIC ASSEMBLY, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1792 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société ALSEI, anciennement dénommée ADIM, in solidum avec la Société CABINET MW ARCHITECTURE et la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD, à payer aux sociétés FINAMUR et CINETIC ASSEMBLY la somme de 156.392 euros, d'avoir condamné la Société ALSEI, avec la Société CABINET MW ARCHITECTURE, à garantir la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD de cette condamnation et d'avoir condamné la Société ALSEI à rembourser aux sociétés FINAMUR et CINETIC ASSEMBLY la somme de 6.047,24 euros à titre d'intérêts ;
AUX MOTIFS QUE, pour s'exonérer de leurs responsabilités, le promoteur et l'architecte invoquent les limites de sa commande, le défaut d'information du maître de l'ouvrage sur les conditions d'exploitation de l'ouvrage et sa mauvaise foi, l'absence de manquement à leur devoir de conseil et l'absence de préjudice du maître de l'ouvrage qui, si elle avait été prévue, aurait dû payer l'isolation phonique en plus ; que les parties ayant traité pour la construction d'une usine destinée à recevoir une activité déjà exercée dans un autre site, les constructeurs ne peuvent pas invoquer la commande pour soutenir qu'ils ne sont pas responsables de l'inadéquation de l'ouvrage à ses conditions d'utilisation alors qu'il leur était facile de se rendre sur le site pour mesurer les contraintes de leur ouvrage ; qu'ils ne peuvent invoquer, pour s'exonérer de leur responsabilité, que l'immixtion d'un maître de l'ouvrage notoirement compétent et l'acception consciente d'un risque dont il aurait été clairement averti ; qu'aucun de ces deux arguments n'est clairement invoqué, tout au plus peut-on rattacher au deuxième le fait qu'un traitement acoustique a été proposé au maître de l'ouvrage en option ; qu'il n'apparaît cependant nulle part qu'il ait été informé de ce que, à défaut d'accepter cette option, l'usine ne serait pas utilisable en raison de la propagation du bruit des ateliers de mécano soudure et de cintrage à l'ensemble du bâtiment ; que les constructeurs ne s'exonèrent donc pas de leur responsabilité ;
1°) ALORS QUE s'il appartient à l'entrepreneur de se renseigner, même en présence d'un maître d'oeuvre, sur la finalité des travaux qu'il accepte de réaliser et sur les contraintes en résultant, il n'en appartient pas moins au maître de l'ouvrage d'informer spontanément l'entrepreneur de toute contrainte spécifique dont il a connaissance ; qu'en décidant néanmoins que la Société ALSEI ne pouvait utilement se prévaloir de ce que la Société CINETIC ASSEMBLY avait connaissance des contraintes spécifiques en matière d'acoustique, au regard de son activité, ce dont il résultait pourtant qu'elle avait commis une faute de nature à exonérer en tout ou partie les constructeurs de leur responsabilité, la Cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
2°) ALORS QUE le propre de la garantie décennale est de replacer le maître de l'ouvrage dans la situation dans laquelle il se serait trouvé si le désordre ne s'était pas produit ; qu'il en résulte que la mise en oeuvre de cette garantie ne saurait avoir pour effet de faire bénéficier le maître de l'ouvrage d'éléments de construction dont il n'a pas supporté le coût ; qu'en décidant néanmoins que les nuisances acoustiques constituant un désordre couvert par la garantie décennale, la Société CINETIC ASSEMBLY est en droit de prétendre, sans bourse délier, au prix de l'isolation acoustique qui n'avait pas été prévue par le marché, la Cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
3°) ALORS QU'en infirmant le chef du jugement de première instance, qui avait décidé que le solde du prix des travaux, dû à la Société ALSEI, devrait s'imputer sur la somme mise à la charge de celle-ci au titre de la garantie décennale, sans énoncer aucun motif au soutien de ce chef de décision, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société ALSEI, anciennement dénommée ADIM, à relever et garantir pour moitié la Société CABINET MW ARCHITECTURE et la Compagnie MAF de la somme de 156.392 euros, la déboutant ainsi de sa demande tendant à voir condamner ces dernières à la garantir intégralement des condamnations prononcées à son encontre ;
AUX MOTIFS QUE l'assureur dommages ouvrage est bien fondé à appeler en garantie le promoteur et l'architecte au titre de leur responsabilité décennale ; qu'ADIM est un promoteur professionnel spécialisé dans la réalisation d'immeubles industriels ; que cette société a commis une faute en ne mesurant pas exactement les exigences de l'activité de son client en terme d'isolation acoustique ; que cette faute est partagée par l'architecte, le cabinet MW Architecture, qui ne s'en est pas soucié ; que cette faute est d'autant plus caractérisée que l'un et l'autre pouvaient constater la nécessité de cette isolation en visitant le site sur lequel CINETIC Assembly exerçait son activité ; qu'elle est également partagée entre le promoteur, qui avait une meilleure connaissance des process industriels que l'architecte, et ce dernier, qui devait mieux mesurer que le promoteur le pouvoir absorbant des matériaux ; que ces considérations conduisent à un partage par moitié entre les codébiteurs responsables de la charge financière du sinistre ;
ALORS QUE l'architecte qui est chargé d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, portant sur la conception et la réalisation de l'immeuble, doit sa garantie pour le tout au promoteur immobilier, au titre des désordres affectant l'immeuble et trouvant leur source dans la conception défectueuse de celui-ci ; qu'en déboutant néanmoins la Société ALSEI de sa demande tendant à voir condamner la Société CABINET MW ARCHITECTURE et son assureur, la Compagnie MAF, à la garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre, et en laissant à sa charge la moitié des sommes allouées au maître de l'ouvrage, sans rechercher si la Société CABINET MW ARCHITECTURE avait reçu une mission complète de maîtrise d'oeuvre, de sorte qu'elle avait l'entière charge de la conception de l'immeuble, ce dont il résultait qu'elle devait sa garantie à la Société ALSEI au titre des désordres trouvant leur source dans un défaut de conception, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du Code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Société ALSEI, anciennement dénommée ADIM, de sa demande tendant à voir condamner la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD à la garantir intégralement de toutes condamnations prononcées à son encontre au profit de la Société FINAMUR et de la Société CINETIC ASSEMBLY, et d'avoir condamné la Société ALSEI, anciennement dénommée ADIM, avec la Société CABINET MW ARCHITECTURE, à garantir la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD de la condamnation prononcée à l'encontre de celle-ci, in solidum avec la Société ALSEI, à payer aux sociétés FINAMUR et CINETIC ASSEMBLY la somme de 156.392 euros ;
AUX MOTIFS QU'il convient donc de condamner in solidum les Mutuelles du Mans en sa qualité d'assureur dommages ouvrage, et ADIM en vertu de l'article 1831-1 du Code civil repris par l'article 6-1-c du contrat de promotion qui le rend débiteur de la garantie décennale, à payer à FINAMUR et CINETIC la somme de 156.392 ¿ HT ;
ALORS QUE la Société ALSEI soutenait que la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES (MMA) IARD n'avait pas uniquement la qualité d'assureur dommages ouvrage, mais également celle d'assureur de sa responsabilité civile de droit commun et de sa responsabilité au titre de la garantie décennale, de sorte qu'elle devait en toute hypothèse la garantir des condamnations qui seraient prononcées à son encontre ; qu'en condamnant la Société ALSEI à garantir la Société LA MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD des condamnations prononcées à son encontre et en la déboutant de sa demande tendant à être elle-même garantie par cet assureur, sans répondre à ces conclusions, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour les sociétés Cabinet MW architecture et Mutuelle des architectes français, demanderesses au pourvoi incident
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné le cabinet MW ARCHITECTURE et la Mutuelle des Architectes Français à garantir la compagnie MMA de sa condamnation à payer aux sociétés FINAMUR et CINETIC la somme de 156.392 ¿,
Aux motifs que « à la réception de l'ouvrage, la société CINETIC ASSEMBLY a formé une réserve concernant la correction acoustique de l'atelier. Les mesures effectuées par SOCOTEC confirment que l'atelier n'est pas conforme aux exigences de l'arrêté du 30 août 1990.
L'expert judiciaire a constaté que les niveaux de bruit à certains postes de travail sont particulièrement élevés et justifient un traitement acoustique qui n'a pas été prévu. Il a constaté en effet l'absence totale de traitement acoustique par matériaux absorbants sur les parois verticales de l'atelier ainsi qu'en sous face de la couverture en bacs acier.
Les premiers juges ont estimé que cette situation ne constituait pas un désordre de nature décennale au motif qu'elle ne faisait pas obstacle à l'utilisation du bâtiment.
Le document de programmation établi par le maître de l'ouvrage mentionne au chapitre « recueil des données » que les zones cintrage et mécano-soudure sont des zones bruyantes à traiter et au chapitre « solution retenue » ; « correction acoustique par bac perforé en option ». Il précise que la zone cintrage est inchangée par rapport à l'actuelle implantation et que la zone mécano-soudure comprendra 6 postes de travail au lieu des 15 existants actuellement, toutes les autres machines étant implantées dans une zone commune. Les premiers juges ont néanmoins estimé que le fait pour le maître de l'ouvrage de n'avoir pas averti les constructeurs des nuisances sonores générées par son activité et de n'avoir pas opté pour la correction acoustique proposée en option le constituait en faute et il a réparti la charge financière du sinistre entre le maître de l'ouvrage, le promoteur et l'architecte.
Il est constant que les locaux n'ont pas été aménagés de façon à éviter la réverbération du bruit sur ses parois et à limiter la propagation du bruit vers les autres locaux occupés par des travailleurs en contradiction avec les dispositions de l'article R 235-2-11 du Code du travail. Une partie de ces locaux abrite des activités qui génèrent des intensités sonores supérieures au seuil d'utilisation des protections individuelles, de telle sorte que les personnes employées dans les autres ateliers supportent une intensité sonore anormale. Cette situation, nonobstant le point de savoir si les seuils réglementaires ont été fixés régulièrement ou non, caractérise une contravention aux dispositions de l'article R 235-2-11. Elle est liée à la conception de l'ouvrage et constitue un désordre qui le rend impropre à sa destination.
La propagation du bruit des ateliers de cintrage et de mécano-soudure dans le reste des bâtiments constitue un désordre qui porte atteinte à sa destination, le personnel ne pouvant travailler normalement dans ces locaux. Ce désordre est donc de nature décennale.
La réserve formée par le maître de l'ouvrage à la réception lui interdit de rechercher la garantie de l'assureur responsabilité décennale de ADIM.
Pour s'exonérer de leurs responsabilités le promoteur et l'architecte invoquent les limites de sa commande, le défaut d'information du maître de l'ouvrage sur les conditions d'exploitation de l'ouvrage et sa mauvaise foi, l'absence de manquement à leur devoir de conseil et l'absence de préjudice du maître de l'ouvrage qui, si elle avait été prévue, aurait payé l'isolation phonique en plus.
Les parties ayant traité pour la construction d'une usine destinée à recevoir une activité déjà exercée dans un autre site, les constructeurs ne peuvent pas invoquer la commande pour soutenir qu'ils ne sont pas responsables de l'inadéquation de l'ouvrage à ses conditions d'utilisation alors qu'il leur était facile de se rendre sur le site pour mesurer les contraintes de leur ouvrage.
Ils ne peuvent invoquer pour s'exonérer de leur responsabilité, que l'immixtion d'un maître de l'ouvrage notoirement compétent et l'acception consciente d'un risque dont il aurait été clairement averti. Aucun de ces deux arguments n'est clairement invoqué, tout au plus peut-on rattacher au deuxième le fait qu'un traitement acoustique a été proposé au maître de l'ouvrage en option, II n'apparaît cependant nulle part qu'il ait été informé de ce que, à défaut d'accepter cette option, l'usine ne serait pas utilisable en raison de la propagation du bruit des ateliers de mécano soudure et de cintrage à l'ensemble du bâtiment. Les constructeurs ne s'exonèrent donc pas de leur responsabilité.
La réparation doit replacer le maître de l'ouvrage dans la situation dans laquelle il se serait trouvé si la construction n'avait pas été affectée d'un vice. II n'y a donc pas lieu de lui faire supporter le prix de l'isolation acoustique.
Il convient donc de condamner in solidum les Mutuelles du Mans en sa qualité d'assureur dommages ouvrage, et ADIM en vertu de l'article 1831-1 du code civil repris par l'article 6-1-c du contrat de promotion qui le rend débiteur de la garantie décennale, à payer à FINAMUR et CINETIC la somme de 156,392 ¿ HT. Cette somme portera intérêt à compter de l'arrêt » (arrêt p. 3 & 4),
ALORS QUE si tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination, cette garantie n'est pas due, en revanche, s'agissant des désordres ayant fait l'objet d'une réserve à la réception, qu'en décidant néanmoins que le cabinet MW ARCHITECTURE et la Mutuelle des Architectes Français étaient tenusde garantir les MMA au titre de la garantie décennale des constructeurs, s'agissant des désordres acoustiques affectant l'ouvrage, après avoir pourtant constaté que ces désordres avaient fait l'objet, lors de la réception, de réserves de la part de la Société CINETIC ASSEMBLY, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1792 du Code civil ;
ALORS QUE s'il appartient à l'entrepreneur de se renseigner, même en présence d'un maître d'oeuvre, sur la finalité des travaux qu'il accepte de réaliser et sur les contraintes en résultant, il n'en appartient pas moins au maître de l'ouvrage d'informer spontanément l'entrepreneur de toute contrainte spécifique dont il a connaissance ; qu'en décidant néanmoins que les constructeurs ne pouvaient utilement se prévaloir de ce que la Société CINETIC ASSEMBLY avait connaissance des contraintes spécifiques en matière d'acoustique, au regard de son activité, ce dont il résultait pourtant qu'elle avait commis une faute de nature à exonérer en tout ou partie les constructeurs de leur responsabilité, la Cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;
ALORS QUE le propre de la garantie décennale est de replacer le maître de l'ouvrage dans la situation dans laquelle il se serait trouvé si le désordre ne s'était pas produit ; qu'il en résulte que la mise en oeuvre de cette garantie ne saurait avoir pour effet de faire bénéficier le maître de l'ouvrage d'éléments de construction dont il n'a pas supporté le coût ; qu'en décidant néanmoins que les nuisances acoustiques constituant un désordre couvert par la garantie décennale, la Société CINETIC ASSEMBLY est en droit de prétendre, sans bourse délier, au prix de l'isolation acoustique qui n'avait pas été prévue par le marché, la Cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil.
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