Par une décision du 35 mai 2019 (n°18-14212), la Cour de cassation affirme que n’est pas abusive la clause de VEFA qui a pour effet de doubler la durée des jours de retard légitime non indemnisés par le vendeur.

Faits :

Les faits sont très simples, une société a vendu en VEFA un appartement et deux boxes à des particuliers. La livraison était prévue au second trimestre 2009, mais est finalement intervenue le 26 janvier 2010. Les particuliers ont donc assigné le vendeur afin de se voir indemniser le préjudice résultant du retard de livraison.

La Cour d’appel a accueilli cette demande. La Cour de cassation casse quant à elle cet arrêt sur le fondement des dispositions de l’article L.132-1 du code de la consommation.

Question de droit :

Dans quelles conditions, une clause de retard légitime peut-elle être considérée comme créant un déséquilibre significatif et entrainer son annulation ?

Considérant de principe :

« Qu’en statuant ainsi, alors que la clause d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement conclu entre un professionnel et un non-professionnel ou consommateur qui stipule qu’en cas de cause légitime de suspension du délai de livraison du bien vendu, justifiée par le vendeur à l’acquéreur par une lettre du maître d’oeuvre, la livraison du bien vendu sera retardée d’un temps égal au double de celui effectivement enregistré en raison de leur répercussion sur l’organisation générale du chantier n’a ni pour objet, ni pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat et, partant, n’est pas abusive, la cour d’appel a violé le texte susvisé ; »

Enseignement n°1 :

Le contrat de vente en l’état futur d’achèvement peut prévoir une suspension ou une prolongation du délai contractuel d’achèvement dans différentes hypothèses (jours d’intempéries au sens de la réglementation du travail, faillite d’entrepreneurs, etc.) qui viendront s’ajouter aux cas de force majeure. Une telle clause dite de « retard légitime » n’est pas jugée abusive au regard du droit de la consommation (Cass. 3e civ. 24-10-2012 n° 11-17.800 : Bull. civ. III n° 152, BPIM 6/12 inf. 443). La commission des clauses abusives considère par ailleurs que la clause prévoyant un report du délai de livraison d’une durée du double des jours d’intempéries n’est pas abusive dès lors que « le relevé de ces jours est réalisé par un tiers au contrat et sur la base de relevés météorologiques publics » (Avis 16-01 du 29-9-2016).

Enseignement n°2 :

La Cour d’appel avait considéré qu’en permettant un doublement de la durée des jours de retard non indemnisés par le vendeur, la clause réduit de façon importante l’indemnisation due aux acquéreurs et contredit ainsi la portée d’une obligation essentielle du vendeur d’immeuble en l’état futur d’achèvement, celle de livrer le bien acheté à la date convenue et, en cas de retard non justifié contractuellement, de devoir l’indemniser. Cette clause permet donc au vendeur de limiter les conséquences d’un retard de livraison et de réduire très sensiblement l’indemnisation accordée à l’acheteur. Créant ainsi au détriment de l’acheteur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat de vente, la clause est abusive et doit donc être réputée non écrite

Enseignement n°3 :

En l’espèce, la Cour de cassation réaffirme le principe de validité des clauses de majoration de délai en cas de retard légitime, au sens du droit de la consommation. Il conviendra, à ce sujet, d’observer le développement de la jurisprudence sur ce point dans le cadre de la réforme du droit des contrats et des dispositions de l’article 1171 du code civil.

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