Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 1 juillet 2015
N° de pourvoi: 13-13.698
Non publié au bulletin Rejet

M. Mas (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Boulloche, SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Foussard, Froger, avocat(s)

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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 décembre 2012), rendu en matière de référé, que l'association Oeuvre du perpétuel secours (l'association) a confié des travaux de rénovation des locaux de son service de néonatologie à la société Entretien ravalement et maçonnerie (la société ERMA) sous la maîtrise d'oeuvre de la société Victor Castro architecte (société Victor Castro) ; que la société ERMA a saisi le juge des référés de demandes tendant à l'octroi d'une provision et à la remise de la garantie prévue par l'article 1799-1 du code civil ; que reconventionnellement l'association a sollicité la désignation d'un expert sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, et en outre, devant la cour d'appel, subsidiairement, la condamnation de la société Victor Castro, à la garantir d'une condamnation de provision ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de la condamner à titre provisionnel à payer à la société ERMA la somme de 239 132,96 euros ainsi qu'à lui fournir la garantie prévue par l'article 1799-1 du code civil et de rejeter toute autre demande alors, selon le moyen :

1°/ qu'elle faisait valoir qu'elle n'avait pu valablement notifier un décompte général définitif dans le délai de quarante cinq jours à compter du 1er octobre 2010 dés lors qu'elle ne disposait pas de l'intégralité des documents des ouvrages exécutés du fait des manquements de la société ERMA, le « montant restant dû » figurant sur le mémoire définitif établi par la société ERMA faisant l'objet d'une contestation sérieuse compte tenu des indus facturés, des réserves non encore levées et des défauts d'exécution imputables à la société ERMA, qui est encore intervenue en avril 2011, la réception étant du 28 avril 2011 ; qu'en ne se prononçant pas sur ce moyen la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'elle faisait valoir qu'elle n'avait pu valablement notifier un décompte général définitif dans le délai de quarante cinq jours à compter du 1er octobre 2010 dés lors qu'il ne disposait pas de l'intégralité des documents des ouvrages exécutés du fait des manquements de la société ERMA, le « montant restant dû » figurant sur le mémoire définitif établi par la société ERMA faisant l'objet d'une contestation sérieuse compte tenu des indus facturés, des réserves non encore levées et des défauts d'exécution imputables à la société ERMA, qui est encore intervenue au titre des malfaçons en avril 2011, la réception étant du 28 avril 2011 ; qu'ayant relevé que l'association n'avait pas notifié à la société ERMA un décompte définitif dans le délai de quarante cinq jours suivant la réception du mémoire définitif par le maître d'oeuvre ainsi que l'impose le texte précité (en l'espèce, ce délai a couru du 4 octobre au 18 novembre 2010), que la société ERMA, conformément à la norme applicable, a délivré au maître de l'ouvrage mise en demeure de payer le montant du mémoire définitif par courrier recommandé daté du 15 novembre 2010 et a simultanément adressé copie de cette mise en demeure au maître d'oeuvre par courrier recommandé, qu'il est ainsi manifeste qu'en application du paragraphe 19.6.2 de la norme NF P.03.001, l'association est réputée avoir accepté le mémoire définitif établi par la société ERMA pour un montant de 239 132,96 euros T.T.C. à la date du 3 décembre 2010, puis retenu qu'il ne peut être allégué par (l'association) un retard de l'entreprise dans la transmission des DOE alors que le maître d'oeuvre en était en possession depuis le 3 novembre 2010, que compte tenu du caractère définitif des comptes entre les parties, le contentieux qui fait l'objet de la mesure d'expertise relativement à la levée des réserves recensées par l'expert dans sa note n° 2 ne saurait constituer une contestation sérieuse faisant obstacle à la demande provisionnelle, quand l'expert avait pour mission de faire les comptes entre les parties, ce qui caractérisait une obligation sérieusement contestable, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;

3°/ qu'elle faisait valoir que le 5 octobre 2010, soit quelques jours après la réception par le maître d'oeuvre du décompte général définitif, celui-ci demandait à la société ERMA, par courrier recommandé n° A 040 077 5871 1, de lui communiquer les documents des ouvrages exécutés qui ne lui avaient pas été fournis à la réception des travaux, conformément à l'article 17.1.5 de la norme, que la fourniture de ces documents était une condition sine qua non à l'instruction du décompte définitif, qu'une partie de ces éléments ont été transmis le 3 novembre 2010 (pièce n° 26) mais que le 7 février 2011, la maîtrise d'oeuvre recevait encore de nouveaux documents des ouvrages exécutés, (pièce n° 27) ; qu'en affirmant qu'il ne peut être allégué par l'association un retard de l'entreprise dans la transmission des DOE alors que le maître d'oeuvre en était en possession depuis le 3 novembre 2010, la cour d'appel qui ne relève pas les éléments de preuve établissant que l'ensemble des documents avait été remis le 3 novembre 2010, ce qui était contredit par la pièce 27, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que l'article 1799-1 du code civil écarte du champ d'application de la garantie de paiement les marchés de travaux conclus pour le propre compte du maître de l'ouvrage et pour la satisfaction de besoins ne ressortissant pas à une activité professionnelle en rapport avec ce marché, ce dont il suit que les juges du fond ne peuvent faire application de ce texte sans faire ressortir en quoi le maître de l'ouvrage exerce à titre professionnel, c'est à dire à titre habituel, une activité susceptible d'être rattachée à la conclusion d'un marché de travaux immobiliers ; qu'en retenant que l'Oeuvre du perpétuel secours est une association à but non lucratif reconnue d'utilité publique qui, aux termes de ses statuts, consacre son activité habituelle notamment aux soins dispensés aux malades, à l'hospitalisation et à l'hébergement de ceux-ci dans des locaux qui lui appartiennent, à la gestion d'un établissement hospitalier qu'elle compte parmi ses moyens d'action et dont les personnels sont ses salariés directs, qu'elle contribue par ailleurs à la coopération entre l'hôpital et les professionnels de santé, développe une activité de formation professionnelle de santé et favorise toute activité orientée vers la qualité des soins et la sécurité des personnes, que c'est précisément dans le cadre de cette activité économique et professionnelle habituelle que s'inscrit le marché litigieux qui porte sur la rénovation du service de néonatologie de l'hôpital, pour décider que (l'association) ne peut se prévaloir de l'alinéa 4 du texte précité ; la cour d'appel se prononce par des motifs inopérants et elle a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1799-1 du code civil.

Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que le cahier des clauses administratives particulières soumettait le contrat aux dispositions de la norme NF.P.03.001, et retenu, par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que l'association n'avait pas notifié à la société ERMA de décompte définitif dans le délai de quarante-cinq jours suivant la réception, le 4 octobre 2010, du mémoire définitif par le maître d'oeuvre qui était, le 3 novembre 2010, en possession des documents des ouvrages exécutés, que le courrier recommandé du 15 novembre 2010, adressé par la société ERMA au maître de l'ouvrage, valant mise en demeure de payer le montant du mémoire définitif, n'avait pas reçu de réponse utile, la cour d'appel, qui a confirmé la désignation, sollicitée par le maître de l'ouvrage après la notification du décompte définitif, d'un expert chargé de donner son avis sur les comptes entre les parties, et a retenu, répondant aux conclusions sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et abstraction faite de motifs surabondants, que l'association était réputée avoir accepté le mémoire définitif établi par la société ERMA sans que la mesure d'expertise ne constitue une contestation sérieuse, a légalement justifié sa décision de condamnation au paiement d'une provision ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que l'association, à but non lucratif reconnue d'utilité publique, consacrait son activité habituelle aux soins dispensés aux malades, à leur hospitalisation dans des locaux lui appartenant et à la gestion d'un établissement hospitalier et retenu que le marché litigieux portant sur la rénovation du service de néonatologie de l'hôpital s'inscrivait dans le cadre de cette activité économique et professionnelle habituelle, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que l'association devait fournir la garantie prévue par l'article 1799-1 du code civil, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que la cassation n'étant pas prononcée sur le premier moyen, le grief tiré d'une annulation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

PAR CES MOTIFS ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association Oeuvre du perpétuel secours aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;