Portée d'une expertise amiable

 

 

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
 
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 septembre 2023




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 652 F-D

Pourvoi n° S 21-24.019




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 SEPTEMBRE 2023

1°/ Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 8], dont le siège est [Adresse 8], [Localité 3], représenté par son syndic en exercice, le Cabinet LVS, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 3],

2°/ la société Cabinet LVS, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], [Localité 3],

ont formé le pourvoi n° S 21-24.019 contre l'arrêt rendu le 25 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-4), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Ervel, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 5], [Localité 3],

2°/ au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], dont le siège est [Adresse 5], [Localité 3], représenté par son syndic en exercice, la société Cerutti gestion immobilière, dont le siège est [Adresse 11], [Localité 1],

3°/ à Mme [R] [I], épouse [O], domiciliée [Adresse 4], [Localité 2],
4°/ à M. [T] [D], domicilié [Adresse 8], [Localité 3],

5°/ à M. [J] [W], domicilié [Adresse 10], [Localité 3],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grandjean, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du syndicat des copropriétaires du [Adresse 8] et de la société Cabinet LVS, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Ervel, après débats en l'audience publique du 4 juillet 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grandjean, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 mars 2021), en 2006, les lots de copropriété d'un immeuble, situé [Adresse 5] et [Adresse 9] et dont la société civile immobilière Ervel (la SCI) est propriétaire, ont subi des infiltrations d'eau à l'occasion de travaux réalisés sur la voie publique par la commune de Menton.

2. Pour déterminer les causes du sinistre, une expertise a été ordonnée par la juridiction administrative.

3. Après le dépôt du rapport, la SCI a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5], le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] ainsi que trois de ses copropriétaires en injonction de procéder aux réparations nécessaires et en indemnisation de son préjudice.

Sur les premier et troisième moyens

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la SCI diverses sommes, alors « que pour retenir que les dommages subis résultent de sa faute, la Cour d'appel a affirmé que le rapport d'un expert judiciaire désigné dans une instance antérieure, à laquelle il n'était pas partie, - de surcroît assigné en justice dans la nouvelle instance alors qu'il n'était représenté ni par un syndic ni par un administrateur provisoire désigné en justice - « peut être pris en considération dans la mesure où il n'est pas le seul document produit par la SCI Ervel et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] (...) ; (...) la SCI comme le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] produisent de nombreuses pièces à l'appui de leurs réclamations et non le seul rapport de l'expert judiciaire » ; que la cour qui, en définitive, s'est fondée, quant aux causes du dommage, sur les seules conclusions de ce rapport, non contradictoire à l'égard du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8], et qui, au demeurant, n'a pas même précisé quelles autres pièces étaient produites, a violé l'article 16 du Code de procédure civile, ensemble le principe de la contradiction. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

6. Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] soutient que le moyen est nouveau et mélangé de droit et de fait.

7. Cependant, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8], qui n'a pas conclu devant la cour d'appel, est réputé avoir adopté les motifs par lesquels le jugement a rejeté la demande de la SCI.

8. Le moyen, qui n'est donc pas nouveau, est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

10. Pour condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8], l'arrêt retient que le rapport de l'expertise, à laquelle il n'était pas partie, peut être pris en considération dans la mesure où il n'est pas le seul document produit par la SCI et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 5].

11. En statuant ainsi, sans identifier les documents qui corroboraient les conclusions de l'expert sur l'origine du dommage, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] » à payer à la société civile immobilière Ervel la somme de 1 790 euros TTC au titre des travaux de reprise et celle de 11 172,08 euros au titre des frais d'expertise, l'arrêt rendu le 25 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société civile immobilière Ervel aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;