Il est de jurisprudence constante que le comptable public doit vérifier l’existence et la cohérence des pièces justificatives avant de procéder au paiement d’une dépense. Toutefois, son office ne s’étend pas au contrôle de la légalité des pièces qui lui sont présentées.

 

Faits et procédure :

Suite à une décision de la Cour des comptes, deux comptables publics s’étaient retrouvés débiteurs d’une somme de 560.000 euros pour le premier et de 148.000 euros pour le second. Il était reproché à ces deux comptables publics d’avoir procéder à des paiements d’une prime de mobilité dont les agents de l’ONEMA bénéficiaient.

Les deux comptables s’étaient donc pourvus devant le Conseil d’Etat afin d’obtenir l’annulation de ces condamnations.

 

Considérant de principe :

« 5. Au titre de la charge n° 2, la Cour des comptes a constitué M. A... et Mme D..., qui se sont succédé comme comptables publics de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, débiteurs respectivement des sommes de 328 617,40 euros et de 39 171,96 euros correspondant au paiement, en 2014 et 2015, des indemnités de mobilité à des agents de l'Office qui n'étaient pas affectés en brigades mobiles d'intervention. Pour se prononcer ainsi, la Cour s'est fondée sur la seule circonstance que ces comptables n'avaient pas suspendu les paiements concernés alors que les décisions à caractère réglementaire du directeur général de l'Office et les lettres du ministre prévoyant l'attribution de la prime de mobilité à certains agents non affectés en brigades mobiles d'intervention étaient contraires aux dispositions de l'article 6 du décret du 21 décembre 2001. En statuant ainsi, alors qu'elle devait seulement rechercher, d'abord, sur quelles pièces justificatives les comptables auraient dû se fonder pour régulièrement apprécier la validité de ces dépenses, le cas échéant, compte tenu de l'absence de nomenclature applicable à l'établissement public en cause, en se référant à la nomenclature applicable à l'Etat, laquelle prévoit que figure parmi les pièces justificatives le texte institutif de l'indemnité, et, ensuite, si ces pièces justificatives ne présentaient pas d'incohérence au regard de la nature et de l'objet de la dépense engagée, elle a exigé des comptables qu'ils exercent un contrôle de légalité sur les pièces fournies par l'ordonnateur, alors que, en présence des pièces justificatives requises, ceux-ci étaient tenus de procéder aux paiements litigieux, et entaché ainsi son arrêt d'une erreur de droit. Par suite, son arrêt doit être annulé en tant qu'il porte sur la charge n° 2. »

 

Apport de la décision :

En l’espèce, la Cour des comptes reprochait aux comptables de n’avoir pas suspendu les paiements alors que les décisions du directeur et du ministre étaient contraires aux dispositions du décret.

Le Conseil d’Etat rappelle le principe selon lequel le comptable public doit vérifier la complétude des pièces qui lui sont transmises avant de procéder au paiement des sommes dues. Toutefois, il n’a pas pour obligation de vérifier si les pièces qui lui sont transmises sont légales et si le fondement juridique du paiement est correct.

La décision de la Cour des comptes est donc annulée sur ce point par le Conseil d’Etat.

 

Maître MOGENIER intervient en droit public financier.