Cour de cassation

chambre civile 3

Audience publique du mercredi 27 février 2013

N° de pourvoi: 12-12.352

Non publié au bulletin Cassation partielle

Donne acte à la société Dirickx espace protect (Dirickx) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Société du terminal méthanier de Fos Cavaou et la société Sofregaz ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 novembre 2011), que la société Dirickx chargée en sous-traitance par la société Sofregaz de certains des travaux que la Société du terminal méthanier de Fos Cavaou lui avait confiés, a elle-même sous-traité une partie des travaux à un groupement d'entreprises composé des sociétés Vega et Razel dont le mandataire était la société Vega, à ce jour représentée par son liquidateur judiciaire ; qu'un différend étant survenu sur le paiement de certaines sommes réclamées au nom du groupement par la société Vega, les travaux ont été interrompus et la société Vega a obtenu la désignation d'un expert qui avait déjà été désigné sur requête comme consultant ; que la société Dirickx a choisi une autre entreprise pour achever le chantier ; que la société Vega l'a assignée en paiement de sommes ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la cour d'appel, qui statuait après dépôt du rapport d'expertise et devant laquelle la société Dirickx avait indiqué qu'elle avait tenté vainement d'obtenir la récusation de l'expert par le juge chargé du contrôle, a exactement retenu, par une motivation suffisante, que la demande de récusation devait être rejetée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le contrat de sous-traitance signé par les parties était à prix unitaire et retenu à bon droit que ce marché n'avait pas de caractère forfaitaire, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Dirickx fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat devait être supportée par elle et de la condamner à payer diverses sommes à la société Vega TP en sa qualité de mandataire du groupement Vega TP-Razel, alors, selon le moyen :

1°/ que l'arrêt qui se borne sans autre motivation à reproduire, sur un point essentiel du litige, les conclusions d'appel de la partie aux prétentions de laquelle il fait droit ne statue que par une apparence de motivation faisant peser un doute légitime sur l'impartialité de la juridiction et sur l'examen effectif des moyens de la partie adverse ; que pour décider que la résiliation du contrat était imputable à la société Dirickx, la cour d'appel a repris littéralement les conclusions d'appel de la société Vega selon lesquelles « la société Vega s'est heurtée à des obstacles régulièrement dénoncés par courriers fax ou e-mails successifs auxquels la société Dirickx Espace Protect n'a pas su pallier (ou remédier) ; que la société a été dépassée par l'ampleur et la complexité du chantier qui l'ont amenée à solliciter le groupement pour des prestations ou travaux supplémentaires tout en refusant de les contractualiser et de les régler » ; qu'ensuite , la cour d'appel a repris les termes des conclusions d'appel en énonçant que « le contrat de sous-traitance avait été signé le 14 décembre 2006 et qu'à cette date aucune caution bancaire n'avait été délivrée » ; qu'enfin elle a reproduit le § 10 de la page 32 des conclusions d'appel de la société Vega selon lesquelles « tout en exigeant la réalisation de travaux ou de prestations complémentaires générant des prix nouveaux, la société refusait de régulariser les avenants correspondants » ; qu'en se bornant ainsi à reproduire les conclusions d'appel de la société Vega sans aucune référence aux écritures de la société Dirickx, la cour d'appel, a violé l'article 6 §1 du de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en toute hypothèse la résiliation d'un contrat de sous-traitance ne sera imputable à l'entrepreneur qu'en cas d'inexécution fautive d'une obligation ; qu'il résulte des constatations des premiers juges qui ont été confirmées par la cour d'appel que l'ensemble des travaux considérés comme exigibles par le groupement Vega/Razel a été réglé fin décembre 2007 ; que ces règlements ont été d'un montant de 1 372 796,63 euros ; que le montant des travaux réalisés (hors indemnités) a été chiffré à 1 275 479,22 euros par l'expert ; qu'en affirmant purement et simplement que la société Dirickx avait été dépassée par l'ampleur et la complexité du chantier qui l'avaient amenée à solliciter sans cesse le Groupement pour des prestations ou travaux supplémentaires tout en refusant de les contractualiser et de les régler, si bien que la rupture fixée au 17 janvier 2008 devait être supportée par la société Dirickx, la cour d'appel, qui n'a pas expliqué quels étaient les travaux et prestations qui n'auraient pas été payés de façon à entraîner la rupture du contrat à ses torts, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;

3°/ que, de plus, un entrepreneur n'est tenu de payer au sous-traitant que les travaux qui ont été exécutés et pour lesquels il a passé commande pour un prix qu'il a accepté ; que dans ses conclusions d'appel, la société Dirickx a fait valoir, qu'elle n'avait pas l'obligation d'accepter les exigences de la société Vega sur le prix des prestations ; que si le marché était à forfait, la facturation portant sur les indemnités des difficultés de chantier , ne pouvait être exigée et si le contrat était en régie, la société Dirickx n'était pas tenue d'accepter le montant des devis pour travaux supplémentaires et dans cette situation, elle pouvait désigner un nouveau sous-traitant ; qu'en décidant que la rupture du contrat était imputable à la société Dirickx sous prétexte qu'elle avait exigé la réalisation de travaux ou prestations complémentaires générant des prix nouveaux, et qu'elle avait refusé de régulariser les avenants correspondants, la cour d'appel, qui n'a pas précisé pour quelles raisons la société Dirickx était tenue d'accepter et de contractualiser les devis imposés par son sous-traitant pour de nouveaux travaux, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1134 et 1147 du code civil ;

4°/ qu'enfin l'absence de cautionnement de l'entrepreneur à la signature du contrat de sous-traitance ne peut être entraîner la résiliation du contrat lorsque la caution a été ensuite obtenue et appelée avec succès par sous-traitant après le commencement des travaux ; qu'en reprochant à la société Dirickx de ne pas avoir justifié de cautionnement le jour de la signature du marché alors que les premiers juges avaient constaté que ce cautionnement obtenu le 16 mars 2007 par la BNP pour un montant de 1 352 358,15 euros et le 20 décembre 2007 pour un montant de 850 000 euros et que la société Vega TP avait appelé la caution à trois reprises sans que celle-ci ne soit contestée par la BNP, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil et l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'il résultait des éléments du dossier et du rapport d'expertise que la société Vega s'était heurtée à des obstacles techniques majeurs dénoncés par courrier, et que la société Dirickx avait refusé de contractualiser les prestations complémentaires, la cour d'appel, qui ne s'est pas bornée à reproduire les conclusions de la société Vega et qui a retenu à bon droit que le marché n'étant pas forfaitaire la société Dirickx devait régler outre les sommes dues au titre des travaux effectués, celles entraînées par les difficultés d'exécution et qui a apprécié les sommes dues par la société Dirickx au titre des travaux supplémentaires sur la base des conclusions de l'expert après contrôle des réclamations de la société Vega, a pu, par ces seuls motifs, retenir que la rupture prématurée du contrat était imputable à la société Dirickx, et a souverainement fixé le préjudice en résultant ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le quatrième moyen :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour condamner la société Dirickx à payer à la société Vega la somme de 8 000 euros, l'arrêt retient qu'eu égard au préjudice subi, il convient de la condamner à payer cette somme à titre de dommages-intérêts ;

Qu'en statuant ainsi sans caractériser l'existence d'une faute de la société Dirickx en relation avec un préjudice subi par la société Vega, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Dirickx à payer à la société Vega la somme de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 25 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;