Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 13 février 2020
N° de pourvoi: 19-11.495

Non publié au bulletin Cassation partielle sans renvoi

M. Chauvin (président), président
SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat(s)

 


 

Texte intégral


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 février 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 220 FS-D

Pourvoi n° N 19-11.495

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2020

La Société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° N 19-11.495 contre l'arrêt rendu le 17 septembre 2018 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Compagnie européenne de garanties et cautions (CEGC), société anonyme, dont le siège est [...] ,

2°/ à M. M... N...,

3°/ à Mme Q... P..., épouse N...,

tous deux domiciliés [...] ,

4°/ à Mme H... A..., domiciliée [...] , prise en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Kazeco,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la Société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Compagnie europénne de garanties et cautions, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 11 février 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, conseillers, Mmes Guillaudier, Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il y a lieu de donner acte à la Société mutuelle d'assurances du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme N... et Mme A..., prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Kazéco.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 17 septembre 2018), M. et Mme N... et la société Kazéco ont conclu un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan. Le constructeur a souscrit une garantie de livraison auprès de la société Compagnie européenne de garantie immobilière (la CEGI), devenue la société Compagnie européenne de garanties et de cautions (la CEGC), et une assurance dommages-ouvrage auprès de la SMABTP.

3. Se plaignant de désordres et de non-conformités, M. et Mme N... ont, après réception, assigné la société Kazéco en indemnisation et appelé en garantie le mandataire judiciaire de la société Kazéco, la SMABTP et la CEGI.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Énoncé du moyen

4. La SMABTP fait grief à l'arrêt de la condamner à garantir la CEGC de son préjudice matériel, alors « que le garant de livraison, qui indemnise les maîtres d'ouvrage, assurés de l'assureur dommages-ouvrage, et qui exerce contre ce dernier son recours subrogatoire, ne dispose pas à l'égard de cet assureur de plus de droits que n'en avaient les propres assurés de celui-ci ; que la cour d'appel, qui a infirmé le jugement rendu le 2 mars 2017 par le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre « uniquement en ce qu'il avait condamné la CEGC à payer la somme de 291.909,93 euros à M. et Mme N... au titre de la démolition et de la reconstruction de leur maison », a confirmé ce jugement pour le surplus, et donc notamment en ce qu'il avait déclaré M. et Mme N..., maîtres d'ouvrage, irrecevables en leurs demandes d'indemnisation dirigées contre la SMABTP, faute pour eux d'avoir déclaré le sinistre à l'assureur « dommages-ouvrage »; qu'en condamnant la SMABTP à garantir la CEGC au titre des préjudices matériels soufferts par les maîtres d'ouvrage, quand le garant de livraison ne pouvait disposer à l'égard de cet assureur de plus de droits que n'en avaient les propres assurés de celui-ci, et qu'elle constatait que M. et Mme N... étaient précisément irrecevables à mobiliser la garantie de la SMABTP, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article 1251, 3° du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles L. 242-1 et L. 243-1 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1251, 3° du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, et les articles L. 242-1 du code des assurances et L. 231-6 du code de la construction et de l'habitation :

5. En application de ces textes, le garant de livraison qui a indemnisé les maîtres de l'ouvrage et qui exerce son recours subrogatoire contre leur assureur dommages-ouvrage ne dispose pas à l'égard de cet assureur de plus de droits que n'en avaient les propres assurés de celui-ci.

6. Pour condamner la SMABTP à garantir la CEGI, au titre des préjudices matériels subis par les maîtres d'ouvrage, l'arrêt retient que le garant, qui justifie s'être acquitté de ses obligations envers le maître de l'ouvrage en assumant le coût des travaux nécessaires à la reconstruction de l'ouvrage, bénéficie d'un recours personnel, en qualité de subrogé du maître de l'ouvrage, contre l'assureur dommages-ouvrage pour les désordres de nature décennale.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait confirmé le jugement ayant déclaré
M. et Mme N... irrecevables en leurs demandes formées contre la SMABTP, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SMABTP à garantir la Compagnie européenne de garanties et cautions de son préjudice matériel, l'arrêt rendu par la cour d'appel de Basse-Terre, le 17 septembre 2018,

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare irrecevable la demande formée par la société Compagnie européenne de garanties et de cautions contre la SMABTP ;

Condamne la société Compagnie européenne de garanties et cautions aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;