Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 9 juillet 2013
N° de pourvoi: 12-15.873
Non publié au bulletin Cassation partielle
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 16 mars 2001, M. et Mme X... (les emprunteurs), ont obtenu du Crédit agricole mutuel Sud Méditerranée (la banque) un prêt immobilier in fine garanti par le nantissement de deux contrats d'assurance-vie souscrits à cette occasion ; que la valorisation de ces contrats à l'échéance du prêt n'ayant pas permis d'assurer le remboursement de ce dernier, la banque a assigné, en paiement et en attribution du nantissement, les emprunteurs qui ont recherché sa responsabilité pour manquement à son obligation d'information, de mise en garde et de conseil ;
Sur le second moyen :
Attendu que les emprunteurs font grief à l'arrêt d'avoir attribué à la banque les deux contrats d'assurance-vie et d'avoir dit que cette attribution se ferait pour leur valeur au jour de leur appréhension, alors, selon le moyen :
1°/ que la valeur du bien nanti s'apprécie au jour de son attribution judiciaire ; qu'en ordonnant l'attribution judiciaire des contrats nantis en précisant néanmoins que cette attribution se ferait pour leur valeur au jour de « leur appréhension », la cour d'appel a violé l'article 2078 du code civil, dans sa version applicable aux faits de l'espèce ;
2°/ que le juge doit trancher le litige par une décision dont les effets ne sauraient dépendre de l'une des parties ; qu'en ordonnant l'attribution judiciaire des contrats nantis tout en précisant que cette attribution se ferait pour leur valeur au jour de « leur appréhension » par l'établissement de crédit ménageant ainsi la possibilité au créancier d'influer sur le quantum des condamnations en choisissant librement la date d'appréhension des contrats nantis, la cour d'appel a prononcé une condamnation au seul pouvoir du créancier, méconnaissant ainsi son office en violation de l'article 12 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en décidant que l'attribution judiciaire des contrats nantis se ferait "pour leur valeur au jour de leur appréhension" par le créancier attributaire, la cour d'appel n'a pas méconnu son office ni violé les dispositions de l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu, en second lieu, que l'article 2078, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, n'interdit pas que l'estimation de la valeur des biens nantis intervienne postérieurement à l'attribution de ceux-ci dès lors que l'évaluation du bien est déterminée au jour de cette attribution ; qu'après avoir ordonné la réalisation du gage, la cour d'appel, a exactement retenu que leur évaluation prévue par l'article 2078 du code civil devait être déterminée à la date de leur appréhension ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les emprunteurs font encore grief à l'arrêt d'avoir attribué à la banque les deux contrats d'assurance-vie et d'avoir condamné solidairement les époux X... à payer à la banque la somme de 332 007,83 euros en principal et intérêts arrêtés au 23 octobre 2008 et indemnité de résiliation, en remboursement du prêt bancaire avec intérêts calculés à compter de cette dernière date au taux contractuel de 6,655 % sur la somme de 302 928,02 euros et au taux légal sur celle de 21 270,13 euros, alors, selon le moyen, que l'attribution judiciaire du bien nanti en garantie du remboursement d'un prêt emporte extinction de l'obligation du prêteur à due concurrence de la valeur du bien ; qu'en condamnant les époux X... au paiement du solde du prêt sans en déduire la valeur des contrats d'assurance-vie qu'elle attribuait pourtant à l'établissement de crédit, la cour d'appel a violé les article 1234 et 2078 du code civil, dans sa version applicable aux faits de l'espèce;
Mais attendu que les emprunteurs reprochant à l'arrêt d'avoir statué sur des choses non demandées, devaient, non se pourvoir en cassation, mais présenter requête à la juridiction qui a statué en application des dispositions des articles 463 et 464 du code de procédure civile ; que le moyen est irrecevable ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu que pour limiter la condamnation de la banque à la somme de 20 000 euros et partant écarter le surplus des demandes, l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions de l'article 1147 du code civil que la banque est tenue envers ses clients à l'occasion de la souscription d'une opération de crédit d'un devoir d'information et de conseil dont le défaut est susceptible d'être sanctionné, la charge de la preuve incombant à ceux qui se prévalent de l'existence de tels manquements, et que les emprunteurs sont défaillants à rapporter la preuve de ces manquements ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que c'est à celui qui est tenu d'une obligation d'information et de mise en garde de rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la banque à payer à M. et Mme X... la somme de 20 000 euros, à titre de dommages-intérêts pour la perte d'une chance, l'arrêt rendu le 2 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud-Méditerranée aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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